Des experts des droits de l’homme de l’ONU ont dénoncé vendredi une forte augmentation de l’utilisation d’un mot raciste sur Twitter après la récente acquisition de cette compagnie par Elon Musk et appelé les entreprises de réseaux sociaux à « assumer plus profondément leurs responsabilités face aux manifestations de haine envers les personnes d’ascendance africaine ».
Dans un communiqué conjoint, ces experts* ont noté que durant les premiers jours suivant l’acquisition de Twitter, le Network Contagion Research Institute de l’Université Rutgers avait observé une augmentation de 500% de l’utilisation du mot haineux et raciste commençant par la lettre « N » sur la plate-forme par rapport à la période précédente.
En dépit des déclarations de Twitter, qui attribuent ces abus à une campagne de trolls en réitérant « qu’il n’y a pas de place pour la haine » sur ce réseau, ces experts ont jugé ces manifestations haineuses assez préoccupantes pour « mériter une réponse urgente centrée sur les droits de l’homme » de la part des entreprises de réseaux sociaux.
Rappelant que d’autres géants des réseaux sociaux comme Meta sont tout aussi concernés, les mêmes observateurs déplorent le fossé qui sépare les engagements des entreprises à lutter contre les discours de haine et la mise en œuvre effective de ces politiques sur les sites, comme le démontre à leurs yeux l’approbation de publicités incendiaires, parfois impossibles à bloquer, la diffusion de désinformation électorale et de théories du complot sur Facebook.
L’arbitraire et l’attrait du profit entravent la surveillance des réseaux sociaux
Les experts saluent toutefois comme une « étape importante » la création par Meta en 2020, en réponse à de nombreuses plaintes, d’un conseil de surveillance composé d’experts dans divers domaines habilités à prendre des décisions en toute indépendance et à émettre des recommandations sur les politiques de contenus de Facebook et Instagram. Mais ils rappellent que l’efficacité de ce conseil ne peut être évaluée qu’à long terme et nécessitera un engagement constant au plus haut niveau des réseaux sociaux pour examiner et modifier leurs mécanismes de lutte contre l’incitation à la haine raciale en ligne.
Selon eux, il existe un risque que « l’arbitraire et l’attrait du profit entravent les mécanismes de surveillance et de réglementation des réseaux sociaux ».
Perte de confiance des communautés marginalisées
Selon eux, la complaisance envers ces incitations à la haine contre les personnes d’ascendance africaine ou d’autres groupes marginalisés constitue à la fois un encouragement aux auteurs de ces actes et une source de stress traumatique chronique lié à la race.
Les experts de l’ONU évoquent ainsi les effets cumulatifs du racisme sur la santé mentale et physique des personnes, sur la perte de confiance de ces communautés envers les réseaux sociaux et la quête de justice, et s’inquiètent particulièrement du sort des jeunes qui passent une part importante de leur vie dans le cyberespace et dont les expériences acquises sur les plateformes en ligne façonnent souvent leurs valeurs personnelles, leurs attitudes et leurs actes.