La question des modifications constitutionnelles permettant de lever le verrou du nombre de mandats des chefs d’État fait parler partout en Afrique, notamment dans sa partie occidentale. Emmanuel Macron s’est prononcé sur les cas de la Guinée et de la Côte d’Ivoire qu’il juge « différents ».
Interrogé par le Magazine Jeune Afrique sur la légitimité des troisièmes mandats d’Alpha Condé en Guinée et de Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, le président français Emmanuelle Macron s’est d’abord drapé dans un laconisme de circonstance. « La France n’a pas à donner de leçons. Notre rôle, c’est d’en appeler à l’intérêt et à la force qu’a le modèle démocratique dans un continent de plus en plus jeune. L’Afrique a intérêt à construire les règles, les voies et les moyens pour avoir des rendez-vous démocratiques réguliers et transparents », souligne-t-il, dans un premier temps. Une prudence qui lui permet de rappeler que la France elle-même, jusqu’il y a douze ans, n’avait pas de limitation du nombre de mandats dans sa Constitution.
Passé ces précautions « diplomatiques », le chef de l’Etat français se lance bille en tête dans le sujet: « Je ne mets pas le cas de la Guinée et celui de la Côte d’Ivoire dans la même catégorie », différencie-t-il d’abord. « Le président Condé a une carrière d’opposant qui aurait justifié qu’il organise de lui-même une bonne alternance. Et d’évidence, il a organisé un référendum et un changement de la Constitution uniquement pour pouvoir garder le pouvoir. C’est pour ça que je ne lui ai pas encore adressé de lettre de félicitations. Je pense que la situation est grave en Guinée, pour sa jeunesse, pour sa vitalité démocratique et pour son avancée », juge E. Macron.
Réconciliation ivoirienne
Une situation qui est différente du contexte ivoirien. Macron confirme la volonté « clairement exprimé » d’Alassane Ouattara de ne pas briguer un troisième mandat. « Je l’ai tout de suite salué. Un candidat avait été désigné pour lui succéder : le Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly. Mais à quelques semaines de l’échéance, il s’est retrouvé dans une situation exceptionnelle avec le décès de ce dernier. Je peux vous dire, de manière sincère, qu’il ne voulait pas se représenter pour un troisième mandat », développe-t-il. Cependant, le président français a laissé entendre qu’il avait essayé de dissuader Ouattara de se présenter à la présidentielle ivoirienne du 31 octobre dernier. « Je lui ai dit ce que je pensais et j’ai entendu ses arguments et son inquiétude pour la stabilité du pays. Il a considéré qu’il était de son devoir d’y aller et qu’il ne pouvait reporter l’élection », fait-il savoir, non sans rappeler quelques préalables.
En effet, Emmanuel Macron pense qu’Alassane Ouattara doit réussir à se réconcilier avec les grandes figures de la politique ivoirienne. « Les initiatives prises à l’égard d’Henri Konan Bédié sont, à cet égard, importantes, de même que les gestes à l’intention de Laurent Gbagbo. Mais il faudra quoiqu’il arrive favoriser un renouvellement générationnel », a-t-il conseillé.