Au Sénégal, le problème fondamental sur le marché de l’emploi est l’opérationnalité des acteurs, indique une étude.
Le Dr Ibrahima Bao, coordonnateur de l’Institut de Formation Professionnelle (IFP) de l’UFR Lettres et Sciences Humaines de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, au Sénégal et une structure dénommée «Ceemo», ont mené une étude pour analyser les problématiques liées à l’employabilité des nouveaux diplômés dans les entreprises sénégalaises. Ce travail exploratoire a porté sur onze entreprises qui interviennent dans neuf secteurs de l’industrie et des services tels les assurances, le BTP, le contrôle technique des constructions, la gestion immobilière, l’emballage et l’impression, l’agroalimentaire, la logistique. Parmi les onze entreprises faisant partie de l’enquête, trois sont spécialisées dans les services, et les huit autres sont dans le secteur industriel. Il ressort que les diplômés des meilleures grandes écoles du Sénégal possèdent des compétences techniques hautement qualifiées. Cependant, les entreprises sont confrontées à un déficit de nouveaux diplômés opérationnels concernant l’exécution des tâches nécessaires, à leurs activités, dans un contexte concurrentiel, souligne le texte parvenu à notre rédaction. Beaucoup d’entreprises déplorent le déficit d’employabilité des diplômés sortis de l’enseignement supérieur.
13,7 % de travailleurs qualifiés pour les postes qu’ils occupent
L’enquête s’est basée sur les compétences techniques et les compétences comportementales. Pour le premier volet, le pourcentage de travailleurs dont le poste occupé correspond à leur qualification représente 13,7 % contre 83,9 % pour ceux qui sont sous-qualifiés pour l’emploi occupé, d’après une étude de 2017 de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). L’acquisition des compétences techniques conformes aux besoins du marché constitue un défi pour les diplômés et pour les employeurs. En cause, le décalage entre les compétences acquises du recruté et les compétences exigées ainsi que l’obsolescence des outils de sa formation comparés à ses nouveaux outils de travail. Même s’il arrive que le demandeur d’emploi ait les compétences requises (2,4 % des travailleurs sont même surqualifiés pour le poste occupé), un ajustement est nécessaire pour l’aider à démarrer activement et efficacement sa vie professionnelle.
«L’ensemble des responsables d’entreprise interrogés ont déploré un déficit en matière de compétences comportementales de la part des demandeurs d’emploi, quel que soit le niveau d’études ou le savoir-faire technique», explique le Dr Ibrahima Bao. Les entrepreneurs et recruteurs évoquent généralement trois catégories de valeurs pour être opérationnel et performant en entreprise, qui font défaut aux diplômés : le savoir-être, l’adaptation individuelle à la culture entrepreneuriale, et les valeurs, parfois en porte à faux avec celles traditionnelles. Ainsi l’engagement, la capacité d’écoute, le sérieux, le respect, «savoir se tenir», la ponctualité, la prise d’initiative, sont, entre autres, les lacunes que traînent les demandeurs d’emploi sénégalais.
Les formations dispensées ne permettent donc pas aux diplômés, une fois sur le marché du travail, de pouvoir répondre aux nécessités des entreprises. La pratique des stages de longue durée se généralise. Les entreprises sont obligées d’investir dans la formation complémentaire des diplômés de l’enseignement supérieur afin de les rendre opérationnels. Certaines prennent en charge des formations de mise à niveau dans les domaines de la technique, de la technologie et pour le renforcement des capacités du personnel.