Le chef de la diplomatie italienne estime que le changement climatique est en train de détruire l’agriculture dans de nombreux pays du continent, et d’alimenter les flux migratoires vers l’Europe.
Le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani (photo), a appelé, dimanche 26 mars, l’Union européenne (UE), l’Organisation des Nations unies et le Fonds monétaire international (FMI) à lancer un programme d’aide au développement semblable au Plan Marshall en faveur de l’Afrique, pour faire face au changement climatique qui alimente les flux migratoires vers l’Europe.
« Nous avons besoin d’une intervention stratégique pour l’Afrique. Le changement climatique détruit l’agriculture dans de nombreux pays du continent et si nous n’intervenons pas avec une sorte de plan Marshall, nous serons toujours en train de courir après les urgences. Il existe une situation d’instabilité croissante qui doit faire l’objet d’interventions à long terme, non seulement de la part de l’UE, mais aussi des Nations unies et du FMI », a-t-il souligné dans une interview accordée au média Corriere della Sera.
Le chef de la diplomatie italienne a également plaidé pour le « renforcement des structures institutionnelles » dans les pays d’Afrique du Nord afin de mieux gérer les flux migratoires. « Le problème n’est pas seulement au Sahel. Stabiliser et renforcer les structures institutionnelles des Etats d’Afrique du Nord sert nombreux objectifs : sauver des vies, mieux gérer les flux migratoires et lutter contre les trafics des organisations criminelles », a-t-il dit.
M. Tajani a d’autre part réitéré son appel à l’UE et au FMI pour soutenir la Tunisie et éviter une déstabilisation de ce pays d’Afrique du Nord qui entraînerait un afflux massif des migrants vers l’Europe.
« On ne peut pas commettre l’erreur d’abandonner la Tunisie. Tout le monde bouge. Ne commettons pas l’erreur de laisser la Tunisie aux Frères musulmans […] Nous sommes favorables à une solution de compromis : apporter un soutien initial, car les Tunisiens affirment que sans argent, ils ne peuvent pas engager des réformes. Si l’UE ou le FMI n’interviennent pas et que la Chine ou la Russie interviennent, comment va-t-on l’expliquer ? », a-t-il martelé.
Le ministre italien des Affaires étrangères avait déjà exhorté, à mi-mars, le FMI à « faire preuve de souplesse » afin d’éviter un éventuel effondrement financier de la Tunisie, un pays dont les 1 300 km de côtes servent de point de départ vers l’Europe pour des milliers de migrants locaux et originaires de l’Afrique subsaharienne.
Selon les données du ministère italien de l’Intérieur, plus de 20 000 migrants clandestins sont arrivés en Italie depuis le début de l’année en cours, contre 6 100 durant la même période de 2022.
Des données des Nations unies révèlent aussi que quelque 12 000 personnes parmi les migrants irréguliers qui ont atteint l’Italie depuis le début de l’année étaient parties depuis les côtes tunisiennes, contre 1 300 au cours de la même période de 2022, ce qui représente un profond changement dans les routes migratoires suivies durant les précédentes années quand la Libye était le principal point de départ des migrants.
Cette hausse du nombre des migrants irréguliers représente un problème majeur pour le gouvernement de la Première ministre italienne Giorgia Meloni, qui a été élue sur un programme résolument anti-immigration.
La Tunisie avait signé en octobre 2022 un accord préliminaire avec le FMI sur un programme d’aide de 1,9 milliard de dollars en contrepartie de réformes économiques portant notamment sur la levée progressive des subventions aux produits de base, la réduction de la masse salariale dans le secteur public et la cession de plusieurs entreprises détenues par l’Etat. Mais peu de progrès ont été accomplis par Tunis dans la mise en œuvre de ces réformes dans un contexte de crise politique, d’envolée de l’inflation et de désaccords profonds avec l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), la principale organisation syndicale du pays.