Palaces immenses, gratte-ciel à perte de vue et centres commerciaux flambants neufs, rien n’est jamais trop beau et trop grand pour Dubaï. En quelques années, la ville de tous les possibles est devenue l’Eldorado des stars de la téléréalité et de l’influence, faisant d’elle la destination n°1 à la mode. Pourtant, derrière ce décor utopique se cache une toute autre réalité : travailleurs exploités, droits humains réprimés, désastre écologique, l’envers du décor est beaucoup moins idyllique… La ville du toujours plus oui, mais à quel prix ?
Une petite ville de pêcheurs. On dit que Rome ne s’est pas construite en un jour, à Dubaï on pourrait presque croire que si. C’est dans les profondeurs du Moyen-Orient, bordant le Golfe Persique, dans le désert de Rub al Khali que naîtra bientôt une des villes les plus touristiques au monde : Dubaï. Aujourd’hui considérée comme la ville de la démesure, ce n’est qu’il y a peu que ce projet pharaonique est sorti de terre.
Miser sur une étendue de sable sans fin pour y construire un véritable empire, c’est un pari risqué. À cela, s’ajoutent les 25 jours de pluie maximum par an qui viennent comme parasiter une ville où le soleil est roi, avec des températures avoisinant parfois les 50°C. Alors créer la vie dans un environnement mêlant chaleurs extrêmes, terres arides et inhospitalières peut s’avérer compliqué…
Un défi aujourd’hui parfaitement relevé par la dynastie Al Maktoum. Déjà installée dans l’Émirat dubaïote depuis le milieu du 19ème siècle, c’est elle qui a fondé ce haut lieu du tourisme de luxe.
Le modèle économique de Dubaï reposait sur l’agriculture vivrière et le commerce des perles dont la ville était un haut lieu dans le désert d’Arabie. Ce mode de vie traditionnel, dans cette petite ville sans artifice, verra bientôt la mondialisation transformer le visage de ses terres. Le gouvernement Al Maktoum voit le commerce extérieur comme un moyen de développement de l’Émirat et donc de sa ville–mère, Dubaï. Il va alors tenter de stimuler les échanges commerciaux en étendant les terres de cultures et en construisant le nécessaire pour faire transiter la marchandise.
Au fil de son développement démographique et économique, cette cité du désert s’est dotée de transports et de nouvelles liaisons commerciales, nécessaires pour échanger et améliorer les relations diplomatiques avec l’étranger. À la veille des années 1960, Dubaï disposait déjà des infrastructures propices à son expansion : routes, ponts, ports, systèmes d’approvisionnement en eau et électricité, notamment.
Ce n’est que plus tard que l’on découvrira des sources de pétrole au large des côtes de la ville. Leur exploitation restera brève et limitée. L‘Émir Al Maktoum, laissera l’Émirat d’Abou Dabi se charger de l’extraction de l’or noir. Lui, choisira le tourisme. Les années 1970 lancent le projet Dubaï comme on le connaît aujourd’hui. Elles figurent comme le lancement des constructions de grande envergure dynamisées par l’union des Émirats en 1971. Un aéroport, le nouveau port de Jebel Ali et le Dubaï World Trade Center apparaissent désormais dans le paysage dubaïote. Ce dernier devient le plus haut gratte-ciel de la ville. Il inspirera d’autres projets bien plus ambitieux…
Démesure et immensité
Au fil des années, Dubaï construit sa renommée à travers des projets architecturaux surmédiatisés. Cet Eldorado du désert, s’efforce d’attirer les investisseurs au portefeuille bien rempli. C’est eux qui sont dans l’ombre de la ville, bien que de la dynastie Al Maktoum donne aussi de sa personne. Ils façonnent alors l’image qu’on lui connaît : une destination de vacances… de luxe. L’Émirat ne se refuse rien et ne recule devant aucun défi. Faire du ski en plein désert ? C’est possible. Construire la tour la plus haute du monde ? Un jeu d’enfant. Le plus grand centre commercial du monde ? Presque trop simple. Tout est fait pour attirer une clientèle fortunée qui ne serait même pas étonnée par tout ce luxe.
Mais où loger tous ces touristes ? Dans un hôtel, mais pas n’importe quel hôtel. Le Burj Al Arab, considéré comme le symbole d’un pays qui se tourne vers une autre économie après l’ère du pétrole. Un hôtel qui s’auto-attribue 7 étoiles – alors qu’en France le plus étoilé en porte 5 – et est considéré comme l’un des plus luxueux au monde pour lequel il faudra débourser pas moins de 2000 € pour une nuit.
