La maladie du nerf sciatique gagne du terrain au Sénégal, en plus des facteurs classiques comme les mauvaises positions assises, l’hernie discale, certaines pathologies chroniques comme le diabète, les neurologues incriminent le nouveau mode de vie. A l’Hôpital Dalal Jamm 20 patients sur 30 consultés au service de neurochirurgie souffrent de la maladie du nerf sciatique.
Des rescapés de la maladie racontent leur douleur
La maladie du nerf sciatique appelée couramment le nerf sciatique est entourée de préjugés. Des patients basculent dans la paralysie. Pourtant, cette maladie est curable. Les témoignages des malades contribuent à déconstruire les préjugés autour cette pathologie paralysante.
La maladie du nerf sciatique est vicieuse. Elle s’installe de manière insidieuse plongeant les personnes affectées dans un silence, une sorte d’abattement. El Hadji Bira Dia ne fait pas partie de ceux qui refusent de parler de leur maladie. Ce technicien à la Senelec ne se fait pas prier pour fournir des détails sur l’apparition des premiers symptômes de cette pathologie. « J’ai commencé à avoir les signes du nerf sciatique lorsque j’avais une charge de travail élevée. J’avais des maux de dos, de l’arrière de la cuisse gauche. À un moment donné, j’avais complètement perdu l’usage de mes jambes », raconte-t-il. La perte de l’usage des jambes, c’est l’une des étapes de l’évolution de la maladie. À ce stade-là, les patients sont dans une sorte d’expectative. L’incertitude pousse beaucoup d’entre eux à faire recours à la médecine traditionnelle. Le technicien de la Senelec n’a jamais pensé qu’on lui a jeté un mauvais sort. « J’ai retrouvé l’usage de mes jambes après avoir suivi le traitement avec le neurochirurgien, Dr Mariétou Traoré, de l’Hôpital Dallal Jamm. Il ne reste que des fourmillements », relate le technicien. Il s’est rendu dans cet établissement hospitalier un jour de 9 décembre coïncidant avec l’anniversaire de son médecin qui lui a réservé un traitement spécial. Depuis lors, El Hadji Bira Dia n’hésite pas à parler à visage découvert de la maladie du nerf sciatique. « Le Dr Mariétou Traoré est très sociable. Elle m’a aidé à acheter mes médicaments. Elle me rappelle souvent qu’elle a commencé à me traiter le jour de son anniversaire », partage ce patient.
Il n’est pas le seul à se relever après le traitement, contrairement aux croyances populaires. Comme El Hadji Bira Dia, Lamine Khouma avait perdu espoir. Il ne croyait plus qu’il pouvait remarcher. L’ancien docker au Port autonome de Dakar (Pad), aujourd’hui âgé de 76 ans, s’est remis de la maladie, après juste trois jours de traitement. « Le médecin m’avait imposé un régime moins gras, avec beaucoup de fruits et légumes et de crudités. Il m’avait demandé aussi de beaucoup boire », se souvient le septuagénaire.
Aujourd’hui, cette maladie prend de plus d’ampleur dans les services spécialisés comme à l’Hôpital Dallal Jamm de Guédiawaye. « La Lombosciatique ou la névralgie sciatique fait partie des premiers motifs de consultation en névralgie, soit 20 malades sur 30. Ce sont des pathologies invalidantes et chroniques », témoigne Aminata Traoré, neurologue officiant au centre de santé Roi Baudouin et à l’Hôpital Dallal Jamm de Guédiawaye. La maladie du nerf sciatique est bien curable, contrairement aux idées reçues.
Le Dr Joseph Mendy de l’hôpital de Fann lève les équivoques et montre le rôle central du nerf sciatique dans le fonctionnement de l’organisme. « La moelle épinière est une continuation d’un système nerveux central qui renferme les nerfs rachidiens. Ce sont ces cordons qui naissent à partir du dos et se déploient dans l’organisme. Cela part du rachi-cervical, c’est-à-dire du cou jusqu’en bas. Dans la région lombaire, les racines vont constituer le nerf sciatique qui descend jusqu’à l’anus », explique le neurochirurgien. À la vérité, c’est le nerf sciatique qui véhicule les informations qui éveillent notre sensibilité. « C’est également le nerf qui, après avoir reçu un ordre, fait bouger le muscle. Le cerveau donne des ordres qui transitent d’abord dans la moelle, puis au nerf avant d’arriver aux muscles », explique la praticienne de santé.
