L’opinion a longtemps considéré que Diomaye-candidat était bloqué par le fait d’être en prison. Sa résidence à la citadelle du silence ne lui donnant, ni la possibilité d’exprimer son talent, ni l’opportunité de bénéficier convenablement de son temps d’antenne encore moins le droit de dérouler correctement sa campagne. Or, depuis sa sortie de prison et du silence qui allait avec, la parole de Diomaye-candidat s’est révélée dévastatrice.
Chaque mot prononcé par le candidat étant une performance… destructrice contre lui- même, contre le « Projet », contre Pastef et contre le pays. Les amis de Diomaye se rendent compte que la prison, pour le candidat qu’il est, n’était guère une punition, mais plutôt une bénédiction.
Ainsi, par le silence qu’elle lui imposait, la prison devenait, paradoxalement, le meilleur allié de Diomaye-candidat. Car elle l’empêchait d’étaler, aux yeux de tous, ses limites criants, son caractère dilettante, sa maîtrise hasardeuse d’un Projet qui était mythe avec Sonko et qui s’est révélé chimère dès lors que Sonko est devenu Diomaye! Ku wax feeñ; Diomaye waxna, Diomaye feegn na.
Qu’on aime Sonko ou pas, il est évident que le maire de Ziguinchor a de la bouteille. Que son leadership, quoique perfectible, est indéniable. Que sa stature, hors ses postures anarcho-populistes, a de la gueule. Entendre Diomaye c’est, immédiatement, donner le graal à Sonko. Non parce que « Diomaye moy Sonko », mais parce que la faiblesse de Diomaye nous renseigne sur les atouts de Sonko. Le flegme discursif, quoique subversif de Sonko, dépare avec le louvoiement de l’homme à la barbe mal entretenue.
Mais pouvait-il en être autrement? Un candidat fantoche se définissant lui-même comme de substitution, peut-il performer jusqu’à nous faire oublier que marionnette il est; que marionnette il demeure.
Et la suprême injure qui puisse être faite à Diomaye est celle-là que lui adressent ses propres partisans: « Diomaye moy Sonko ». En mettant en avant leur candidat sous l’angle du siamois, ils reconnaissent que Diomaye « mottul », qu’il est naturellement limité.
Les voilà cherchant donc à l’«anoblir » en faisant de lui le pendant inséparable et similaire de Sonko. Or, le drame, c’est que la quête et le désir de tout siamois est de se voir libéré de son frère qui lui bouche l’horizon, l’empêche de se mouvoir et le maintien dans une prison de sang et de chair! Le pathétique, c’est que tous vrais jumeaux ne le sont que suite à une partition ovulaire. Non par substitution.
Sonko et Diomaye sont, en fait, deux vrais faux-jumeaux. Et dans cette synthèse de similitudes et de différences, Diomaye remporte la palme du jumeau le plus faible, le moins charismatique et à la croissance la moins achevée.
Ainsi donc, lire, écouter et suivre Diomaye, c’est entendre que sa candidature est candidature de tromperie, candidature de duperie et candidature de supercherie.
Aussi, nous est-il permis de nous interroger sur les vraies raisons ayant poussé Sonko à choisir Diomaye en lieu et place de tant d’autres profils plus attractifs et dont Pastef ne manquerait pas.
Les hommes politiques sont connus pour être malicieux lorsqu’il s’agit du pouvoir. N’est-il donc pas plausible de penser que Sonko, ne voulant pas risquer de perdre la main sur son électorat et ses soutiens, a sciemment misé sur le moins bon d’entre-eux. Afin que l’ombre que projetterait ce dernier confirme et conforte son leadership.
Il s’agit là d’une ruse d’un opposant qui sait qu’il ne sera pas candidat et qui ne souhaiterait pas que son remplaçant puisse s’imposer sur son dos.
Cette hypothèse est d’autant plus plausible que des trois candidats de remplacement retenus par Sonko, seul Diomaye est de Pastef. L’expertise des deux autres et leurs statures sont largement supérieures à celles du candidat qui miaule en croyant parler.
