Ses recommandations étaient suivies d’effets immédiats. Véridique, désintéressé et ouvert, l’ancien khalife général des Tidiane Mame Abdou Aziz Sy Dabakh jouait un rôle prépondérant dans l’équilibre social du Sénégal. 27 après sa disparition, le Sénégal pleure toujours sa voix médiane.
Lors des évènements malheureux du mois de mars dernier où le Sénégal a failli basculer dans le chaos, la médiation des chefs religieux du pays a été d’un grand apport pour l’apaisement et la pacification de la situation. Un rôle que ces guides ont longtemps joué pour préserver et perpétuer l’exception sénégalaise.
Et un homme d’entre eux a écrit son nom : Mame Abdou Aziz Sy Dabakh. Né en 1904, ce vénéré fils d’El Hadji Malick Sy, mis sur orbite soudaine pour devenir le Khalife général des Tidianes en 1957 après les rappels à Dieu presque simultanément de ses deux grands frères Serigne Babacar Sy et Serigne Mansour Sy (père de l’actuel khalife Serigne Babacar Sy Mansour ), était une figure religieuse attachante et faisait l’unanimité autour de sa personne.
Avec sa voix unique, à la fois mélodieuse, attirante et tranchante, ‘’Mame Abdou’’ comme l’appelaient les Sénégalais, ne tergiversait pas lorsqu’il s’agissait de parler des maux de la société de recadrer les hommes politiques. Son seul meilleur ami : La vérité. Celui qui a eu la chance de passer de maître en maître, mais le tout au sein de l’Université de Tivaouane où il a été formé intégralement aux sciences islamiques, avait fini par instaurer une loi impartiale et impersonnelle en matière de vérité. «Quelle coïncidence en ce 14 septembre 2017 que la commémoration du vingtième anniversaire du rappel à Dieu de Mame Abdou Aziz Sy Dabakh, qui fut khalife général des Tidianes, se déroule le même jour que l’installation de la 13ème Législature issue des élections du 30 juillet dernier ! Si cette coïncidence est à ce point saisissante, c’est essentiellement dû au message que le saint homme adressait aux parlementaires, comme en un rappel à l’ordre, on ne peut plus explicite pour que, de façon intemporelle, ils ne perdent jamais de vue le sens de leur obligation d’élus du Peuple. Le message est si chargé de sens, surtout à l’heure actuelle, qu’il a été à juste raison passé en boucle sur des chaînes de télévision et les ondes de radio.
A lui tout seul, il pourrait servir de code de conduite à des élus qui ne sauraient pas pourquoi ils sont à leur poste de représentants du Peuple», soutenait le chercheur Abou Bakr Moreau, dans un article très repris avant de signaler que «dans un message laissé à la postérité et appelé à demeurer, Mame Abdou Aziz Sy s’est fait plus homme d’Etat que tous les hommes dits d’Etat qui, très souvent, ne pensent qu’à la prochaine élection.
Mame Abdou Aziz Sy Dabakh s’est fait homme d’Etat plus que tous les hommes dits d’Etat que nous avons jamais connus», renchérissait l’enseignant à l’Ucad. Difficile ne pas acquiescer eu égard à la dimension de ce grand homme de Dieu. Il entretenait des relations cordiales avec toutes les confréries, organisations religieuses, mais aussi l’Eglise. D’une simplicité et d’un franc-parler légendaires, le fils d’El hadji Malick était un régulateur hors pair. Le sermon qu’il a tenu lors du décès de l’avocat et ancien président de l’Assemblée nationale, Lamine Guèye, est entré dans les annales de l’histoire.
En tirant sa révérence le 14 septembre 1997, Mame Abdou laisse une nation orpheline. Sa parole manque aux Sénégalais. Et pour s’en convaincre, à chaque fois que le pays connaît des soubresauts, ses prêches sont repris en boucle pour apaiser les Sénégalais. Et comme l’a dit un jour le professeur Abdou Aziz Kébé sur Pr Barham Diop : «Mame Abou est venu, il a vécu, il a convaincu».