« Auteur le Prof Mary Teuw Niane »
Les femmes de ménages constituent le personnel de service le plus présent au cœur des familles particulièrement dans les villes.
Elles viennent pour l’essentiel des campagnes mais, de plus en plus, certaines sont issues des banlieues paupérisées.
Certaines viennent en groupes des villages, louent une chambre à plusieurs en ville, leur pieds à terre, où elles passent le week-end. D’autres vivent avec la famille qui les emploie.
En réalité, la femme de ménage est l’employée de toute la famille qui l’accueille.
Les modalités de travail sont très variées.
Il y a des femmes de ménage qui ne travaillent que le jour, qui arrivent dans la famille le matin et qui retournent dans leur propre famille ou leur pieds à terre le soir.
D’autres passent toute la semaine chez leur employeur et rentrent le week-end se reposer.
Il y a aussi les femmes de ménage qui vivent complètement dans les familles, qui ne les quittent que durant les vacances liées aux fêtes religieuses chrétiennes ou bien musulmanes.
Enfin , il y a les femmes de ménages qui bénéficient de congés annuels, en général d’un mois, pour retourner dans leur famille et se reposer.
Chaque catégorie sociale a la catégorie de femmes de ménages qui lui correspondent et dont le salaire est en adéquation avec ses revenus.
Par exemple, il n’est pas rare de voir une femme marchande avoir une femme de ménage ou une femme de ménage travaillant dans une entreprise, un hôtel, un restaurant ou un café disposer de femme de ménage chez elle.
Les conditions de travail dans les concessions, les maisons ou les appartements sont très inégales.
Entre la femme de ménage, qui est une adolescente ou une femme, traitée comme une membre de la famille et la travailleuse à tout faire, rudoyée et mal traitée, il y a toute sorte de situations de travail, des plus respectueuses aux plus indignes.
Il n’y a pas une charte qui définit le cadre de travail des femmes de ménage.
Tout est essentiellement informel, négocié en tête à tête avec la maîtresse de maison, l’épouse ou l’une des épouses du chef de famille.
Les femmes de ménage font beaucoup de tâches dans les familles.
Certaines cumulent le nettoyage, le lavage du linge, la cuisine et les petites courses, comme aller à la boutique, aller chez les voisins emprunter quelque chose et aller au marché, très fréquentes dans les familles nombreuses.
D’autres sont spécialisées. Elles sont des techniciennes de surface, des lingères, des cuisinières ou bien de baby-sitter.
Le rythme de travail des femmes de ménage est dans beaucoup de familles insupportable, sans répit et sans repos.
Dans les familles, la prise en charge de la restauration des femmes de ménage n’est pas uniforme. Certaines mangent avec la famille, d’autres ont des repas décents servis séparément et enfin certaines femmes de ménage ne bénéficient pas de restauration décente qui rassasie.
Il y a des familles où la femme de ménage vit bien tandis qu’il y en a d’autres où sa vie est insupportable, entre les rodomontades de la maîtresse de maisons, les impolitesses des enfants et l’âpreté du travail dans des maisons démesurées.
Le traitement humain des femmes de ménage se pose avec accuité.
Le montant des salaires est très varié.
Dans notre pays le salaire de la femme de ménage est intimement lié à la condition sociale de son employeur.
En effet plus l’employeur est fortuné, plus le salaire de sa femme de ménage peut être meilleur. Entre les entreprises, les familles étrangères, les familles sénégalaises fortunées et les familles pauvres, l’éventail des salaires est très large.
Le métier de femme de ménage pâtit de l’absence de formation et de certification.
En Inde, il y a des écoles de formation de personnels de maison, de techniciennes et de techniciens de surface.
Dans de rares familles la femme de ménage est soutenue pour se former ou continuer ses études.
Durant les vacances, de plus en plus, les élèves et les étudiantes trouvent dans le travail de femme de ménage le moyen d’avoir un pécule pour soutenir leurs études.
C’est un changement de mentalité très important au niveau de cette frange de la jeunesse qui a compris la nécessité de consacrer les vacances à un travail rémunéré.
Dans les maisons, comme dans les entreprises, malheureusement à côté des tracasseries physiques et morales que peuvent subir les femmes de ménage, il n’est pas rare que s’y ajoutent des agressions sexuelles des employés, du chef de famille ou des garçons de la maison.
Ces délits sont souvent étouffés dans l’entreprise ou la famille.
Rarement ces cas de viols arrivent au tribunal et sont jugés.
Très souvent d’ailleurs, l’auteur présumé s’en sort avec un non lieu ou une condamnation très légère pour ce type de délit.
La profession de femme de ménage a besoin d’une reconnaissance, d’une codification, de formation et de protection pour le respect strict des femmes qui l’ont embrassée.
Les femmes de ménage doivent bénéficier de sécurité sociale, d’assurance maladie et de retraite.
La mise en œuvre de ces avancées sociales passe par une volonté politique des pouvoirs publics, une sensibilisation des employeurs, des familles et des femmes de ménage elles-mêmes.
Le métier de femme de ménage est sans aucun doute le métier le plus immergé dans nos familles.
La femme de ménage est sœur, fille, nièce et petite fille avant d’être travailleuse.
La présence fréquente des femmes de ménage dans les maisons fait de beaucoup de familles sénégalaises des toutes petites entreprises (TPE) avec une, deux ou trois employées.
Comme monsieur Jourdain fait de la prose sans le savoir, les familles sénégalaises sont des entrepreneurs sociaux sans le savoir.
L’État du Sénégal, lui-même, ne semble pas l’avoir compris.
Vivement que l’État et la société sénégalaise reconnaissent aux femmes de ménage leurs droits et leurs assurent des conditions dignes et valorisantes de travail.
Dakar, mardi 5 décembre 2023
Prof Mary Teuw Niane