Le Global Risks Perception Survey (GRPS) est une enquête réalisée par le World Economic Forum pour identifier les risques qu’encourt la planète à court, moyen et long terme. Le rapport 2025 montre que les risques environnementaux, auparavant perçus comme des menaces lointaines, sont désormais plus immédiats et affectent d’autres problématiques mondiales, comme les migrations forcées.
Le « Global Risks Perception Survey » (GRPS) 2025 du Forum économique mondial (WEF) classe les phénomènes météorologiques extrêmes comme l’un des principaux risques mondiaux, comme chaque année depuis 2014 où ils figurent dans le Top 6. Ces phénomènes constituent une préoccupation majeure, avec 14% des répondants les ayant identifiés comme prioritaires pour 2025 et les années à venir.
« Le poids du changement climatique devient de plus en plus évident chaque année, car la pollution due à l’utilisation continue de combustibles fossiles tels que le charbon, le pétrole et le gaz entraîne des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents et plus graves » lit-on. Mais le changement climatique est aussi et surtout un facteur sous-jacent de nombreux autres risques majeurs. Les migrations et déplacements forcés notamment, sont classés dans le rapport au 8ᵉ rang des préoccupations mondiales.
Des chiffres préoccupants
En 2024, l’Afrique a été le théâtre d’une série d’événements climatiques (sécheresses prolongées, inondations catastrophiques, vagues de chaleur, etc.) d’une intensité et d’une ampleur rares, impactant des millions de vies. Ces phénomènes ont exacerbé des défis déjà nombreux pour les populations africaines, mettant en lumière l’importante incidence du changement climatique dans les migrations forcées.
Le rapport 2023 de l’Internal Displacement Monitoring Centre (IDMC) révèle que les catastrophes naturelles ont multiplié par 6 le nombre de déplacés internes en Afrique en l’espace de 14 ans, et qu’ils constituent l’une des principales causes de migrations après les conflits. Le nombre de déplacés est passé de 1,1 million en 2009 à 6,3 millions en 2023. Les inondations causent plus de 75% de ces déplacements, tandis que les sécheresses ont été responsables de 11% d’entre eux.
Ces déplacements forcés posent des problèmes complexes. L’afflux de populations déplacées dans les zones urbaines accentue la surpopulation et la compétition pour des ressources déjà limitées, créant un terreau fertile pour des tensions sociales. Le poids est aussi économique : en moyenne, les pays africains investissent 2 à 5% de leur PIB dans la lutte contre les phénomènes climatiques extrêmes, et nombre d’entre eux y consacrent jusqu’à 9% de leur budget.
En Afrique subsaharienne, le coût est estimé à entre 30 et 50 milliards USD par an pour la prochaine décennie, soit 2 à 3% du PIB de la zone, selon le rapport 2023 de l’Organisation météorologique mondiale (OMM) sur l’état du climat en Afrique.
« L’Afrique est confrontée à des charges et risques disproportionnés découlant des phénomènes et des schémas météorologiques liés au changement climatique, qui provoquent des crises humanitaires massives avec des impacts néfastes sur l’agriculture, la sécurité alimentaire, l’éducation, l’énergie, les infrastructures, la paix et la sécurité, la santé publique, les ressources en eau et le développement socio-économique global » a déclaré Josefa Leonel Correia Sacko, Commissaire à l’agriculture à la Commission de l’Union africaine.
L’impact sur un secteur agricole clé
Le changement climatique bouleverse également l’agropastoralisme, activité économique clé dans la plupart des régions du continent. Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires (OCHA), en 2024 les inondations ont affecté la production agricole avec 960 000 hectares de terres cultivées touchées et la perte de 128 000 têtes de bétail en Afrique de l’Ouest et centrale.
Face à ce défi, la FAO souligne la nécessité d’adopter des pratiques agricoles résilientes et durables pour réduire la vulnérabilité des nombreuses communautés dépendantes de l’agriculture. Sa stratégie 2022-2031 met également en avant l’importance de politiques de migration planifiée pour mieux gérer les déplacements massifs.
« La sauvegarde de la biodiversité et des écosystèmes est fondamentale pour un développement résilient au changement climatique, compte tenu des menaces qu’il fait peser sur eux et de leur rôle dans l’adaptation et l’atténuation » souligne l’organisation.
Des initiatives pour atténuer les impacts
Face à cette crise croissante, plusieurs réformes ont déjà vu le jour. Des pays comme la Côte d’Ivoire développent des plans nationaux d’adaptation aux changements climatiques, tandis que des initiatives comme l’« Africa Carbon Markets » initiée lors de la COP27, visent à transformer les systèmes agroalimentaires et renforcer les marchés du carbone.
Des outils technologiques comme les plateformes de collecte de données climatiques en Ouganda, permettent une réponse plus rapide et mieux ciblée aux effets climatiques. La Convention de Kampala adoptée par l’Union africaine en 2009 reste néanmoins le seul instrument juridiquement contraignant pour protéger les déplacés internes sur le continent. Sa mise en œuvre est entravée par des obstacles législatifs et la non-ratification par certains États.
Alors que les impacts des changements climatiques continuent de s’intensifier, quelques pays africains se distinguent par leurs progrès dans la lutte contre le fléau. Le Maroc vient ainsi en tête à l’indice de performance climatique 2025 publié par l’ONG allemande « Germanwatch », avec un score de 68,32 sur 100. L’Égypte et le Nigeria suivent, montrant que des efforts nationaux ciblés peuvent offrir des solutions viables face à l’urgence climatique.
À long terme, le Global Risk Report 2025 prévoit que les événements climatiques extrêmes occuperont viendront en tête des 5 principaux risques en Afrique subsaharienne d’ici 2035. Viendront ensuite le manque d’opportunités économiques, la perte de la biodiversité et l’effondrement des écosystèmes, la criminalité et les activités économiques illicites, ainsi que la pénurie de ressources naturelles.