Nous sommes un pays de croyants.
Nous croyons en l’existence de Dieu, à Ses livres sacrés que sont le Coran et la Bible. Les adeptes des religions traditionnelles croient aussi aux mêmes valeurs que transmettent les religions révélées.
Nous tous sommes attachés aux valeurs cardinales de culture et de civilisation que nous ont léguées nos ancêtres. Nous sommes tous tristes de les voir disparaître une à une au fil du temps.
En fait, nous sommes très singuliers.
Nous nous émouvons des passe-droits qui bénéficient aux autres alors que la plupart d’entre nous est prête à ne pas respecter une queue devant un arrêt de bus ou à l’hôpital, à faire recruter son enfant par un ami, à donner mille francs pour obtenir au plus vite les papiers constitutifs d’un dossier, etc.
Il y a quelque chose de pathétique en nous!
La souffrance de l’autre nous touche profondement. Nous ne chercherons pas à savoir s’il est la propre cause de sa souffrance. S’il a tort. Ce qui nous importe, il souffre, il a mal, donc il doit bénéficier de notre compassion.
Voilà une qualité qui fait de nous un peuple qui défend toujours le faible face au fort. Le fort ne devra jamais utiliser sa force, le riche ne jamais user de ses moyens pour humilier, anéantir la personne qui n’a pas assez de force pour se défendre, assez de richesse pour survivre.
Ces beaux sentiments ne sont qu’une brève hirondelle dans le climat éthique exécrable dans lequel évolue notre société.
Le vol est devenu une coutume.
Il y a les grands voleurs de l’argent de la République qui sont intouchables. Il y a les petits voleurs qui vont en prison car ils ont pris un poulet, un cabris, une robe en séchage au soleil, la bicyclette de Mamadou, la trottinette de Binta. Il y a tout le reste des Sénégalais qui ne viennent pas à l’heure au travail, qui quittent le travail avant l’heure, qui au travail font autre chose que travailler, ils volent le peuple sciemment sans s’en émouvoir.
L’Internet a créé un jeu désormais favori de toutes les personnes qui ont la haine dans le cœur, la médisance dans les sentiments et qui sont envieux. Elles peuvent dire gratuitement du mal à une personne tout en étant lâchement anonyme, derrière un pseudonyme ou sous un faux compte créé uniquement à cet effet.
Le « sos », la création d’un mensonge et son expression achevée qu’est le complot sont devenus l’exercice favori des réseaux sociaux avec de vrais faux héros adorés et même adulés par une bonne partie de la population adepte de voyeurisme et de sensations fortes que ne peuvent plus donner le cinéma et le théâtre disparus de nos espaces culturels.
Le « lijjanti » a pris le pouvoir sur le travail dur, honnête et peu rétribué. Xaalis de nu koy lijjanti! Dit l’adage de plus en plus populaire. La loi et la réglementation ne peuvent pas résister à l’effet corrosif de cette culture qui ne connaît que la finalité de l’action.
Peut importe les valeurs bafouées! Ce qui compte c’est le résultat, l’argent très vite amassé, les maisons construites, les terres accumulées, les belles femmes mariées, les concubines dans des maisons luxueuses, les griots engraissés, etc.
L’argent n’a pas d’odeur!
L’argent volé construit des mosquées, creusent des puits, finance des GIE, remplit les « calebasse » des femmes, soutient les ASC, achète des motopompes pour les quartiers inondés, des moutons de Tabaski aux indigents. Il est très difficile de distinguer le vrai mécénat, de la redistribution sociale de l’argent volé aux populations.
Nous avons l’impression que le Sénégalais devient subitement amnésique lorsque sont intérêt est en jeu. Il oublie Dieu et les valeurs attachées à ses religions.
Avons-nous perdu Dieu?
Car depuis belle lurette nous avons perdu le sens individuel et collectif de l’indignation morale et éthique.
Et pourtant Dieu est là omniprésent !
C’est nous qui nous perdons sur les méandres de la perdition collective.
Il est temps de revenir à Dieu.
Dakar, mercredi 25 octobre 2023
Prof Mary Teuw NIANE