L’Organisation internationale du travail recommande d’investir au moins 1 % du PIB dans les politiques publiques dans l’éducation préscolaire des enfants, un seuil qui n’est pas encore atteint en Afrique. Cela place de manière disproportionnée la responsabilité des soins aux enfants sur les femmes.
La hausse des dépenses publiques consacrées à la garde d’enfants et à la petite enfance peut créer des millions de nouveaux emplois dans quatre pays africains d’ici 2030, dont 65 % profiteraient à des femmes. C’est ce que révèle un rapport du Center for Global Development publié en décembre 2024 et mettant en lumière l’importance de ces investissements pour l’autonomisation économique des femmes au Rwanda, au Kenya, en Côte d’Ivoire et au Sénégal.
Intitulé « Childcare and Early Childhood Development Expenditures in Africa: Comparative Policy Insights for Advancing Women’s Economic Empowerment », le document souligne que ces pays allouent actuellement moins de 0,2 % de leur PIB à l’éducation préscolaire, bien en deçà du seuil de 1 % recommandé par l’Organisation internationale du travail (OIT). Le Rwanda y consacre 0,12 % de son PIB, contre 0,1 % au Sénégal. La Côte d’Ivoire arrive en dernier avec 0,05 %, derrière le Kenya qui consacre 0,08 % de son PIB à l’éducation préscolaire.
L’étude simule une augmentation des investissements pour combler les lacunes d’ici 2030 et 2035. Par exemple, en consacrant 3,96 % de son PIB à l’éducation préscolaire d’ici 2030, le Rwanda pourrait créer plus de 777 000 emplois. La Côte d’Ivoire pourrait en générer 1,2 million, tandis que le Sénégal atteindrait près de 900 000 emplois. Ces investissements réduiraient également les écarts salariaux de 4,65 % à 33,62 %, selon les pays
Simulation de l’impact d’une hausse des dépenses publiques
Ces chiffres s’expliquent par la quasi-inexistence de systèmes publics de soins pour les enfants de moins de trois ans dans les quatre pays étudiés. Le fardeau des soins non rémunérés repose principalement sur les femmes, les privant souvent d’opportunités économiques et les confinant à des emplois précaires ou à une absence totale de participation au marché du travail. Un rapport de la Banque mondiale publié en novembre 2024 montre par exemple qu’en Ouganda, 83 % des femmes accomplissent des tâches de soin non rémunérées contre 53 % pour les hommes.
Il faut cependant souligner que la garde des enfants n’est que l’un des nombreux freins à l’autonomisation économique des femmes dans plusieurs pays africains. L’amélioration de la situation dans ce secteur ne suffirait donc pas à résorber définitivement les écarts avec les hommes. Un tel succès nécessite des réformes plus larges pour s’attaquer à d’autres obstacles structurels.
Parmi ceux-ci figure la surreprésentation des femmes dans des emplois vulnérables du secteur informel, où elles n’ont souvent pas accès à des contrats, à une sécurité sociale ou à des conditions de travail décentes. Selon un rapport de la Banque africaine de développement paru en novembre 2024, 56,6 % des femmes africaines sont engagées dans des emplois précaires.
Les normes sociales discriminatoires continuent également de limiter l’accès des femmes à des secteurs mieux rémunérés. Seulement 7,7 % des emplois industriels en Afrique sont occupés par des femmes, malgré leur rôle majoritaire dans l’agriculture et le commerce de détail, indique aussi le même rapport.