Mais ces deux sont faciles à maîtriser. La faiblesse d’un Habib Sy et celle d’un Cheikh Tidiane Dieye, dans l’éventualité d’une mise en concurrence ultérieure avec Sonko, vient du fait qu’ils n’ont aucune légitimité autre que celle que Sonko leur a conférée au sein du parti Pastef dont ils ne sont guère membres.
Il s’agit là d’une démarche manichéenne de Sonko qui fait de Diomaye Faye son prisonnier en même temps que son obligé politique. Tant et si bien que Diomaye, dans l’hypothèse -hypothèse fort peu probable du reste- où il gagnerait la présidentielle, pourrait se donner pieds et mains liés à Sonko.
Cela a déjà commencé. Avec une campagne démarrée chez Sonko, une promesse publique de faire de la Casamance -région d’origine de Sonko- la prochaine capitale, et un poste de vice-président qui verrait, dans les faits, le marionnettiste gouverner et la marionnette faire marionnette.
C’est la Bérézina assurée!
Avec tous les risques de crises au sommet, de dualité et de querelle entre légalité institutionnelle et légitimité associative. N’est pas Poutine qui veut, pas plus que Medvedev n’est pas monsieur tout le monde.
Notre pays, à la croisée des chemins, point n’a besoin de cette incongruité institutionnelle que dessinent déjà nos autoproclamés faux siamois.
Le pouvoir présidentiel est un temple sacré. Trop sérieux pour faire l’objet de jeux de rôles et de « greffons » politiques. La greffe ne prendrait guère et le rejet serait préjudiciable en premier au pays et au peuple sénégalais. A Bignona, le sourire aux airs narquois, le rire amusé et les applaudissements de circonstance du brillant Dr Abdourahmane Diouf, au chevet du « patient » Diomaye, en disent long sur le malaise qui s’empare de la coalition. Il ne serait pas surprenant que Sonko tente des manœuvres pour minorer la prise de parole de celui qu’il a choisi pour mieux se crédibiliser et dont il s’est moqué publiquement du look.
Mais à l’évidence, science incomplète n’est que ruine d’images. Et c’est ici que se révèle la profondeur des paroles de Amadou Ba rappelant, à ses disciples de jadis, que « seuls les mauvaise élèves parlent en mal de leur maître ».
Notre navire a donc besoin d’être tenu. Bien tenu. Par des mains libres; des mains courtoises mais fermes; des mains crédibles et expérimentées.
La station présidentielle est trop précieuse pour qu’on la confie à des apprenants du vivant de leur maître. Se glisser dans les habits de l’acteur principal fait-il du figurant un homme à la hauteur? Assurément non!
Le Sénégal ne mérite pas ça. C’est d’ailleurs dans ce sens qu’il faut saluer la pertinence de la déclaration du candidat Amadou Ba qui rappelle, avec sagesse et tact, à Diomaye et à Sonko que la plus haute institution n’est pas un champ de jeu ni de tuteurage.
Cette amnistie est une amnistie salvatrice. Elle a permis, en rendant à Diomaye sa liberté et sa parole, de nous montrer que l’on nous propose un prématuré politique comme potentiel primus inter pares.
Décidément, Dieu aime bien le Sénégal
Rendons donc grâce à Dieu. Car il a sans doute choisi de favoriser la libération de Diomaye pour mieux nous mettre en garde en dévoilant, par son verbe, toutes ses insuffisances. En effet, tandis que le silence est une forme de voile qui masque nos sentiments, nos émotions, nos passions, la prise de parole dévoile notre être, met en évidence nos forces et souligne nos faiblesses. Diomaye a parlé et on s’est rendu compte que « Ndeketé Diomaye dou Sonko, té Sonko dou Diomaye ». Mieux, on sait que Diomaye atanoul Sénégal. A la bonne heure !
Dieu nous aurait donc mis en garde. Saurons-nous en faire bon usage en votant massivement pour le candidat de la paix et de la prospérité partagée qui, depuis la grande station présidentielle, en grand maître qui assure et qui rassure, poursuivra alors la formation de ses mauvais élèves de jadis. Pour que ces derniers, apprenant et préservant, puissent demain, à leur tour, bien préparés et mieux outillés, se mettre encore plus au service de notre grande et belle nation.
Mamadou Thiam et Amadou Th. Diop
Plumes debout pour Amadou Ba
mamadouthiam@hotmail.com