Le rapport souligne que le développement de la chaîne du froid sur le continent peut limiter les pertes post-récolte qui minent l’agriculture africaine, répondre aux nouvelles exigences des consommateurs urbains et stimuler les échanges commerciaux avec les autres régions du monde.
Les initiatives se multiplient sur le marché africain de l’application de la chaîne de froid dans l’agroalimentaire pour réduire les énormes pertes post-récolte, mais plusieurs défis liés à la fiabilité de l’approvisionnement énergétique, au manque d’une main d’œuvre qualifiée et au déploiement des frigorigènes à faible empreinte carbone freinent le développement de l’industrie, souligne un rapport publié le 25 octobre par Ecofin Pro, la plateforme de l’agence Ecofin dédiée aux professionnels.
Intitulé « L’émergence d’une industrie africaine du froid », le rapport précise que la taille de l’industrie du froid en Afrique reste modeste. Si les données spécifiques sur le continent ne sont pas disponibles, la FAO souligne que la capacité moyenne de stockage frigorifique dans les pays en développement est de 20 m³ pour 1000 habitants contre, par exemple, 200 m³ en Amérique du Nord, en Europe occidentale et en Océanie.
Le continent est globalement resté en marge du développement du volume global des entrepôts frigorifiques entre 2018 et 2020, selon l’Alliance mondiale pour la chaîne du froid (AMCC), même si de fortes disparités existent entre les pays.
Selon la Banque mondiale, le Nigeria, le Kenya et la Côte d’Ivoire comptent parmi les principaux marchés de niche pour le développement de la logistique à température contrôlée (TCL) en dehors des marchés comme l’Afrique du Sud et les pays d’Afrique du Nord, où la chaîne de froid est déjà bien implantée dans l’industrie agroalimentaire.
D’après une étude de l’institution, le potentiel de ce marché était estimé à plus de 20 milliards de dollars en 2017.
Le rapport indique également que plusieurs initiatives ont déjà vu le jour sous l’impulsion des secteurs privé, public et institutionnel.
Des pertes post-récolte allant jusqu’à 40%
En octobre 2022, le gestionnaire de fonds African Infrastructure Investment Managers (AIIM) a annoncé le lancement de la Commercial Cold Holdings (CCH), en association avec Bauta Logistics et Mokobela Shakati. Cette plateforme dotée de 150 millions de dollars s’appuiera dans un premier temps sur CCS Logistics, une entreprise nouvellement acquise par le consortium d’investisseurs. L’initiative sera dédiée à la logistique à température contrôlée via l’acquisition d’actifs dans la conservation et le développement d’infrastructures.
Au Nigeria, la start-up ColdHubs fabrique et installe des modules frigorifiques d’une capacité de 2 tonnes fonctionnant à l’énergie solaire dans les fermes et les marchés publics. Les agriculteurs peuvent y stocker leurs produits périssables pour un montant forfaitaire de 100 nairas (0,2 $) par jour pour chaque caisse contre un prix moyen de 6000 nairas (13,5 $) dans le système de réfrigération classique fonctionnant à l’aide d’un générateur diesel.
Au Rwanda, un Centre d’excellence africain pour le refroidissement durable et la chaîne du froid (ACES) a ouvert ses portes en décembre 2020.
Les principaux objectifs de ces diverses initiatives sont de réduire les pertes post-récolte qui s’élèvent à 30 à 40% en Afrique contre une moyenne mondiale estimée à 14%, d’améliorer la sécurité alimentaire et de répondre aux attentes des consommateurs africains urbains en matière de sécurité sanitaire et de fraîcheur des produits. D’autre part, un traitement par le froid de certains produits est une condition nécessaire à leurs accès aux marchés asiatiques et européens.
Le rapport élaboré par notre confrère Espoir Olodo note cependant que trois défis restent à relever pour accélérer le développement de l’industrie du froid sur le continent. Il s’agit en premier lieu d’assurer la fiabilité de l’approvisionnement en électricité alors que plusieurs pays africains font déjà face à un déficit énergétique. Dans un tel contexte, l’industrie du froid pourrait explorer la piste des énergies renouvelables afin de disposer d’une source d’approvisionnement indépendante et de réduire ses coûts.
Le deuxième défi concerne le manque d’une main d’œuvre qualifiée spécialisée dans le développement et du matériel de la chaîne de froid, qui peut être relevé grâce au renforcement des programmes de formation dans ce domaine.
Et last but not least, les pays africains devraient œuvrer dès à présent à réduire l’impact environnemental de l’industrie du froid, en encourageant l’utilisation de frigorigènes sobres en carbone.