Les frankistes ou fébistes, comme ils se font appeler, existent pour certains depuis plusieurs années et défendent l’idée d’une « transition générationnelle » au sommet de l’État, « le moment venu ».
Il ne s’est jamais exprimé publiquement sur un éventuel désir d’avenir politique, mais les partisans de Franck Biya font souvent parler d’eux sur les réseaux sociaux ou dans la presse, à coups de réunions et d’actions publiques. Le président Paul Biya a 89 ans. Après bientôt quarante ans au pouvoir, les frankistes et les fébistes soutiennent l’idée d’une candidature de son fils aîné Franck Emmanuel Biya, 51 ans. Amélie Tulet du service Afrique de RFI a pu s’entretenir avec deux membres de ces groupes qui appellent régulièrement les internautes à s’abonner à leurs pages Facebook.
Le premier, Moubarak Foundikou est enseignant-doctorant à Yaoundé. Il a 30 ans et se présente comme secrétaire général du « Mouvement citoyen franckiste pour la paix et l’unité », créé en 2013. Le deuxième, Arsène Nathan Abomo, 27 ans, entrepreneur dans la communication digitale, a participé à la création il y a environ six mois du MCE-FEB, mouvement fébiste pour « Frank Emmanuel Biya ». Deux groupes présentés comme distincts, mais dans la bouche des deux hommes, des éléments de langage communs.
C’est spontanément, disent-ils, qu’ils défendent « une offre politique » issue d’un constat : leur génération assistera très probablement à une transition. Pour eux, Frank Emmanuel Biya, de par sa « discrétion », sa « maîtrise de lui-même » et sa connaissance des arcanes du pouvoir, réunit « les qualités d’un leader » pour « être le futur candidat » de la jeunesse à « une future élection ». Il pourrait, toujours selon les deux hommes, ainsi dépasser tous les clivages et assurer la stabilité du Cameroun.
Moubarak Foundikou comme Arsène Nathan Abomo assurent n’avoir ni mécène ni parrain politique. Ils disent organiser leurs actions de sensibilisation sur la base du volontariat et des contributions des sympathisants, qui seraient des dizaines de milliers dans les dix régions du Cameroun et dans la diaspora.
« Sonder l’opinion »
Le « frankiste » comme le « fébiste » affirment n’avoir jamais cherché à rencontrer Frank Emmanuel Biya, qu’ils disent ne pas voir comme « le fils de son père ». Le principal intéressé, lui, ne les a officiellement ni mandatés, ni désavoués.
Une façon de sonder l’opinion, selon l’observateur de la vie politique camerounaise, Philippe Nnanga, coordinateur de l’ONG Un Monde Avenir, formateur sur les questions de démocratie au Cameroun. « Personne n’est dupe. Ce sont des ballons d’essai et c’est bien compris comme cela. On est habitués à cela. Ça se fait même dans la vie publique au niveau des quartiers. Quelqu’un qui veut se présenter à une élection dans une association fait crier son nom par d’autres personnes à gauche et à droite » explique-t-il au micro de RFI.
« Ça se fait toujours soit à l’initiative de la personne concernée, soit de proches. La personne concernée ne conteste pas, mais ça a toujours un lien avec elle. Donc, on comprend bien que là on est dans du « testing » pour sonder l’opinion », continue Philippe Nnanga.
« On a observé ce qu’il s’est passé au Gabon, au Togo, en Guinée-Équatoriale, Maintenant on aime à dire « Le Cameroun, c’est le Cameroun ». Mais quand je participe à des débats, quand j’écoute les gens, tout le monde est préparé à cette éventualité. »