Les causes des douleurs intenses
Le neurochirurgien, Joseph Mendy, du Centre hospitalo-universitaire de Fann, tient à faire la précision suivante : l’appellation de la maladie qui touche le nerf sciatique, c’est la sciatalgie. Cette pathologie se passe dans un système composé de 5 racines des vertèbres lombaires qui sont numérotées. « On a la première racine que les médecins appellent la « L4 », qui est celle qui sort d’une terminaison de la moelle épinière. Il y a aussi la racine L5 et la S1. Quand une pression est exercée sur une des racines, on parle de manière courante de sciatique. La partie inférieure du tronc qu’on appelle région lombaire est maintenue grâce à l’os et à la musculature », détaille le médecin. Selon lui, lorsqu’il y a un défaut dans cette « charpente », le disque intervertébral qui permet à la colonne de se plier a tendance à sortir de sa place, créant ainsi une pression au passage de la racine nerveuse. « Il arrive aussi que le disque sorte et vienne s’asseoir sur le nerf, ce qui provoque également une sciatique. Ce sont des douleurs très intenses avec des décharges électriques », renseigne le neurochirurgien Joseph Mendy.
Dr Joseph Mendy, Neurochirurgien à l’hôpital de Fann : « La guérison peut être totale si la prise en charge est précoce ».
La précocité de la prise en charge d’une anomalie du nerf sciatique est fortement recommandée. C’est l’assurance donnée par le neurochirurgien, Dr Joseph Mendy, du Centre hospitalo-universitaire de l’Hôpital de Fann. « Nous pouvons avoir une guérison totale si la prise en charge est précoce. Mais les malades ont tendance à trainer jusqu’à ce que le nerf s’abime, cela complique sa récupération », dit-il. Tout compte fait, la maladie du nerf sciatique prend de l’ampleur. Elle pèse de plus en plus dans les consultations comme au service de neurochirurgie du Centre hospitalo-universitaire de Fann. Sa part dans les consultations avoisine 60% dans le service de neurochirurgie. « Nous opérons entre 20 à 30 % des cas. Les autres cas peuvent être traités par des médicaments et de la rééducation pour renforcer les muscles », a rassuré le neurochirurgien qui révèle que la tumeur de la moelle épinière, et le cancer de la prostate peuvent être à l’origine du fonctionnement du nerf sciatique. « Le cancer de la prostate, chez une personne âgée, avec les métastases, est un processus qui peut aussi venir bloquer le nerf », a ajouté le spécialiste.
MARIETOU TRAORE, NEUROLOGUE : « Nous pouvons prévenir cette maladie en adoptant une certaine position assise »
La neurologue, Mariété Traoré, recommande la lutte contre le surpoids, la sédentarité et l’adoption de positions assises adéquates pour prévenir la pression sur la colonne vertébrale.
Quels sont les symptômes de la maladie du nerf sciatique ?
La plupart des patients présentent une douleur lombosciatique qui remonte le trajet du nerf sciatique. Autrement dit, la douleur débute par le dos avant d’irradier les membres inférieurs, c’est-à-dire, des genoux aux pieds. Ces malades peuvent alors sentir une douleur d’un seul membre inférieur ou des deux. La douleur peut avoir plusieurs profils. Elle peut se manifester par des crampes, des décharges électriques, des brûlures sur la plante des pieds… Le nerf, comme le muscle, peut être atteint par le déficit d’électricité fourni par le nerf.
Comment prévenir la maladie du nerf sciatique ?
Pour prévenir une pathologie, il faut d’abord connaître la cause. Les examens cliniques déterminent si le mal est d’allure mécanique liée au disque (hernie discale, ou discopathie dégénérative). Les disques sont ces plateaux qui équilibrent les vertèbres et qui parfois peuvent sortir de leur place initiale pour comprimer les nerfs. Au début, il y a une irritation des muscles. Je dois préciser que quelqu’un peut présenter un diabète chronique et avoir une lombosciatique. En général, la douleur concerne les deux membres. La prévention peut être liée à la position adoptée. Les chauffeurs et les personnes présentant un surpoids souffrent plus de cette maladie. À travers une imagerie, le neurologue peut donner des conseils hygiéno-diététiques pour que la maladie ne récidive pas.
Est-ce qu’il y a une possibilité de soulager les douleurs ?
Le préalable, c’est de faire une imagerie du rachi-lombo-sacré. La pathologie sciatique est compliquée car après des tests, on peut se rendre compte que cela vient de la colonne vertébrale. C’est également une maladie qui peut avoir des liens avec une hernie discale, un déplacement de disque ou une discopathie dégénérative. Après examen du patient, on peut se rendre compte qu’il s’agit d’une atteinte typiquement intrinsèque des nerfs. Dans ce cas, on peut exiger un électro-neuro-myogramme pour déterminer si la maladie a un lien avec une neuropathie. Ce sont ces deux examens demandés simultanément ou séparément qui permettront de faire le diagnostic de la zone atteinte. Pour le traitement, il faut des anti-inflammatoires, des antalgiques et des myorelaxants. Lorsque le nerf est comprimé, il ne donne pas assez d’électricité aux muscles.