La participation du Sénégal à l’intervention militaire programmée au Niger vise uniquement à contribuer au rétablissement de la LÉGALITÉ institutionnelle et à assurer une défense préventive de ses territoires contre une menace terroriste qui se fait de plus en plus prégnante dans cette zone subsaharienne marquée par une ceinture de feu préoccupante.
C’est sous ce prisme que nous devons lire ou entendre les propos de nos autorités gouvernementales qui ont fait face à la presse avant-hier. Pour rappel, le Niger est un pays voisin avec qui nous entretenons des relations fraternelles basées sur le respect mutuel. Nous n’avons donc aucun problème avec son peuple qui, au tout début du conflit, était totalement contre le putsch et le manifestait publiquement, avant d’amorcer un virage à 90°, pour soutenir leurs militaires.
Pourquoi ce changement d’attitude ? Est-ce une influence du france-dégagisme qui a fait de nombreux émules au Mali et au Burkina?
Encore une fois, nous devons avoir à l’esprit que le Sénégal est un pays démocratique respectueux des engagements pris au sein de la CEDEAO qui ne s’en prend qu’à une poignée de putschistes qui cherchent à déstabiliser la sous-region et risquent malheureusement de brader les ressources naturelles de leur pays, leur Uranium notamment, aux Russes qui en ont fortement besoin aujourd’hui.
Un ami vampire ?
Il faudrait être trop idéaliste et un parfait ignare des enjeux économiques actuels et jeux de chaises de la geopolitique, pour croire un seul instant en la sincérité de la main amicale offerte par la Russie dont la préservation de ses intérêts économiques et geostratégiques sont l’unique source qui alimente cette « amitié » opportuniste.
D’ailleurs, la présence de Wagner aux côtés des putschistes, loin de nous rassurer, devrait plutôt nous faire peur car ces célèbres mercenaires de la guerre ne sont guère des enfants de cœur.
Le groupe Wagner fait en effet de très bonnes affaires en Afrique d’où il tire une importante partie de ses revenus, grâce notamment aux contrats de concessions minières signés avec la République centrafricaine (RCA), pour plusieurs centaines de millions de dollars. Depuis 2018, il s’enrichit ainsi des ressources naturelles de ce pays (ses minerais, son or et son bois), en échange de ses “services de protection”. C’est cette stratégie de spoliation que les mercenaires de guerre de groupe Wagner ont adopté au Mali, au Soudan ou en Libye, mais également en Syrie.
Également surnommés “les chiens de guerre » russes, ils se sont aussi enrichis de l’or soudanais.qui a aidé au financement de leurs opérations sur le continent africain.
Il faut souligner qu’outre le gouvernement des Emirats arabes unis qui financent leurs operations, le Venezuela leur reverse un pourcentage sur les revenus perçus de ses activités pétrolières, en échange de la protection des personnalités de son régime.
Par ailleurs, de troublants indices laissent entendre que l’Algérie serait prête à financer le contrat de Wagner au Mali, au Burkina Faso et au Niger.
Le prix de cette protection est bien entendu considérable. Pour le Mali par exemple, ce sont environ cent-trois (103) millions d’euros qui seraient déboursés sur une année pour payer les mercenaires, soit deux fois le budget du ministère de la Justice malien. Et c’est cette puissante société de guerre russe qui, aujourd’hui, rode autour des ressources des pays subsahariens qu’il va vampiriser jusqu’à la dernière goutte de sang !
Je demeure dès lors convaincue qu’en rompant ses relations diplomatiques avec la France, un ancien colon sangsue, pour en nouer d’autres avec la Russie, un impérialiste vampire, le Niger ne fait que tomber de Charybde et Scylla.
Avec cette stratégie geopolique mal pensée, ce peuple frère ne gèrera pas définitivement ses problèmes, il ne fera que les transposer ou les switcher.
Divorcer d’avec la France pour se marier avec la Russie, c’est juste aller de mal en pis.
Renégocier en toute intelligence ses rapports avec l’autre pour survivre et émerger
Il aurait été sans doute plus « sage » et efficace pour nos frères africains d’imposer à la France une renégociation de tous les contrats de recherches et d’exploitation de ressources naturelles déjà signés. La renégociation d’un contrat est une disposition légale donc envisageable, lorsque la survenance d’une circonstance imprévisible rend son exécution extrêmement couteuse.
Si le Niger juge bien trop onéreuse pour lui la « présence » de la France dans l’exploitation de ses ressources naturelles, notamment de son Uranium, il y avait donc cette possibilité à explorer plutôt que l’expulser de son territoire. Cette stratégie serait d’autant plus viable et efficace que le champ de la compétition partenariale est devenue plus ouverte avec d’autres pays étrangers, dont la Russie, qui seront tout disposés à faire des offres plus allechantes voire avantageuses qui obligeraient les français à revoir leur copie et à reconsidérer la nature de ses relations avec le Niger, son ancienne colonie.
