Le Comité exécutif de la Confédération africaine de football (Caf) renouvelle, ce mercredi 12 mars, ses membres au Conseil de la Fifa. Me Augustin Senghor, président de la Fédération sénégalaise de football (Fsf), aspire à siéger au sein de cet organe de décision du football mondial. Dans cet entretien exclusif accordé au « Soleil », le patron du football sénégalais et premier vice-président de la Caf décline ses ambitions. Il revient sur ses chances, les défis des sélections nationales engagées cette année dans les différentes compétitions africaines, mais aussi son avenir à la tête de la fédération.
Vous êtes le premier vice-président de la Caf et vous briguez un poste au Conseil de la Fifa. Qu’est-ce qui motive votre candidature ?
Tout d’abord, il faut savoir qu’en cette année 2025, mon mandat de membre du Comité exécutif de la Caf n’est pas en jeu. J’ai été réélu en 2023 pour 4 ans ; mon mandat court jusqu’en 2027. J’ai donc estimé devoir faire acte de candidature pour intégrer le Conseil de la Fifa en tant que représentant de la Caf, au vu de mon cursus d’abord personnel où j’ai eu à occuper pratiquement, mis à part le poste de président de la Caf, toutes les fonctions au sein de l’instance dirigeante ; que ce soit les présidences de commissions, d’abord au niveau disciplinaire où j’étais vice-président pendant des années, ensuite dans beaucoup de commissions, notamment celle juridique, celle des affaires des équipes nationales, celle d’organisation de la Can jusqu’à arriver au poste de premier vice-président de la Caf sur la base d’un consensus dont tout le monde connaît l’histoire.
J’ai décidé de briguer ce poste de membre africain du Conseil de la Fifa pour apporter mon expérience, mes compétences et mon vécu à l’œuvre de consolidation du football africain, aux côtés de mes pairs, mais aussi aux côtés du président Patrice Motsepe, afin de contribuer au renforcement de l’essor du football mondial, aux côtés du président Gianni Infantino. Ce qu’on peut dire de ma candidature, c’est qu’elle est légitime. Elle est aussi, à mon sens, quelque chose qui paraît logique, au regard de ce que représente le Sénégal dans le giron du football continental.
C’est même étonnant que, dans l’histoire du football, que notre pays n’ait jamais eu à siéger au sein de cette instance de la Fifa, avec tout son apport pour le football africain et mondial. Nous ne sommes certes pas le pays le plus riche d’Afrique, mais quand on parle de football depuis des années, même avant que nous ne gagnions ces nombreux trophées il y a deux ans, le Sénégal était cité comme une référence. Il manquait juste ce palmarès que nous avons fini de constituer.
Et je pense que le Sénégal, en tant que pays de football, mérite aujourd’hui de siéger à la Fifa, dans cette instance de décision pour apporter sa touche, sa contribution.
Vous avez une grande expérience et un bon vécu à faire valoir. Est-ce suffisant pour intégrer le Conseil de la Fifa ?
Oui, forcément. Je pense que notre Confédération gagnerait à ce que, au niveau de la représentation, au sein de l’instance faîtière que constitue la Fifa, qu’on ait des personnes qui ont un certain vécu, une expérience, une compétence avérée, mais aussi des gens qui pourront débattre et contribuer à la consolidation du rayonnement du football au niveau mondial, et permettre de faire entendre la voix de l’Afrique. Nous sommes dans un concert de confédérations où les décisions se prennent et il est important que la voix de l’Afrique, aux côtés du président de la Caf, soit portée par des personnes de référence, qui ont un background qui leur permet de discuter et d’échanger au même niveau avec les représentants des autres confédérations du monde entier ; que ce soit l’Uefa, la Conmebol, l’Ofc, l’Afc en Asie et la Concacaf. C’est ça qui fait qu’aujourd’hui, ma candidature revêt cette particularité.
Je pense que, aussi bien au plan personnel qu’au plan de la représentation de mon pays, de mon continent, cette légitimité est avérée pour pouvoir prétendre à briguer un poste à ce niveau-là. Le Conseil de la Fifa attise les convoitises, avec une dizaine de candidats issus des six zones (Ufoa A et B, Unaf, Cosafa, Cecafa, Uniffac) qui composent la Caf.
Avez-vous évalué vos chances face à des candidats qui peuvent se prévaloir de plus de soutiens ?
