Le Président de ‘’Horizon Sans Frontière’’, Boubacar Sèye a été inculpé et placé sous mandat de dépôt pour diffusion de fausses nouvelles. Le doyen des juges a suivi le réquisitoire du Parquet.
L’immigré membre de la société civile, va ainsi subir une longue procédure judiciaire. Et le plus dur, c’est qu’il risque d’être maintenu en détention durant toute la durée de l’action judiciaire jusqu’à son procès.
Malgré la présomption d’innocence et le fait qu’il présente toutes les garanties de représentativité, il va devoir rester en détention à moins qu’une liberté provisoire hypothétique ne lui soit accordée, entre temps.
C’est le paradoxe de notre système judiciaire qui proclame la présomption d’innocence et applique la présomption de culpabilité.
L’homme sera ainsi ‘’puni’’ avant qu’un tribunal ne se prononce sur sa culpabilité ou son innocence.
En clair, il a été considéré comme un opposant au régime de Macky Sall. C’est-à-dire comme un homme politique encagoulé. Pour qu’on en arrive là avec lui, il a dû déranger en haut lieu, indisposé le Chef, bousculé de gros intérêts, etc.
Or, dans ce cas, l’Etat qui a tous les dossiers en main, devrait pouvoir, porter à l’attention de l’opinion, toutes les informations liées à ces fonds dont Boubacar dit qu’ils ont été détournés.
Il était facile, par des canaux classiques de communication, de lui apporter la réplique.
Au pire des cas, une procédure aurait pu être enclenchée contre lui sans pour autant le placer sous mandat de dépôt. Les détentions préventives systématiques n’honorent pas notre démocratie parce qu’étant contraires à l’esprit d’une justice bien rendue.
Qui plus est, la procédure de flagrance était aussi parfaitement adaptable à son cas. Ainsi, son jugement aurait été rapide.
Mais, si l’on a opté pour la procédure la plus longue, c’est qu’elle offre au Parquet une capacité de ‘’tenir la personne en respect’’ afin de l’empêcher de mener ses activités en attendant son procès qui pourrait tarder à être programmé.
Or, Sèye n’est manifestement pas un danger public. Son combat en faveur des immigrés lui a conféré une expertise réelle en la matière.
Qu’il puisse commettre des erreurs, c’est sans doute humain. Qu’il ne puisse pas donner toutes ses preuves, on peut le comprendre.
Manifestement, du fait de ses agissements, le Président de la République s’est senti offensé même si nous ne sommes pas, ici, dans l’application de l’article 80.
Mais, dans tous les cas, il est important pour le Chef de l’Etat, de changer sa propre perception de son opposition et de sa société civile. Il assimile souvent les uns aux autres et les met dans le même sac : celui de gens qui l’apprécient pas et qui ne l’aiment pas.
En conséquence, l’adversité devient une forme d’animosité. Tout devient personnel.
Aussi bien pour le financement de Pastef que pour Boubacar Sèye, l’Etat ne dit pas tout ce qu’il sait. Car, sa rage est disproportionnée aux faits.
Or, si Macky faisait l’effort d’être le Président de tous les sénégalais, il se rendrait compte qu’aussi bien l’opposition que la société civile jouent des rôles importants de régulation sociale et politique et contribuent au rayonnement de la démocratie.
L’Etat a d’ailleurs l’obligation d’appuyer ses opposants et ses activistes organisés en mouvements reconnus. Car, ces derniers, exercent, des missions de service public et donc d’intérêt général.
Pis, l’affaire Sèye est un dossier dans lequel l’Union européenne est forcément partie. Qu’elle ne soit pas dans la procédure n’y change rien. Invisible, elle suivra, à la lettre, son évolution et son épilogue.
Malheureusement, tout cela pourrait avoir des répercussions sur nos rapports de coopérations bilatérales ou multilatérales avec nos partenaires.