A titre d’exemple, en mars 2021, l’Etat du Sénégal est entré dans le capital de la Société concessionnaire de l’autoroute à péage (Secaa) à hauteur de 25%, après un long processus de renégociation du contrat de la concession autoroutière Dakar-Diamniadio-Aibd. Et le plus intéressant dans cet exploit, c’est que les prix du péage ne connaîtront aucune hausse pour les cinq (5) prochaines années, selon les termes du contrat renégocié.
Juste pour redire que d’autres stratégies plus pertinentes de renforcement de leur souveraineté économique existent pour nos frères africains.
Haro sur les nouvelles lobbies géopolitiques !
Nous devons nous méfier de toutes ces nouvelles lobbies géostratégiques, de toutes ces nouvelles nations étrangères qui tournent autour de l’Afrique, comme des abeilles attirées par le doux parfum du pollen des fleurs écloses.
En effet, elles n’ont d’œil que pour ses ressources naturelles qui polarisent et cristallisent aujourd’hui tous les intérêts économiques et geostratégiques. La seule stratégie viable que l’Afrique puisse adopter aujourd’hui, c’est d’abord de se donner les moyens substantiels de compter sur elle-même, notamment sur l’engagement, les efforts et les compétences multiples de ses gouvernants à exploiter rationnellement ses ressources propres (naturelles comme humaines), pour se développer et se maintenir durablement dans un développement socioéconomique impactant.
Or cet objectif ne deviendra effectif que lorsque ses enfants auront appris à renforcer leur dignité individuelle et collective, à relever leur estime de soi et à raffermir leurs liens consanguins, pour se sevrer définitivement du système de l’assistanat ou de la politique de la main tendue et…rester ainsi dans la dynamique d’une reconnaissance factuelle de son statut de continent dont la voix compte et porte loin, dans le concert des nations. C’est à cette posture digne et courageuse que le Président Macky Sall avait justement invité ses jeunes frères putschistes africains, lors du sommet Afrique-Russie auquel Poutine avait convié les gouvernants de l’Afrique subsaharienne.
Oui, je suis assez préoccupée par la situation de vit aujourd’hui le Niger, et plus largement le Mali et le Burkina. En effet, l’immaturité, l’inexpérience et la témérité de leurs jeunes puschistes constituent de sérieuses menaces pour leur socioéconomique stabilité et, bien plus grave encore, pour la souveraineté politique de leurs pays respectifs.
Je nous renvoie ainsi à cette métaphore sénégalaise qui nous conseille de bien penser aux consequences de nos choix relationnels, avant d’agir.
Un bon leader ne fait jamais du JËND ANDË, TOCC WALA SAANI ANDË. Ils les conservent jalousement tous les deux car, un jour, l’ancien Andë pourrait servir.
Me vient ici à l’esprit une autre image metaphorique illustrative : celle d’une maman aimante et pragmatique qui vient de faire prendre son bain à son bébé. Si l’eau du bain est jetée car devenue impropre, le savon ou le gel de bain utilisé, la petite baignoire et le gant de nettoyage seront conservés et réutilisés pour les bains futurs.
Un bon leader capitalise ! Aussi doit-il apprendre à apprendre de ses erreurs passées comme présentes, à renforcer ses acquis engrangés et à exploiter ses expériences vécues.
Et c’est ce que fait le PR Macky Sall dans la définition et l’execution de ses politiques de développement et…dans l’orientation de ses choix de stratégies geopolitiques.
A titre illustratif, le Sénégal a créé et développé une foultitude de relations partenariales fructueuses et win-win, avec de divers pays. Il entretient avec eux de solides relations fructueuses et customisées, en fonction des besoins ponctuels et des intérêts spécifiques communs. D’ailleurs, c’est à cette posture responsable qu’invitait le Général De Gaulle qui rappelait, lors d’une conversation qu’il avait eue avec la femme de William Churchill.
Il lui rappelait si justement que les « États n’ont pas d’amis ; ils n’ont que des intérêts ».
Autant vous confier donc mon inquiètude envers ces pays frères dont les gouvernants actuels font preuve de tant d’irresponsabilité, fruit de leur immaturité enrobée d’arrogance. Ces jeunes putschistes sont bien trop pressés, trop idéalistes et trop inexperimentés pour échapper aux dents acérées de la meute de loups qui vont bientôt les encercler…
Je terminerais ce dialogue avec mon esprit interpellé par ces paroles inspirantes du refrain d’une des célèbres chansons de Youssou Ndour : « Bey bu andul ak morami beyam so moytuwul andak cere wala dêxin. »
Cet avertissement vaut bien son pesant d’or.
AYA DIOP
CO-FONDATRICE DE MAREME REMA