Depuis les années 2000 coïncidant avec la première alternance démocratique du Sénégal, l’action militante est envahie d’une ambition parfois débordante. En lieu et place d’un engagement bénévole basé sur une aspiration profonde à exercer le pouvoir au nom de principes et valeurs reconnus, le militantisme est perçu comme une méthode de promotion et d’accaparement des instances de décision.
Cette tendance s’est exacerbée avec la survenue de la seconde alternance qui a consacré l’existence d’une des coalitions politiques les plus endurantes: celle qu’on pourrait dénommer la Grande Majorité Présidentielle.
D’abord il est important de tenter une définition du militantisme: «Le militantisme est un engagement associatif ou politique en faveur d’une cause qui vous tient à cœur. Ainsi, vous donnez de votre temps à une organisation en tant que bénévole, dans le but de valoriser, interpeller voir rallier les citoyens aux actions de l’association.»
Cette définition est actuellement vite dépassée, d’abord à la place d’un «bénévolat», les militants ne s’engagent plus sur la base d’une aspiration ou obédience ou idéal mais plutôt sur la base d’un «copinage» basé sur des intérêts matériels. À partir de ce moment:
«L’existence de rétributions du militantisme est une hypothèse sociologique. Elle fournit des instruments de rupture avec les explications spontanées, souvent naïves et intéressées, des activités militantes.»
Sur la base de ce qui précède, les militants sont en droit de revendiquer une rétribution à leur action militante. On sait qu’en ce moment le principe de l’offre n’est pas égale à la demande, difficile de recourir à des termes de référence précis pour chaque position à pourvoir. Qu’adviendra t’il de l’élite technocrate issue des grandes écoles ou tout simplement de l’électeur qui vote?
«La sociologie des rétributions du militantisme est une contribution à l’analyse sociologique de l’autonomie relative du politique. Les partis sont des entreprises d’intérêts. Ils prennent en charge les intérêts sociaux « externes », par exemple ceux de leurs électeurs, – qui sont aussi ceux de leurs adhérents – comme par surcroît, dans la logique et les limites de leurs intérêts propres. Les militants sont partie-prenante de ces entreprises d’intérêts. La prise en compte des rétributions du militantisme est, en ce sens, une généralisation de la théorie du politique d’inspiration wébérienne. Les militants contribuent aux activités des partis, comme par surcroît, dans la logique et les limites de leurs rétributions.»
Il est alors établi que le militant n’a pas tort d’exiger une position surtout que parfois il y dépend de la «fidélisation» d’une base affective. À tort peut-être on les appelle à la retenue devant l’intérêt supérieur de la communauté.
L’hypothèse de rétributions du militantisme revêtait par le passé et revêt encore, bien que de manière sans doute affaiblie, des connotations iconoclastes et hérétiques auprès des militants et aussi, par extension, dans certains milieux académiques. Des résistances affleurent sous des objections d’allure théorique. L’analyse des rétributions serait partielle et partiale. Elle conduirait à négliger d’autres dimensions comme :la constitution de collectivités identifiantes,les passions, les émotions et les affections, ou les bonheurs du don de soi. Elle s’inscrirait dans une étroite anthropologie utilitariste et machiavélienne et reprendrait à son compte la vision simpliste d’un homo economicus calculateur.Ces objections reposent sur des incompréhensions de l’économie symbolique du militantisme et sur des malentendus plus ou moins intéressés.
Dorénavant, aucune règle de vie collective ne permettrait que les militants au demeurant avec une valeur intellectuelle et organisationnelle limitée d’être dépositaire des positions de toute la nation. Certes l’engagement politique est révélateur mais le principe de la continuité et de la «sacralitè» du bien commun est supérieur à toute autre idée.
Il ne faut pas oublier de relever que l’adhésion à une organisation politique est parfois dérivée de la matrice militant-parti. Aucune rigueur sur la déontologie, la moralité, ou les aptitudes professionnelles ne sont pas exigées au top go. D’ailleurs c’est un secret de polichinelles de dire que bon nombres d’adhérents dans les partis politiques sont incultes. La formation qui devrait compenser cette absence de rigueur dans le recrutement n’est pas de mise( exceptionnellement dans certaines formations politiques).
Aucune reference académique ou sociale ne renseigne sur une supposée rétribution de militants surtout celle de «militant de première heure». En définitive les postes et responsabilités publiques appartiennent à toute la nation sénégalaise.
Je voudrais emboîter le pas sur un autre phénomène qui surgit fréquemment quand un détenteur ou détentrice de responsabilité publique de la confiance du PR est remercié(e) pour une raison telle ou autre.
Un tel avènement anodin ne doit pas être à l’origine de déballage ou d’ostracisme si l’on sait que les promotions souvent sont opérées devant un pléthore de citoyens parfois plus compétents. Cette manière de se révéler à l’opinion est honteuse et parfois prétexte d’un ralliement basé sur l’empressement.
Les cas foisonnent avec les illustrations au lendemain des remaniements ministériels ou après les décisions individuelles relevant du communiqué des conseils des ministres , c’est tout simplement une abomination.
Banda DIOP
Médiateur des Banques
Maire de la patte d’oie 2014-2022
Membre de la Grande Mouvance Présidentiell