Mais Dubaï ne s’arrête pas là. Elle prend aussi le dessus sur la mer et en fait son allié touristique avec la construction d’îles artificielles. L’une des plus connues est la Palm avec le quartier résidentiel de Palm Jumeirah. Vous cherchiez à vous démarquer avec la plus belle des villas ? C’est peine perdue, elles ont toutes été construites quasi à l’identique. The World Island fait aussi partie des projets les plus étonnants. Un archipel d’îles artificielles sur le Golfe Persique censé représenter l’ensemble des pays de la planète.
Des prouesses architecturales et technologiques, il en existe bien d’autres à Dubaï. La Dubaï Marina où les yachts côtoient les buildings gigantesques. Les fontaines qui accompagnent le Burj Khalifa, où l’eau jaillit jusqu’à 275 m de hauteur – n‘oublions pas, la Tour Eiffel fait 300 m – mais ce n’est rien à côté des 828 m du Burj Khalifa. Et le fameux Dubaï Mall. Là-bas, vous êtes sûrs de trouver votre bonheur parmi les 1 200 boutiques et les 800 000 m² du centre commercial. La sobriété ? Les dubaïotes ne connaissent visiblement pas. Depuis ses débuts Dubaï flirte plutôt avec l’excentricité et en fait son atout premier. Le but du gouvernement est clairement affiché : devenir la 1ère destination mondiale du tourisme et du luxe.
Dubaï, une terre promise
La ville séduit par son artificialité, être toujours plus beaux et belles physiquement, toujours plus riches en oubliant l’authenticité. Dubaï charme aussi par les nombreux avantages qu’elle prétend offrir aux futurs investisseurs, résidents et touristes. Aujourd’hui, cette cité du désert semble être le repère des ex–candidats de téléréalité et une référence pour les influenceurs cédant aux sirènes dubaïotes. Un ciel bleu, une ville cosmopolite où l’on peut se prélasser sans problème, ce sont souvent les arguments avancés par les visages très familiers que l’on voit partir à Dubaï : la météo, la sécurité et la multi-culturalité de la ville.
Un point non négligeable et sur lequel bizarrement les expatriés à Dubaï s’expriment moins : la fiscalité, qui est beaucoup plus avantageuse dans la ville de la démesure. Aucun impôt sur le revenu n’est prélevé, un vrai paradis fiscal pour ceux qui souhaitent créer leur business ou développer leur patrimoine.
Un passeport occidental s’avère être un passe-droit pour vivre à Dubaï. Avec ce dernier, exit les procédures à rallonge et coûteuses de demande de visa dont doivent s’acquitter la majorité des autres nationalités « détenir un passeport occidental, permet d’obtenir beaucoup d’avantages à Dubaï » explique Amélie Le Renard dans Le privilège occidental. Travail, intimité et hiérarchies postcoloniales à Dubaï.
La présence de nombreuses zones franches permet d’assouvir un peu plus les travailleurs locaux puisqu’elles disposent de droits spécifiques. Parfait, lorsque l’on souhaite développer son entreprise à bas coûts.
Hormis les avantages administratifs, Dubaï c’est aussi la ville des réseaux sociaux. « De nombreuses tours et bâtiments sont construits et pensés spécifiquement pour être spectaculaires sur les photos » poursuit l’écrivaine.
Le gouvernement crée alors l’image d’une ville luxueuse et futuriste via ces influenceurs qui se rendent sur place. Parfois tout frais payé par l’office de tourisme de Dubaï elle-même. Une pratique de plus en plus répandue, utilisée par les villes souhaitant se façonner ou reconstruire un imaginaire commun. Dubaï, une ville qui semble décidément regorger d’aspects positifs où tout devient succès, un vrai paradis sur Terre.
Du pain sur la planche en matière de droits humains…
Vivre à Dubaï semble presque synonyme de paradis. Alors, à tous ceux qui pensent que le paradis est sur Terre, une chose est sûre, il n’est pas sur la terre promise du luxe et de la démesure. La réalité fait plus écho à l’enfer…
Démarrons crescendo.
Avant tout, ayez en tête que le système judiciaire à Dubaï – et aux Émirats arabes unis en général – est un mélange de droits civils et de la charia. Les peines peuvent aller de la simple amende pour les plus chanceux à l’exécution. Alors tenez-vous à carreau ! De nombreux expatriés finissent par déchanter et voir leur rêve américain façon Mille et Une Nuits s’écrouler. Beaucoup ne se sentent pas libres d’émettre un avis sur le gouvernement. De plus, les accros à Facebook, Messenger, Skype peuvent dire adieu à ces applications qui sont censurées dans le pays, de la même manière que Disney + et les sites pornographiques.