Elle gère le portefeuille de la microfinance et de l’économie sociale et solidaire et administre depuis janvier 2022 la mairie de commune de Niaguis. Victorine Anquediche Ndeye, revient sur l’actualité politique rythmée par les derniers événements et accepte de se prononcer sur les propos tenus par le leader du Pastef à son endroit, qui avait fait l’objet d’une réponse virulente de sa part.
Madame le Ministre, le Sénégal a connu des événements entachés de violence avec son lot de morts, quel est le sentiment qui vous anime ?
De l’indignation quand on sait que nous aurions pu faire l’économie de cette violence et préserver des vies. Il aurait pour cela de la responsabilité de la part de celui qui a depuis des mois conditionné cette violence en appelant ouvertement à « un combat final », prêchant la haine et la méchanceté pour se substituer à des rendez-vous judiciaires avec l’aide d’une société civile partisane et des ennemis de la République…. Je suis aussi attristée devant le décompte macabre que certains tentent d’exhiber à chaque fois pour faire le procès d’un régime comme s’ils étaient insensibles à la souffrance des familles. J’ai l’impression qu’il y a des sénégalais qui pleurent des morts et d’autres qui en demandent encore plus, car tout le monde a entendu les appels à manifester au prix de la vie des jeunes.
Vous n’y allez pas un peu trop fort là ?
Aucun mot n’est assez fort pour décrire ce qui s’est passé. Il s’agit de la conséquence d’appels à la violence, à la haine, à l’insurrection et même aux meurtres. La tête de juges a été mise à prix, des appels aux meurtres lancés contre des gradés des forces de défense et de sécurité, de membres du gouvernement, d’hommes et de femmes politiques et même de journalistes, au nom de leurs positions, leurs fonctions et leurs convictions. Des édifices publics incendiés, des commerces pillés, des cocktails Molotov utilisés sur des domiciles, à l’université et même sur les véhicules de police et de la gendarmerie. Des écoles brûlées, des consulats vandalisés, des banques attaquées, le système de transport paralysé, que cherche-t-on réellement, quel est le projet et à qui profite tout cela ? Face à cette situation je suis à la fois révoltée et indignée et je le resterai contre ce projet qui vise à déstabiliser ma nation.
“Je le dis et l’assume, ce qui s’est passé les 1er et 2 juin n’est pas une manifestation et dépasse des émeutes”
On parle de forces occultes, de projets de déstabilisation, de personnes armées qui auraient participé aux manifestations. Des affirmations du gouvernement que contestent l’opposition et une partie de la société civile, qu’en est-il réellement ?
Ceux qui contestent cela aujourd’hui sont les mêmes qui avaient soutenu la thèse du complot de Sweet Beauty, sans jamais prouver les dispositions de la demoiselle Adji Sarr à délivrer des soins de Kinésithérapie, sans oser interroger Ousmane Sonko qui a pu avec un mal de dos se déplacer seul en plein couvre-feu vers ce lupanar et surtout qui aura refusé d’affronter ces présumés comploteurs dans un procès qui a vu toutes les parties prendre part au débat. Cette opposition et cette société civile rejointes depuis un moment par des diplômés qui se font passer pour des intellectuels, cautionnent qu’un citoyen défie la justice, appelle à déloger un Président démocratiquement élu et parle de tuer le Chef de l’Etat. Quelle est la crédibilité de ces gens qui ont réussi à travestir des faits depuis deux ans et laisser le doute s’installer dans la tête d’une partie des sénégalais ? Que vaut la constance des faits relatés par Adji Sarr ? Le Ministre de l’intérieur a parlé, la police a communiqué sur les faits et le droit a été dit. Je le dis et l’assume, ce qui s’est passé les 1er et 2 juin n’est pas une manifestation et dépasse des émeutes. Le livre blanc du gouvernement revient en détail sur les événements et les enquêtes sont en cours.
“Les nervis ? il s’agit d’une volonté de qualifier certains Sénégalais qui ont décidé de se dresser contre le saccage de biens privés notamment dans les quartiers, des sénégalais “
On parle de nervis utilisés par votre camp lors des événements ?
Je souhaite préciser une chose essentielle, mon camp dans cette histoire c’est le Sénégal, la République et la Nation. Il ne s’agit pas de bord politique et mon appartenance est connue de tous, c’est le pays qui est attaqué et en tant que républicaine je fais face. Alors pour en revenir à cette question de nervis, il s’agit d’une volonté de qualifier certains Sénégalais qui ont décidé de se dresser contre le saccage de biens privés notamment dans les quartiers, des sénégalais qui ont été dans les rues et ruelles de la capitale pour dégager les voies. J’en veux pour preuve des jeunes proches d’un guide religieux qui ont été sur le terrain pour dégager les véhicules brûlés. Je suis à l’aise pour parler des jeunes de ce guide religieux, car pendant des années je les ai vu dans les cimetières s’adonner à des activités de nettoyage des sépultures et je ne crois pas qu’on puisse utiliser le terme nervis dans ce cas. Il faut arrêter cette stigmatisation.
