Samedi dernier, le Sénégal est davantage entré dans le panthéon du football continental après le sacre des « Lions » locaux au Championnat d’Afrique des nations (Chan) disputé en Algérie. Avec cette performance historique qui intervient après le sacre à la Can 2021, en février dernier, au Cameroun, et au Beach Soccer, en octobre 2022, le football sénégalais réalise un grand chelem sans précédent et confirme son hégémonie sur le continent. Une belle embellie qui atteste d’une excellente santé footballistique.
Le football sénégalais vit un conte de fées. D’aucuns diraient un rêve éveillé qu’il doit à l’exploit historique des joueurs de « l’Équipe nationale locale » appelés « Lions locaux », qui ont déjoué tous les pronostics pour se hisser, avant-hier, sur le toit de l’Afrique, en remportant le Championnat d’Afrique des nations (Chan) de football.
Pour la Can 2022, au Cameroun, au coup d’envoi de cette 33ème édition, vingt-trois nations rêvaient de succéder à l’Algérie. À l’arrivée, il n’y a eu qu’un heureux et bel élu : le Sénégal. Ce magnifique épilogue efface six décennies de désillusions, comme ce fut le cas lors de la 32ème édition, en 2019, en Égypte, quand Aliou Cissé et ses poulains avaient presque flirté avec les nuages. Mais, c’est l’Algérie qui était montée au zénith. Comme leurs aînés, les « Lions », il y a un an, Ousmane Diouf et ses coéquipiers l’ont fait ce 04 février 2023. Une date qui sera inscrite en lettres d’or dans les annales du football sénégalais. Un sacre qui n’était pas évident car les « Lions locaux » effectuaient leur grand retour après douze longues années d’absence.
Quatorze ans de désillusions
Demi-finaliste lors de la première édition (Côte d’Ivoire 2009) et éliminée au premier tour en 2011, au Soudan, l’équipe nationale locale – après les rendez-vous ratés : 2014, en Afrique du Sud ; 2016, au Rwanda ; 2018 au Maroc ; 2020 au Cameroun –, avait validé son ticket pour Algérie 2022 en éliminant sa bête noire : la Guinée. En dépit du forfait du Maroc, double tenant du titre – 2018 et 2020 –, les coéquipiers de Moutarou Baldé ne figuraient pas au rang des sérieux prétendants pour la succession des « Lions de l’Atlas » : l’Algérie, pays hôte, la Rd Congo, le Ghana, le Mali et le Cameroun. Le début de compétition aura été poussif pour le Sénégal : une victoire laborieuse (1-0) contre la Côte d’Ivoire, puis une défaite (0-1) contre l’Ouganda. Par la suite, les « Lions » se sont rebiffés, et ont sorti le grand jeu, avec, à la clé, un match d’anthologie contre les « Léopards » de la République démocratique du Congo (RdC) qu’ils ont étrillés (3-0). Avec ce retentissant succès, le Sénégal envoyait un signal fort, car Lamine Camara et ses partenaires venaient de terrasser un ogre du Chan.
Championne en 2009 et 2016, l’équipe du pays du Président Étienne Tshisekedi est, avec le Maroc, la nation la plus titrée de la compétition.
Un début de Chan poussif
Sur le chemin menant à la gloire d’avant-hier, Moussa Ndiaye, le sociétaire du Jaraaf de Dakar, et sa bande ont écarté, en quarts de finale, une belle équipe de Mauritanie (1-0), et souffert avant de venir à bout (1-0) d’une fringante formation malgache, l’une des belles sensations de ce Chan 2022.
