La Banque des règlements internationaux estime que l’effondrement du marché des cryptomonnaies aurait pu avoir des répercussions très négatives sur la stabilité financière internationale, si cette classe d’actifs avait été davantage liée à l’économie réelle et au système financier traditionnel.
La majorité des investisseurs de détail dans le Bitcoin ont perdu près de 50% des sommes investies entre août 2015 et décembre 2022, selon un rapport publié le 20 février la Banque des règlements internationaux (BRI).
Intitulé « Crypto shocks and retail losses », le rapport se base sur les données de la société Sensor Towel qui a recueilli des informations sur les téléchargements et la fréquence de l’utilisation de plus de 200 applications d’échange de cryptomonnaies par des particuliers dans 95 pays entre le 1er août 2015 et le 15 décembre 2022.
Selon ces données, les mouvements de hausse du prix du Bitcoin ont tous donné lieu à l’arrivée de nouveaux investisseurs sur le marché. Près de 75% des investisseurs ont téléchargé une application d’échange de cryptomonnaies lorsque le prix du bitcoin était supérieur à 20 000 dollars, un seuil atteint en décembre 2020.
Lorsqu’une application comme Binance, Paxful ou Coinbase est téléchargée par un particulier, les analystes de la BRI supposent que le nouvel utilisateur a immédiatement investi 100 dollars, puis réinvesti la même somme tous les mois.
La moyenne des gains ou des pertes de ces investisseurs de détail est calculée en fonction du prix du Bitcoin à l’instant où l’investisseur place son argent mensuellement sur la plateforme d’échange. Les prix d’achat sont ensuite regroupés entre eux pour former une moyenne représentative. A travers cette modélisation, la BRI démontre que la majorité des investisseurs ont perdu de l’argent sur leur position.
Une perte moyenne de perte moyenne 431 $ par investisseur
Les analystes de cette institution financière internationale considérée comme « la banque centrale des banques centrales » estiment que la perte moyenne de chaque investisseur a atteint 431 dollars au 15 décembre 2022, ce qui correspond à 47,89% du total de la moyenne des 900 dollars de fonds investis depuis le téléchargement de l’application.
Ils notent que cette perte est très probablement encore plus élevée dans plusieurs pays émergents comme le Brésil, l’Inde, le Pakistan, la Thaïlande et la Turquie.
Le rapport souligne d’autre part que le nombre mensuel moyen des utilisateurs actifs des applications d’échange de cryptomonnaies à l’échelle mondiale est passé d’environ 100 000 en août 2015 à plus de 30 millions en novembre 2021, quand le prix de la reine des cryptomonnaies avait atteint 69 000 dollars.
Les données de la BRI, qui distinguent les petits et moyens détenteurs de Bitcoin (ceux qui possèdent moins d’un Bitcoin et entre un et 1000 bitcoins respectivement) des grands détenteurs qui possèdent des portefeuilles de plus de 1000 bitcoins, montrent par ailleurs que les performances des investissements varient en fonction des portefeuilles détenus. La BRI a établi que les plus gros investisseurs, appelés les « baleines », ont réduit leurs portefeuilles, juste avant les fortes baisses des cours consécutives aux chocs liés à l’effondrement brutal du stablecoin Terra (Luna) en mai 2022 et à la faillite de la plateforme d’échange de cryptomonnaies FTX en novembre de la même année.
Faire face aux risques avant qu’ils ne deviennent systémiques
Les détenteurs de portefeuilles allant de 1 à 1000 bitcoins avaient, quant à eux, tendance à augmenter leurs avoirs en Bitcoin durant ces périodes. Conséquence : les investisseurs les plus fortunés ont réalisé des bénéfices au détriment des plus petits.
Au regard du caractère très spéculatif des investissements dans le Bitcoin et de l’inégalité des gains enregistrés, la BRI souligne la nécessité d’une meilleure protection des investisseurs dans l’espace cryptographique.
Estimant que l’effondrement de la capitalisation du marché des cryptomonnaies, qui est passée de 3000 milliards de dollars en novembre 2021 à 1200 milliards de dollars en février 2023, aurait pu avoir des répercussions très négatives sur la stabilité financière internationale si cette classe d’actifs était davantage liée à l’économie réelle et au système financier traditionnel, l’institution basée à Bâle (Suisse) appelle à une réponse coordonnée à l’échelle internationale pour faire face aux risques liés aux crypto-actifs avant qu’ils ne deviennent systémiques. Elle propose dans ce cadre plusieurs stratégies comme l’interdiction des cryptomonnaies, leur endiguement, leur régulation ou une combinaison d’options.