“Je suis fière d’avoir eu un magistrat comme collaborateur, d’être sœur de magistrat, comme j’ai la fierté d’avoir une sœur médecin et d’être fille de fonctionnaires qui ont servi ce pays”
Il y a de cela quelques semaines, Ousmane Sonko vous a cité dans un projet visant à le liquider et vous avez eu à tenir des propos assez acerbes contre lui. Pourtant il était question de votre Secrétaire général qui l’aurait condamné dans l’affaire Mame Mbaye Niang….
Je vous arrête. Ma réponse n’est pas liée aux accusations fallacieuses, mais plus au propos ethniciste tenu parlant de ma communauté comme une filière et voulant encore une fois stigmatiser des Sénégalais. A ce propos je n’ai entendu aucun opposant, aucun membre de la société civile dénoncer publiquement ces propos, sauf pour certains à m’appeler directement pour s’offusquer, ce que je trouve lâche. Pour ce qui concerne l’ex-Secrétaire général du ministère de la microfinance et de l’économie sociale et solidaire, c’est un magistrat qui était en détachement au niveau de mon département suite à sa nomination le 22 octobre 2022. Ex-Secrétaire général, car il m’avait fait connaître depuis le 24 mars 2022 qu’il souhaitait être déchargé de ses fonctions au niveau du département de la microfinance et de l’économie sociale et solidaire et une telle volonté manifestée est soumise à une période de transition qui permet de gérer les affaires courantes au niveau du ministère. C’est pour cela que le Secrétaire général est resté en poste jusqu’à la notification de sa nomination ou promotion comme président de chambre à la Cour d’appel de Dakar le 24 avril 2023. D’ailleurs vous me donnez l’occasion de profiter de cette tribune offerte pour témoigner du professionnalisme de Monsieur Ousmane Gueye, de son intégrité et de son sens élevé des responsabilités. Monsieur Gueye a été mon collaborateur pour qui j’ai un profond respect, car c’est un homme qui a fait le choix de se mettre au service de République en tant que Magistrat, et comme lui les milliers de sénégalais qui ont fait le choix de servir la justice hier, aujourd’hui comme demain.
On cite aussi votre frère…
Je voudrais terminer sur ce point, en précisant que je suis fière d’avoir eu un magistrat comme collaborateur, d’être sœur de magistrat, comme j’ai la fierté d’avoir une sœur médecin de son État et d’être fille de fonctionnaires qui ont servi ce pays. Le ministère de la microfinance et de l’économie sociale et solidaire a eu comme Secrétaire général Monsieur Ousmane Gueye qui a quitté pour rejoindre sa famille, la magistrature, rien, absolument rien d’extraordinaire. Et dans quelques jours un autre sénégalais de la Hiérarchie A ou assimilée avec plus de 10 ans d’expérience occupera la position de Secrétaire général du ministère de la Microfinance et de l’Economie sociale et solidaire et c’est cela la marche normale de notre administration. Vous croyez que je peux influer, proposer, recommander un magistrat pour siéger dans une affaire en justice. Il faut apprendre à dire la vérité aux sénégalais, car tout ce qui a été dit dans cette affaire de secrétaire général est faux.
Vous êtes Maire de la commune de Niaguis, la région a été confrontée à des séries de violences, quel message souhaitez-vous lancer à l’endroit des populations de la Casamance.
Encore une fois, il faut faire la part des choses. Il y a la région de Ziguinchor, les départements de Bignona et Oussouye, et les 6 communes du département de Ziguinchor. Sur les 6 communes du département, la coalition Yewwi Askan wi en contrôle deux, Benno Bokk Yakaar trois et celle de Enampor a un maire indépendant. Je fais cette précision pour démontrer qu’il n’y a pas de territoire conquis dans le sud. Pour revenir aux événements malheureux, il s’agit de la commune de Ziguinchor qui a fait l’objet de manifestations avec son lot de morts que nous regrettons, car ce sont nos enfants que nous avons perdu et cela est triste. La commune de Niaguis comme d’autres communes du département a payé un lourd tribut dans la crise casamançaise. Nous avons assez payé le prix de la non paix et c’est pour cela que les populations, jeunes, femmes et notables se sont mobilisées pour inviter les uns et les autres à la sérénité et la préservation du vivre ensemble. Depuis 10 ans, grâce au Président, Son Excellence Macky Sall, la région s’inscrit dans une perspective de développement pour ancrer définitivement la paix. Ce n’est pas le moment de remettre cela en cause et nous devons nous dresser face à cette volonté de nous replonger dans la crise. Alors le message à lancer, c’est à l’endroit de tous les Sénégalais d’ici et de la diaspora animés du sentiment patriotique, cultivons la fraternité et dressons-nous contre ceux qui ont pour dessein de semer le chaos dans notre pays.
Entretien réalisé par Direct News – 1001 du 14 juin 2023