Samedi dernier, en finale, le Sénégal était loin d’être favori face à l’Algérie forte d’atouts considérables : pays hôte, invaincu, aucun but encaissé, meilleure attaque (neuf buts). Mais, les dieux du football en avaient décidé autrement… La victoire sera sénégalaise. Et elle sonne comme une revanche. Un peu plus de trois décennies plus tôt, les « Fennecs » n’avaient pas souri à l’équipe A du Sénégal terrassée lors de la Can 1990. Feu Jules François Bocandé et ses coéquipiers avaient raté une belle occasion d’entrer dans l’Histoire : les poulains de Claude Le Roy tombèrent les armes à la main (1-2), en demi-finale, contre les « Fennecs », futurs vainqueurs de l’épreuve, le 12 mars 1990, au Stade du 05 juillet 1962. Malheureux demi-finalistes, les « Lions » ne feront guère mieux contre la Zambie, trois jours plus tard, dans la « Petite Finale » (match pour la troisième place). Mais, avant-hier, Alger a été la terre promise pour les « Lions locaux » qui ont semé de bonnes graines sur la pelouse du Stade Nelson Mandela.
Feu Bocandé & Cie vengés
« Notre victoire en Algérie signifie que notre travail a porté ses fruits. Nous avons une équipe jeune qui sait comment gérer les matchs. Je n’ai jamais douté. Ces jeunes hommes veulent élever le niveau du football local. Nous sommes un gros pays exportateur de joueurs, c’est pour cela que nous ne gardons pas les talents dans notre équipe locale », a dit Pape Thiaw, le coach, dédiant la victoire à feu Joseph Koto, qui dirigeait ces « Lions ». Le parcours du Sénégal, première équipe africaine à réaliser cet exploit footballistique, est la cerise sur le gâteau d’une razzia au niveau supérieur démarré un an plus tôt.
Souvent cité parmi les favoris, le Sénégal a été victime du fardeau que représentait ce costume parfois trop lourd à porter. L’année dernière, au Cameroun, les « Lions » ont été pile à l’heure, en disposant de l’Égypte en finale, pour entrer dans la légende. Ce triomphe consacre un homme – Aliou Cissé – dont l’objectif d’une vie était de gagner la Can.
Challenge remporté et qui n’a pas laissé indifférent le Président de la République, qui lui a rendu un hommage appuyé pour ses performances remarquables. Macky Sall avait salué sa force de caractère et son leadership sur et en dehors du terrain et l’a remercié pour avoir mené à bon port la troupe. « Tu as fait ce qu’aucun entraîneur sénégalais n’a fait. Seuls les grands conduisent leur équipe et seuls les grands parmi les grands ramènent avec eux la coupe. Vous êtes de vrais champions », avait laissé entendre le Chef de l’État lors de la réception des « Lions » au Palais.
Et aussi… Beach Soccer, U20, U15, Lionnes.
Sur la lancée du sacre du Sénégal au Cameroun, l’équipe nationale de Beach Soccer n’a pas dérogé à la règle en remportant pour la septième fois la Can de cette compétition qui s’est jouée au Mozambique. Un record pour les « Lions » qui confirment ainsi leur mainmise sur la compétition… Ces performances sans précédent ont permis au Sénégal d’entrer au panthéon du football continental.
Car aucune nation n’avait, à ce jour, réussi à remporter successivement les trois tournois majeurs de la Caf (Chan, Can et Beach Soccer). Les différentes équipes nationales ont représenté dignement le pays et brillé dans chacune des compétitions auxquelles elles ont participé. Les U20, vainqueurs du tournoi Ufoa A, ont, eux aussi, gagné le droit de prendre part à la Can de la catégorie prévue du 18 février au 12 mars 2023, en Égypte. Les U15 ont été sacrés au tournoi de l’Union des fédérations ouest-africaines de football, joué au Libéria.
En football féminin, l’équipe nationale, après dix ans d’absence sur la scène continentale, a pris part, en juillet dernier, à la 14ème édition de la Can disputée au Maroc. Pour cette troisième participation, les « Lionnes », certes, ont été éliminées en quart de finale par la Zambie, mais ont gagné une place de barragistes pour le Mondial 2023, qui sera organisé conjointement par l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Les protégées de Mame Moussa Cissé ont également conservé leur titre en remportant le Tournoi Ufoa disputé au Cap-Vert, confirmant leur suprématie dans la zone.
Toutes ces performances exceptionnelles illustrent l’embellie du football sénégalais ces dernières années, qui est comme touché par la grâce. Une belle preuve qui laisse croire qu’il faudra compter avec le Sénégal dans les années à venir.