La Communauté mouride va célébration, ce lundi 04 Septembre 2023/18 Safar 1445,le Grand Magal de Touba. L’événement qui commémore le départ en exil au Gabon du Fondateur du Mouridisme Cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul en 1895 est, cette année, en sa 129ème édition. Plongée aux origines d’une célébration plus que centenaire.
Le samedi 18 Safar 1313, (le 10 Août 1895) à 14h, le Cheikh Ahmadou Bamba fut arrêté à Djéwal (dans l’ancien Cercle de Louga) par un détachement des autorités coloniales françaises. Il est exilé après un procès inéquitable, tenu dans la salle de délibération du Conseil Privé, sis dans la Gouvernance de Saint-Louis, le 05 Septembre 1895. A l’issue de ce jugement sans appel, le Conseil Privé décida « à l’unanimité, après avoir entendu les rapports de M. Merlin et Leclerc, et fait comparaître Cheikh Ahmadou Bamba, qu’il y avait lieu de l’exiler au Gabon ». A quelle fin ? « Jusqu’à ce que », disait-il « l’agitation causée par ses enseignements soit oubliée au Sénégal ». L’exil au Gabon durera sept(7) longues années, loin des siens ( famille et disciples).
C’est cette date du 18 Safar que Khadimou Rassol avait choisie comme jour d’action de grâce et de fête. Rares sont ceux qui ont choisi le jour où toutes leurs épreuves et privations ont commencé pour célébrer une fête et remercier le Tout-Puissant, le Maître des Cieux et de la Terre. Selon Cheikh Abdoul Ahad Mbacke (son fils et 3ème Khalife), ce fut en 1921 à Diourbel que le Cheikh lança son célèbre appel: « Quant’ au bienfait que
Dieu m’a accordé, ma seule et souveraine Gratitude ne le couvre plus, par conséquent, j’invite toute personne qui se réjouit de mon bonheur personnel, à s’unir à moi dans la reconnaissance éternelle à Dieu, chaque fois que l’anniversaire de ce jour la trouve sur terre ». En 1980, le successeur de Serigne Falilou Mbacké, dans son appel pour le Grand Magal, cite les écrits du Cheikh pour étaler l’étendue des bienfaits reçus de Dieu : « Dieu m’a accordé des dons prodigieux qu’il n’a jamais accordés et qu’il n’accordera jamais à un contingent. » « Je ne doute guère de ma qualité de voisin intime du Créateur de l’Univers. Quel magnifique état ! » « Les faveurs extraordinaires, innombrables que j’ai obtenues de Dieu ne se comptent plus dans l’univers et, c’est cela, mon bonheur. »
Chacun selon ses moyens (de la poule au chameau) est invité à célébrer ce jour 18 Safar chaque fois qu’il en a l’occasion. C’est une forte recommandation de Cheikh Ahmadou Bamba que tous les Khalifs rappellent à la veille du Magal. Sur la signification du mot « Magal », Cheikh Saliou Mbacké 5ème khalif de Sérigne Touba, à l’occasion de son appel du 25 août 1990, nous édifie clairement. Il affirme en substance que la Fête du sacrifice étant une Tradition Prophétique, l’appellation « deuxième fête du sacrifice » que les talibés avaient adopté ressemblerait donc à une innovation blâmable (« Bidaa »). C’est pourquoi le Cheikh recommanda de l’appeler « Mal » (littéralement Magal: terme Wolof qui signifie célébrer, évidemment, dans l’exaltation de la grandeur du Seigneur et l’Election du Prophète. C’est, autrement dit, glorifier le Seigneur et Son Prophète Muhammad
(S.A.W)). Donc que personne ne l’appelle plus « deuxième Fête du Sacrifice » mais « Magal ». C’est le Cheikh qui est le premier à prononcer ce mot que nous nous employons tous aujourd’hui. Le Magal était individuellement par chaque talibé chez lui comme la Tabaski. Cela a été ,ainsi, du temps du Cheikh et pendant le règne du premier Khalife Cheikh Mouhamadou Moustapha (1927-1945).
On peut penser que le premier Khalife n’a pas appelé à la célébration du Magal à Touba, peut être uniquement parce que la majeure partie de son Khilafat a coïncidé avec la crise des années trente ainsi que la seconde guerre mondiale. Il était ,en outre, préoccupé, par le plus important projet mouride : la grande Mosquée de Touba, qui nécessitait le prolongement du chemin de fer de Diourbel à Touba. Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké réalisa le tronçon Diourbel- Touba sur fonds propres et facilita dans le même temps, le transport des matériaux de construction. Il choisit le 20 du mois lunaire mouharram qui marque le retour à Dieu du Cheikh pour le grand rassemblement annuel des mourides. C’est le deuxième Khalife Général des mourides Cheikh Mouhamadoul Fadel Mbacké qui appela tous les fidèles mourides à venir à Touba pour célébrer le Grand Magal en 1948.
Le Grand rassemblement à Touba a permis au deuxième Khalife de profiter de ce jour d’actions, de grâce pour mobiliser et motiver annuellement les talibés pour l’achèvement du grand projet de la communauté, la Grande Mosquée de Touba. Le khalife célébra avec faste la prière d’inauguration de la Mosquée en 1963.
Ibrahima NGOM Damel