Se rendre au cinéma revient dans les habitudes des Dakarois. Les habitants de la capitale sénégalaise associent les salles de cinéma dans leur programme de fin d’année. Les gens fréquentent ces lieux de projections de film pour vivre leur passion pour le 7ème art. Le complexe cinématographique Ousmane Sembène (Ccos) est un des endroits où ce loisir est possible.
Par Onass MENDY (Stagiaire)
Trouvés au guichet en train d’acheter des tickets, trois jeunes, proches de la trentaine (Amadou Diagne, Bakary Diop et Joseph Sané), viennent regarder le film Spiderman. De forte corpulence, Amadou est un habitué des lieux. Il a convié ses amis passionnés de l’univers Marvel (bandes dessinés réadaptés en film) à assister à la diffusion du film précité. Bakary n’a pas hésité, vu que son « emploi du temps est moins chargé » en cette période de l’année. Baky, comme on le surnomme, a grandi en adoubant le héros du film, Spiderman. Visage enthousiaste, il s’impatiente de découvrir la nouvelle version tant les internautes ont fait l’éloge du film sur les réseaux sociaux. Baky veut étancher sa soif suite à ces incessantes publications ayant pour but de « spoiler » (action de partager des séquences d’un film qu’on a regardé pour susciter la curiosité des personnes qui ne l’ont pas encore suivi).
De son côté, Joseph vient dans ce complexe pour la première fois. Il juge les salles de cinéma comme le « meilleur endroit pour regarder un film ». Joseph conseille l’expérience à toute personne malgré que chacun dispose d’un écran chez lui (téléphone, télévisions, etc.). D’un ton convaincant, il assure que les plateformes de streaming ne confèrent pas les mêmes sensations comparé au fait de regarder un film sur grand écran et dans l’obscurité d’un lieu fermé.
Les trois amis venant respectivement de Dieuppeul, Keur Massar et Patte d’Oie s’installent dans le hall sur des fauteuils rouges confortables. Ils patientent quelques minutes avant de regagner la salle 1 dénommée Djibril Diop Mambéty. Comme eux, des centaines de spectateurs arpentent le couloir menant à la salle de projection. Certains sont munis de cornets de pop-corn achetés à la buvette du complexe. D’autres tiennent à la main de petites bouteilles d’eau ou d’autres types de rafraîchissements.
Un public mixte
Trouvé dans la cabine technique, Souleymane Anne, teint noir, mesurant presque 2 m, est le projectionniste du complexe. En tenue décontractée, il s’active autour d’un dispositif impressionnant dont le barco, appareil pour lancer la projection. Après quelques clics, il donne le coup d’envoi de la séance de visionnage. M. Anne confie : « Le complexe est en partenariat avec deux maisons de distribution de films : Pathé BC et Film 26. Ces deux géants de la distribution mettent à la disposition du Ccos un lien pour télécharger le film et une clé d’activation. Cette dernière permet d’accéder au film une fois le téléchargement terminé ». Il notifie que les clés d’activation ont une durée limitée. Pour ce soir du 30 décembre, à l’affiche il y a deux films pour la séance de 21h.
Avec une capacité d’accueil de 396 places, la salle 1 propose Spiderman. Lumières éteintes, une projection en version anglaise avec sous titrage se fait sur un fond blanc en hauteur. Les sièges rouges sont disposés de manière descendante par rapport à l’entrée. Au fur et à mesure que la projection se poursuit, les amateurs de cinéma réagissent au rythme des actions. Les gestes du public sont dictés par le rythme des acteurs amplifié par la forte sonorisation. Des couples s’assoient au fond de la pièce. Une fille pose sa tête sur l’épaule de son copain et fait des va et vient de la main du cornet de pop-corn vers la bouche tout en gardant les yeux rivés sur l’écran. Le milieu de la pièce et l’avant sont l’emplacement des personnes venues en groupe d’amis.
Dans la salle 2, baptisée Safi Faye, d’une capacité de 96 places, Les Tuche, une comédie en version française, est proposée. Ici, une vingtaine de personnes suit avec attention. Les éclats de rires peinent à être refoulés. Les séquences comiques provoquent les rires du public composé totalement de jeunes et d’adolescents.
Le responsable du Ccos, Tafsir Amadou Fall, atteste que l’engouement est au rendez-vous. Pour lui, la fin d’année est un temps fort pour le cinéma. Le complexe propose des tarifs selon le type de projection. Pour la première d’un film, l’entrée est à 5.000 FCfa. Pour une projection ordinaire en 3D (nécessitant le port de lunettes adaptées mis à la disposition du spectateur), le ticket est à 2.500 FCfa pour les adultes et 2.000 FCfa pour les enfants. Concernant les séances de diffusion en 2D, l’accès aux salles est à 2.000 FCfa pour les adultes et 1.500F pour les enfants.
Une diversité dans les choix
Assise sur une chaise à l’entrée du bâtiment, Gnagna Guiro récupère les tickets auprès des clients pour que ces derniers puissent accéder aux salles. La jeune fille, âgée de 24 ans, confie être débordée en cette période. Elle note une différence du profil des clients en fonction des films diffusés. À l’en croire, les jeunes sont plus attirés par les films d’actions, les films Marvel. Les enfants s’intéressent aux productions Disney et aux films dont ils sont les principales cibles. Ils viennent souvent en compagnie de leurs parents, explique Gnagna. Habillée d’un polo rouge avec le nom du complexe floqué derrière, la jeune dame atteste que les personnes âgées sont attirées par les films romantiques et la comédie. Gnagna révèle aussi « une fréquentation accrue des personnes d’autres nationalités ». C’est le cas du jeune libanais, Kamel Baduddino. De petite taille, il accélère la cadence pour ne pas rater plus de minutes du spectacle diffusé dans la salle 1. Quelques minutes plus tard, vêtue d’une robe rouge, Khadija, teint clair, avec de longues tresses blondes, revient de la buvette. Pop-corn et bouteille d’eau à la main, la fille de 18 ans, taille fine, accélère ses pas car ayant déjà manqué 1h de la projection de Spiderman.
Une heure et quinze minutes plus tard, la porte de sortie s’ouvre. Les spectateurs traversent le hall, passent devant la buvette et se dirigent vers la porte de l’édifice. Les commentaires fusent dans une ambiance bon enfant. Un groupe d’ados venant de Mermoz partagent les moments marquants du film de 2h15mn. Tous âgés de 15 ans, Marième Soda, Élisabeth, Mamadou et Ousmane jugent le spectacle à la hauteur de leurs attentes. Ces néo-lycéens avaient promis de revenir dans cet endroit avant la fin des vacances scolaires (ndlr : fin décembre 2021).
Croisés à la porte du Ccos, le Camerounais trentenaire, Aristide Mendo, se réjouit de l’engouement dans la salle. Venu pour la 3ème fois avec sa copine, Aristide a un rapport privilégié avec les film Marvel.
À côté, Henriette Diouf, teint clair, taille moyenne, vient du Point E accompagné de son cousin Léon Emmanuel. Henriette attend déjà le prochain numéro de la saga Spiderman. Vêtue d’un body noir à hauteur du nombril et d’un jacket déboutonné, cette étudiante en 3ème année de médecine confie avoir essuyé ses larmes à quatre reprises durant le visionnage. De teint clair, Henriette se dit plus captivée par les films d’actions et les films romantiques.