(Agence Ecofin) – Le prix du cuivre est un enjeu majeur pour l’Afrique et plus particulièrement pour la RDC qui s’est hissée en 2022 au rang de 3e producteur mondial de ce métal stratégique, tant pour l’industrie des véhicules électriques que pour la transition énergétique. Si les perspectives à court terme sont incertaines, à moyen terme la hausse de la demande devrait garantir de solides revenus aux pays producteurs.
Les prix du cuivre devraient progresser « fortement » en 2025, selon une prévision faite par The Economist Intelligence Unit (EIU) dans un rapport publié fin janvier 2024. L’information est donnée dans un contexte où les prix du métal rouge ont passé l’année 2023 et les deux premiers mois de 2024 sous la barre des 9000 dollars la tonne, après un pic à plus de 9400 dollars en janvier 2023.
Pour étayer son analyse, la firme britannique souligne plusieurs facteurs : les investissements destinés à soutenir les plans de décarbonisation qui continueront à soutenir les prix du cuivre et des perturbations dans l’approvisionnement. En tant qu’élément essentiel de la transition énergétique, le cuivre est utilisé dans la production de véhicules électriques et dans les énergies renouvelables. Quant aux perturbations de l’offre, elles pourraient être liées à la fermeture en décembre 2023 de la mine Cobre Panama qui représente 1,5% de la production mondiale.
The Economist Intelligence Unit prévient néanmoins que la politique monétaire stricte dans les pays développés risque d’affecter la demande de logements en 2024 et par ricochet celle de cuivre dans l’immobilier.
Des pressions sur la demande à court terme
Comme l’EIU, d’autres firmes d’analyses soulignent une croissance de la demande de cuivre et des prix à long terme, mais pointent des pressions sur la demande au cours des prochains mois. La Chine, premier producteur mondial de cuivre, devrait être l’un des moteurs de cette baisse de la demande.
Dans un rapport publié en décembre 2023, Bloomberg Intelligence indique notamment que le ralentissement du secteur de l’immobilier dans l’empire du Milieu devrait conduire à une croissance de la demande chinoise de cuivre à 2% ou moins en 2024 et 2025, contre 2,2 à 3,2 % dans les prévisions initiales. La firme a ajouté que cela pourrait entrainer un excédent annuel de 300 à 500 000 tonnes sur la période 2024-2026.
Deux mois plus tôt, l’International Copper Study mettait déjà en lumière le risque d’excédent, prévoyant un surplus de 467 000 sur le marché du cuivre raffiné en 2024, dans un rapport publié le 4 octobre 2023. C’est pourquoi, dans un rapport publié en janvier, des analystes de BMI, une unité de Fitch Solutions, préviennent d’un risque de baisse des prix du métal rouge en 2024.
Des perspectives positives à moyen terme
Toutefois, au-delà des fluctuations à court terme, la tendance qui se dégage pour le marché du cuivre à long terme reste celle d’une hausse de la demande et des prix, avec des risques de pénurie à la clé. Dans un rapport de décembre 2023, Citibank a estimé que des objectifs plus élevés en matière d’énergies renouvelables entraineraient une demande supplémentaire de 4,2 millions de tonnes d’ici 2030.
La banque d’investissement s’est notamment appuyée sur l’engagement pris par plus de 60 pays à la COP28, visant à tripler la capacité mondiale d’énergie renouvelable d’ici 2030. Pour Citibank, cette situation pourrait pousser les prix du métal rouge à 15 000 dollars la tonne d’ici 2025, alors que le métal rouge se négocie depuis novembre 2023 entre 8000 et 8400 dollars, soit une hausse potentielle de plus de 75%.
La Zambie et la RDC concernées en Afrique
Ces dernières années, le Botswana et la Namibie s’efforcent de diversifier leur secteur minier, au-delà des diamants pour l’un et de l’uranium et des diamants pour l’autre. Dans cette optique cuivre fait partie des métaux ciblés et une industrie cuprifère émerge même déjà au Botswana. Le chinois MMG a d’ailleurs conclu un accord en novembre dernier pour acquérir la mine de cuivre botswanaise Khoemacau pour près de 2 milliards de dollars. La hausse de la demande mondiale de cuivre peut inciter les investisseurs à s’intéresser à de nouvelles régions de production et ces deux pays pourraient bénéficier de ces investissements ciblant l’Afrique.
La RDC est le premier producteur africain de cuivre et aspire à détrôner le Pérou comme deuxième producteur mondial. Le pays a produit 2,36 millions de tonnes en 2022, dépassant la Chine pour devenir le troisième producteur mondial.
Cependant, la Zambie et la RDC devraient être les deux grands bénéficiaires des perspectives positives sur le marché du cuivre. La RDC est le premier producteur africain de cuivre et aspire à détrôner le Pérou comme deuxième producteur mondial. Le pays a produit 2,36 millions de tonnes en 2022, dépassant la Chine pour devenir le troisième producteur mondial. D’ici 2026-2027, il pourrait encore gagner une place au classement, selon Wood Mackenzie.
Ces perspectives devraient accroitre le rôle du cuivre dans l’économie congolaise. Selon des estimations préliminaires rapportées en décembre 2023 par le FMI, le déficit des comptes courants du pays s’est aggravé pour atteindre 5,7 % du PIB au cours du premier semestre 2023, principalement en raison d’une baisse des prix internationaux du cuivre et du cobalt. Une hausse des prix, combinée à la progression de la production de cuivre, permettrait de réduire ce déficit.
Selon la Banque centrale du Congo (BCC), le métal rouge a représenté environ 70% des exportations en 2022. L’institution précise que le secteur extractif, qui est dominé par l’exploitation du cuivre, a représenté 23,1% du PIB la même année, contre 19,7% en 2021.
La Zambie, traditionnellement parmi les dix premiers producteurs mondiaux de cuivre ces dernières années, compte également sur son secteur minier. Pour relever une économie qu’il a trouvée en difficulté, le président Hakainde Hichilema, élu en 2021, souhaite plus que tripler la production annuelle de cuivre en une décennie, à 3 millions de tonnes. Rappelons que le secteur minier zambien, lui aussi dominé par le cuivre, représentait en 2022 9% du PIB, 72% des exportations et 44% des revenus de l’État.