En Afrique comme dans les autres pays en développement, l’essor des cryptomonnaies s’explique essentiellement par leur utilisation comme canal alternatif d’envois de fonds et bouclier contre l’inflation et la dépréciation des monnaies nationales.
Trois pays africains figurent dans le Top 10 mondial en termes de possession de cryptomonnaies en pourcentage de la population, selon une étude publiée fin juin dernier par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED).
Avec 8,5% de sa population détenant ces monnaies, le Kenya occupe le premier rang africain et la 5e place mondiale.
Intitulée « Tout ce qui brille n’est pas de l’or : le coût élevé de l’absence de réglementation des cryptomonnaies » (All that glitters is not gold : The high cost of leaving cryptocurrencies unregulated), l’étude révèle aussi que l’Afrique du Sud arrive à la deuxième place à l’échelle continentale et à la 8e position au plan mondial. 7,1% des Sud-Africains, toutes tranches d’âge confondues, détiennent en effet des monnaies virtuelles.
La nation arc-en-ciel est talonnée par le Nigeria (3e rang en Afrique, 9e rang mondial), où 13 millions d’habitants, soit 6,3% de la population, possèdent des cryptomonnaies.
L’étude de la CNUCED fait également ressortir que l’Ukraine occupe le premier rang à l’échelle mondiale (12,7% de la population), devant la Russie (11,9%), le Venezuela (10,3%) et Singapour (9,4%).
Au total, 15 pays en développement ou émergents figurent dans le Top 20 mondial de ce classement.
Des risques pour la stabilité financière
La CNUCED précise que deux principaux facteurs ont favorisé l’utilisation accrue des monnaies virtuelles dans les pays en développement depuis le début de la covid-19. Il s’agit en premier lieu, de l’utilisation de ces monnaies comme un canal attractif, en termes de prix et de rapidité, pour envoyer des fonds. Le deuxième facteur est l’utilisation des crypto-actifs comme bouclier contre la dépréciation des monnaies nationales et l’inflation croissante, déclenchée ou accentuée par la crise sanitaire.
L’étude a cependant précisé que la hausse des taux de possession des monnaies virtuelles présente des risques pour les pays en développement. D’autant plus que la propagation de ces actifs peut engendrer une « forte instabilité financière en cas d’effondrement des prix », et « compromettre l’efficacité des contrôles des flux des capitaux ».
En outre, les cryptomonnaies constituent un « nouveau canal pour les flux financiers illicites » et pourraient même « remplacer les monnaies nationales de manière non officielle si elles deviennent un moyen de paiement très répandu. Ce qui pourrait mettre en péril la souveraineté monétaire des pays ».
Pour limiter ces risques, la CNUCED recommande aux Etats d’assurer une réglementation financière complète de ce marché en pleine expansion, en exigeant l’enregistrement obligatoire des plateformes d’échange des cryptos et des portefeuilles numériques, et en imposant des frais à l’entrée et des taxes sur les transactions financières effectuées sur ces plateformes.
Elle conseille également aux Etats d’interdire aux institutions financières réglementées de détenir des stablecoins et des cryptomonnaies ou de proposer des produits connexes à leurs clients, de restreindre la publicité pour les plateformes d’échange et les portefeuilles numériques dans les espaces publics et sur les médias sociaux, et de créer des monnaies digitales sous le contrôle des banques centrales.