Des centaines de Guinéens attendent depuis 13 ans que soit jugé l’ancien chef de la junte Moussa Dadis Camara, mais aussi, les autres responsables présumés de l’effroyable massacre commis le 28 septembre 2009. Ce moment est enfin arrivé.
En effet ce mercredi 28 septembre 2022, jour marquant l’anniversaire de ce drame, est aussi le jour retenu pour ouvrir ce dossier dit du massacre du 28 septembre. Le procès aura lieu dans un tribunal flambant neuf à peine achevé dans le centre de Conakry. Ce nouveau tribunal est situé seulement à quelques kilomètres des lieux où des soldats, des policiers et des miliciens se sont livrés à deux heures d’abomination contre des sympathisantes et des sympathisants de l’opposition à l’intérieur et aux abords du stade du 28 septembre. Sauf changement de dernière minute c’est là que se déroulera le procès dont Dadis Camara, chef de la junte au moment des faits, sera entendu.
Le procès aura pour tâche d’établir les responsabilités du capitaine Camara et de ses co-accusés, dont plusieurs personnalités militaires et gouvernementales de l’époque. Certaines sont détenues depuis des années. « Dadis Camara a joué un rôle central dans le massacre du 28 septembre », soit en en donnant l’ordre, soit en y accordant son consentement, écrit l’organisation Human Rights Watch en 2009 après avoir mené son enquête. La commission internationale lui impute une « responsabilité criminelle personnelle et une responsabilité de commandement ».
Camara, en exil au Burkina Faso depuis sa chute du pouvoir est rentré en Guinée dans la nuit de samedi à dimanche. « Il sera là pour livrer sa part de vérité » au tribunal, assure un des avocats, Me Almamy Somory Traoré. « Il a clamé son innocence et nous allons le prouver », renchérit-il.
Cependant, les associations des victimes s’inquiètent de la présence de tous les mis en cause. Elles redoutent que l’ouverture du procès ne se résume à un effet d’image, avant un renvoi à une date ultérieure. « Nous espérons avoir une justice claire, transparente, pas (une) parodie de justice, et en présence de tous les inculpés », lance Asmaou Diallo, présidente de l’Association des victimes, parents et amis du 28 Septembre.
C’est sous un nouveau chef de junte que doit se tenir le procès, érigé en marqueur de la lutte contre l’impunité. Les défenseurs des droits font cependant observer que les derniers mois ont vu les nouvelles autorités donner un sévère tour de vis aux libertés.
Mais pour certains survivants, ce procès est une lueur d’espoir dans la manifestation de la vérité sur ce qui s’est passé ce jour fatidique du 28 septembre.
En rappel, des dizaines de milliers de personnes s’étaient rassemblées au stade pour démontrer la force de l’opposition et dissuader le chef de la junte d’alors de se présenter à l’élection présidentielle qui était prévu en janvier 2010. 156 personnes seront tuées et des milliers blessées avec une cruauté effrénée seront enregistrées, au moins 109 femmes ont été violées, affirme le rapport d’une commission d’enquête internationale mandatée par l’ONU, document qui a été publié trois mois après les faits.