Au Sénégal, les agro-industriels se sont engagés à la mi-février à acheter 5 000 tonnes de maïs cette année auprès des producteurs locaux, dans le cadre d’un protocole d’accord pour donner un coup de pouce à la commercialisation de la céréale. Il s’agit de la dernière mesure en date pour relancer une filière encore en dessous de son potentiel. Eclairage.
Quelle place occupe le maïs au Sénégal ?
Moins mis en avant que le riz, denrée reine dans les assiettes des ménages sénégalais, le maïs n’en demeure pas moins une composante essentielle dans le paysage céréalier du pays de la Teranga.
Selon une étude de l’Initiative prospective agricole et rurale (IPAR) parue en 2021, il s’agit de la troisième céréale la plus consommée par tête après le riz et le mil avec 9,2 kg par an principalement dans les zones rurales du sud du Bassin arachidier et dans l’est du pays.
Du point de vue de l’offre, le maïs occupe aussi le 3e rang en volume derrière ces deux céréales avec une production de 855 000 tonnes en 2023/2024, selon le dernier Bulletin mensuel des statistiques économiques et financières publié par l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD) en janvier 2025.
Pourquoi les autorités veulent relancer la filière
Si le maïs local bénéficie d’un regain d’intérêt, c’est parce que le gouvernement a affiché son intention de réduire les dépenses consacrées à l’achat de la céréale depuis l’Argentine et le Brésil.
Dans le pays, la demande en maïs a fortement augmenté avec le développement du sous-secteur avicole. Depuis l’interdiction des importations de viande de volaille en 2005, la production commerciale de poulet de chair a explosé, entraînant un besoin croissant dans la céréale qui est la principale composante des aliments pour animaux.
Avec la récolte en maïs qui demeure insuffisante, les industriels ont augmenté le recours aux importations sur la dernière décennie. Selon les données de l’ANSD compilées par l’Agence Ecofin, les achats en volume et en valeur ont plus que triplé depuis 2013, passant de 132 429 tonnes à 430 863 tonnes en 2023 et de 21,8 milliards FCFA (36,2 millions $) à 82,5 milliards FCFA.
Dans le pays, la production d’aliments pour animaux est estimée à 300 000 tonnes chaque année selon les données du Forum for Agricultural Research in Africa (FARA).
Le marché est dominé par la Sedima, FKS Mills, NMA Sanders ainsi qu’Olam qui a achevé en mars 2024, l’acquisition pour 17 millions d’euros d’Avisen Sarl, second plus important acteur sur le marché avec son unité de production de 100 000 tonnes/an basée à Rufisque.
Quelles sont les mesures de soutien prévues ?
Dans un contexte où les perspectives du secteur avicole sont positives pour les prochaines années, l’enjeu est pour les autorités non seulement de limiter les sorties en devises, mais aussi de faire profiter l’ensemble de la filière maïs de la demande croissante des usines installées dans le pays en matières premières.
Déjà dans le cadre de l’accord avec les producteurs, les industriels se sont engagés à verser 225 FCFA pour chaque kg de maïs acheté auprès des producteurs contre 198 FCFA pour la même quantité importée. L’objectif affiché est de faire passer le volume d’approvisionnement local à 10 000 tonnes, d’ici 2026.
En dehors de la contractualisation qui vise à juguler le problème de l’écoulement des stocks soulevé depuis plusieurs années par les associations des producteurs, les autorités entendent aussi augmenter durablement la productivité.
En 2023/2024, le rendement en maïs a enregistré une hausse en glissement annuel de 8 % à 3 tonnes par hectare, soit la seconde plus forte progression dans le secteur céréalier. Cependant, cette productivité peut encore être améliorée selon le gouvernement qui compte introduire des semences hybrides et améliorer l’appui aux producteurs afin d’augmenter les rendements.
Au Brésil et en Argentine, les principaux fournisseurs du pays, les rendements à l’hectare varient de 5 à 8 tonnes d’après le Département américain de l’agriculture (USDA).