Alors que beaucoup de populations étaient déjà réticentes à cause des cas de thromboses détectés chez des personnes vaccinées avec l’AstraZeneca, le Ramadan qui a démarré au Sénégal depuis quelques jours vient de donner un coup de massue à cette campagne. En effet, dans les centres de vaccination, les candidats viennent de moins en moins.
Hôpital Pr Idrissa Pouye de Grand-Yoff, ex-Cto. De l’extérieur, à travers les grilles qui clôturent l’établissement sanitaire, on aperçoit les médecins, infirmiers et autres personnels sanitaires faire des va-et-vient entre les différents services. Devant la porte d’entrée, des vigiles en tenue filtrent les entrées. Munis de thermo flash, ils prennent la température des visiteurs. A l’intérieur, des patients et leurs accompagnons font la queue devant les services. Le bruit des chariots et le gémissement de certains malades se font entendre dans les couloirs. L’air frais de la matinée qui s’échappe du canal de la Zone de captage balaie l’hôpital. Devant le service dédié à la vaccination, quelques candidats sont déjà présents. Ils attendent le personnel sanitaire qui s’installe à son tour. Teint clair, élancé, la barbe bien taillée, habillé d’un boubou «demi-saison», babouches aux pieds, le masque bien ajusté, Bassirou Seck fait partie des personnes qui ont fait le déplacement pour prendre leur dose. Assis, il navigue sur les réseaux sociaux avec son smartphone en attendant le démarrage des opérations. «Je suis venu prendre ma dose. Car, c’est le seul moyen pour se protéger contre la Covid-19. Mais j’avoue que je suis très surpris, parce que je m’attendais à trouver beaucoup de monde. Heureusement, nous ne sommes pas nombreux. Dans les normes d’ici, 9h 30mn, je vais pouvoir prendre ma dose et rentrer», confie Bassirou Seck. Ce dernier de préciser que s’il a osé prendre un vaccin en plein mois de Ramadan, c’est parce qu’il n’est pas apte à jeûner. Ce, à cause d’un traitement qu’il suit depuis quelques semaines. Selon lui, sur recommandation de son médecin traitant, il lui a été interdit d’observer le jeûne pendant cette période pour ne pas compromettre son traitement. Donc pour lui, c’est une occasion de venir se faire piquer avant de commencer le jeûne.
A côté de lui, une candidate est assise. Adja Mbaye, la trentaine, habillée d’une taille basse Wax, les écouteurs cachés sous le voile qui lui retombe derrière ses épaules. Elle échange avec une connaissance au bout du fil. Aussitôt c’est un médecin en blouse blanche qui se présente devant eux. «Patientez un peu, on va bientôt commencer», lance-t-il à l’assistance après des salamalecs. Interpellé sur la faible affluence des candidats au vaccin, la blouse blanche s’appuie sur deux thèses pour donner son avis. Il déclare qu’au début surtout avec la première cible, il avait noté un rush remarquable. Mais il y a une tendance baissière au fur à mesure qu’on avance. Et cela est dû, dit-il, d’abord à la polémique sur les vaccins qui a apeuré plusieurs personnes qui étaient prêtes à se faire vacciner. Mais qui, finalement, se sont rétractées. La deuxième cause a trait au Ramadan, informe-t-il. De son avis, il y a des religieux qui avancent l’idée selon laquelle, la vaccination n’est pas compatible avec le Ramadan. Et pour lui, cela aussi a découragé les populations qui observent en ce moment le jeûne. Toutefois, il estime que rien n’est perdu parce qu’après le Ramadan, il espère un retour au normal. «Nous faisons face à deux obstacles : tout ce qui se dit sur les vaccins. Mais également le discours sur l’incompatibilité entre Ramadan et vaccination. Pour la polémique sur les vaccins, il y a un message d’assurance que nous livrons à l’endroit des candidats qui nous servent de relais avec leurs parents et proches qui n’ont pas pris le vaccin. Pour la compatibilité Ramadan et vaccination, c’est le domaine religieux et c’est très difficile de faire changer d’avis les gens», explique la blouse blanche.
Au poste de santé des Hlm Grand-Yoff, l’heure n’est pas aux bousculades pour se faire piquer. L’Infirmier chef de poste (Icp) trouvé sur place soutient que les vaccins sont disponibles mais cherchent toujours preneurs qui se signalent au compte-gouttes. Il affirme que le Ramadan a chamboulé presque tout le calendrier vaccinal au niveau du poste de santé.