Je peux dire que je jouis, au sein de la Caf, d’une certaine légitimité, d’un coefficient de considération énorme auprès de mes pairs. Et si c’est cela qui doit faire la différence, je suis persuadé que la majorité des membres de la Caf, donc des présidents de fédérations essentiellement, mais aussi des autres membres des fédérations sœurs, voteront Augustin Senghor. Ils connaissent mon cursus et savent que parmi ceux qui sont candidats, je peux, sans prétention aucune, dire que même s’il y a cinq places à distribuer, ce serait une grande surprise si effectivement mon élection ne se concrétisait pas.
Je pense que mes chances sont intactes. Si donc tout se passe normalement et qu’il y ait des élections démocratiques, je n’ai pas de doute que je devrais pouvoir être élu à l’une des places. Cela ne veut pas dire que je n’ai pas de considération pour les autres candidats qui ont aussi un background, un vécu, un pedigree qui peuvent leur permettre d’aspirer à siéger au Conseil de la Fifa.
La presse a fait écho d’un protocole de Nouakchott. Y a-t-il vraiment eu protocole dans la capitale mauritanienne ?
Moi-même j’étais à Nouakchott sur invitation de mon frère Ahmed Yahya dans le cadre de l’inauguration de l’Académie des Talents de la Fifa. J’y ai passé deux jours, mais je n’ai pas été au courant d’un protocole.
Je n’y ai pas été associé, donc, je ne peux pas commenter. Et comme je le disais, nous sommes une confédération mature. L’un des points nodaux de nos statuts, comme ceux de la Fifa, c’est le caractère démocratique des organisations sportives et je ne suis pas sûr que, quel que soit le rayonnement, l’influence de certaines personnalités ou de certains pays, on puisse parler d’un protocole qui puisse favoriser d’autres quand ils n’ont pas la légitimité et ne remplissent pas les critères pour aller dans une instance aussi importante au nom de l’Afrique. Tout comme ils ne peuvent pas d’emblée écarter d’autres candidats qui ont déposé leur candidature, qui peuvent se prévaloir de pouvoir passer et qui ont passé le contrôle d’éligibilité de la Fifa ou de la Caf pour qu’ils puissent se présenter. Donc je peux dire aujourd’hui que je ne suis pas informé de ce protocole de la Caf dont on parle et je n’en suis pas membre, s’il existe.
Aujourd’hui, est-ce que la candidature d’Augustin Senghor est soutenue par l’État du Sénégal?
Je dis oui dans la mesure où c’est quelque chose qui a été mûri au sein du Comex parce que, sans son aval, on n’aurait pas pu le faire. Et quand ça s’est passé, lors d’une rencontre avec Madame le Ministre des Sports, je lui ai exposé ce projet pour lui dire que j’avais l’intention de briguer un poste au Conseil de la Fifa pour le Sénégal parce que c’est la candidature du Sénégal. Je pense qu’il est important de reposer le rayonnement de notre football sur deux piliers.
Le premier, c’est le rayonnement sportif sur le terrain et nous sommes en train de bien le mener. Après avoir remporté une demi-douzaine de titres il y a deux ans, nous sommes qualifiés pratiquement à toutes les compétitions en 2025. C’est à peu près sept Coupes d’Afrique de football et une Coupe du monde de beach soccer.
C’est énorme et nous sommes le seul pays africain à le faire. L’autre pilier, c’est le rayonnement dans les instances internationales. C’est là où se prennent les décisions que nous devons être. Et notre combat a toujours été d’avoir une bonne représentation ; une représentation de qualité qui incarne le Sénégal. Et fort de tout cela, Madame le Ministre m’avait encouragé à poursuivre dans cette voie-là.
Donc, je peux confirmer effectivement qu’à travers elle, l’État du Sénégal nous accompagne dans ce travail, étant entendu que ce n’est pas une candidature à un poste de président de la Caf ou de la Fifa, mais pour un poste de simple membre dans cette instance. Je considère donc que ce soutien des autorités ne nous fait pas défaut parce qu’au final, en siégeant dans cette instance, où d’ailleurs nous avions eu pendant quelques années notre sœur, Fatma Samoura, qui était Secrétaire générale, ce serait une excellente chose d’avoir un membre élu au sein de l’instance.
Ce serait une première, comme on a pu considérer mon accession comme membre du Comité exécutif de la Caf et ma promotion comme premier vice-président de l’instance comme des étapes importantes dans l’histoire du football du Sénégal. L’autre étape aujourd’hui, c’est d’aller au Conseil de la Fifa, en attendant mieux, soit pour moi-même, soit pour un autre membre de la famille du football sénégalais.