Décidément, le dernier remaniement ministériel, opéré par le Président de la République Son Excellence Macky Sall, n’a pas fini de soulever des vagues. Nous assistons à des débats passionnants mettant en confrontations des idées et des analyses tout aussi pertinentes que superflues.
L’on constate l’émergence de nouveaux types d’analystes politiques et ce n’est pas surprenant dans un pays où tout le monde est expert en tout et se prononce sur tout. Les prises de parole publique sont facilitées par la pauvreté des débats et des thèmes abordés avec des concaténations d’affirmations orientées qui ne reposent sur aucune analyse en profondeur. De toute évidence, la recomposition de l’espace politique que nous observons est inédite dans l’histoire politique du Sénégal.
Son analyse appelle la combinaison de grilles d’analyse politiques mais aussi socio-économiques scrutées dans le temps. L’on semble, au détour, d’une courte analyse, dire que la pandémie de covid 19 et l’immigration clandestine ne sont pas des raisons suffisantes pour justifier, à la suite du dialogue national et politique, le remaniement du gouvernement. Parmi les nominations, celle du président Idrissa Seck à la tête du CESE est, de tout évidence, celle qui suscite, à juste titre, plus de suspections. Nous allons essayer de répondre à ceux qui pensent que c’est une institution inutile.
La question posée est de savoir quelle est la valeur ajoutée du CESE dans la vie des populations ? La lecture des attributions de cette institution définies dans la loi organique n° 2012- 28 rend compte de la centralité de ses domaines d’actions. Le CESE est le siège de la cristallisation des aspirations à l’inclusion économique, sociale, financière, environnementale et citoyenne des populations. Creuset de la pluralité des secteurs socioprofessionnels et de la diversité des composantes de la société, le CESE pourrait jouer un rôle imminent dans la production des idées et des connaissances susceptibles d’orienter le sens des politiques publiques dans tous les domaines.
La majorité des analystes et commentateurs de la vie politique pense que certaines institutions, comme le CESE, sont budgétivores. Rappelons simplement que la contrepartie des ressources allouées à une institution ne peut s’apprécier que sous le critére de la pertinence, c’est-à-dire de l’adéquation entre les attentes des populations et les ressources mises à disposition.
Sous cet angle, de par ces attributions et sa composition, le CESE dispose de tous les instruments pour répondre aux attentes des populations. La loi organique n° 2012- 28 offre expressément au CESE des opportunités d’intervenir sur les questions spécifiques telles que, celle de la redevabilité, du renforcement de la démocratie participative et de l’immigration clandestine. Le CESE pourrait contribuer à rendre la redevabilité effective grâce à un contrôle citoyen permanent des interventions publiques.
C’est tout un programme que de vouloir conduire le processus de transformation de la vie dans notre société. – Le CESE pourrait être l’organe d’impulsion des changements de comportements pour arriver à faire en sorte que la majorité de la population devienne de véritables citoyens-évaluateurs c’est-à-dire capables de faire des choix raisonnés.
En effet, les débats autour de personnes sont devenus insupportables, les populations exigent, à juste raison, plus de confrontations d’idées. La principale cause est la faiblesse des offres de projets de société. A ce niveau, le CESE pourrait jouer sa partition en établissant à l’approche de l’élection présidentielle un rapport d’évaluation couvrant l’ensemble des secteurs social, économique, financier et environnemental.
Le but étant de mettre tous les candidats au niveau d’information afin de leur permettre d’élaborer des offres alternatives crédibles basées sur les éléments factuels. Organiser la démocratie participative, l’autre maillon manquant ou faible de notre système démocratique qui renforce la démocratie représentative. En effet, le Président Idrissa Seck, nouveau président du CESE, dispose de tous les instruments nécessaires pour mettre en place un dispositif susceptible de contribuer à l’augmentation la participation des citoyens à tous les niveaux de la vie publique.
– Aussi, les citoyens ont la possibilité de saisir directement le CESE par voie de pétitions. On se plaint, à juste titre, de la pauvreté des débats sur les offres de politiques des candidats à l’élection présidentielle. Inspirer les politiques publiques dans l’élaboration des réponses aux problèmes de l’heure, qui sont l’immigration des jeunes et la Pandémie Covid 19. Le CESE a les instruments pour organiser des enquêtes dans les quartiers, les communautés les plus touchées par l’immigration clandestine, en libérant la parole dans les ménages.
L’immigration clandestine est une problématique complexe qui appelle une approche inclusive par des dialogues dans des cadres institutionnels. Le CESE peut porter cette initiative dans le cadre de sa mission et a la possibilité d’exposer son avis formulé à l’assemblée nationale devant les représentants du peuple. (Article 5 de la loi organique 2012- 28 portant organisation et fonctionnement du conseil économique social et environnemental).
A la suite du dialogue politique et social, le président de la République Macky Sall, a fini de matérialiser son engagement d’ouverture à toutes le forces vives de la nation. Quel génie politique … Il n’y a pas d’institution prestigieuse, chaque institution n’est que le reflet des hommes et des femmes qui l’animent au quotidien.
Au Président Idrissa Seck, les sénégalais dans leurs diversités n’attendent qu’une seule chose, que vous transformiez le CESE en véritable moteur de changements. C’est possible.
Par Cheikhou Oumar Sylla : Expert en Evaluation des politiques publiques