Entre l’enclume du bouillonnement du front social miné par les revendications des organisations de travailleurs et le marteau d’une majorité parlementaire qui ne tient qu’à un député, Macky Sall n’a plus les rênes de sa gouvernance pour les dix-huit mois qui lui restent à la tête du pouvoir exécutif. En effet, pour terminer tranquillement ce dernier mandat, il est obligé de jouer la carte de la compromission non seulement avec des responsables de son parti, l’Alliance pour la République, élus députés et qui aspirent à sa succession mais aussi avec des alliés.
Les dix-huit mois qui restent au Président Macky Sall à la tête du pouvoir exécutif risquent d’être tout sauf un long fleuve tranquille. En effet, sans Premier ministre, avec un gouvernement mis en hibernation par un président de la République qui a suspendu les réunions du Conseil des ministres depuis le 4 août dernier, le Sénégal, tel un navire sans pilote, sombre petit à petit dans une impasse. Sur le plan social, sous l’effet de l’inflation généralisée des prix de consommation et de services, le pays tout entier vit au rythme du bouillonnement du front social alimenté par les revendications des organisations de travailleurs. Dans tous les secteurs publics, des agents montent de plus en plus au créneau pour réclamer des augmentations de salaires.
Plus radicaux, certains sont même allés jusqu’à brandir des menaces de perturbation du fonctionnement de l’Administration publique sénégalaise si leurs doléances ne sont pas satisfaites. C’est le cas des agents des ministères (des Pêches et de l’Économie maritime, de l’Agriculture et de l’Équipement rural, de l’Élevage, du Tourisme et des Transports aériens, de la Fonction publique, du Travail, de l’Emploi, de l’Enseignement supérieur, de l’Urbanisme, de la Justice et des Collectivités locales pour ne citer que ceux-là.
Sur le plan politique, les signaux sont tout sauf reluisants pour l’actuel chef de l’Etat. En effet, avec une majorité parlementaire relativement instable de 83 députés contre 82 pour l’opposition et les non-inscrits réunis, le Président Macky Sall n’a plus en main la situation. Après dix ans et 5 mois environ de gestion solitaire du pouvoir marquée par une double politique d’aliénation des alliés de Benno Bokk Yakaar et « de réduction de l’opposition à sa plus simple expression » à travers l’élimination systématique de potentiels adversaires politiques, Macky Sall semble, aujourd’hui subir les contrecoups de sa gouvernance. Benno Bokk Yakaar qui a battu le record de longévité de toutes les coalitions politiques au Sénégal et sur qui le chef de l’Etat s’est toujours appuyé pour faire passer sans problème ses réformes malgré les contestations de l’opposition soutenue parfois par une partie de la société, n’est plus que l’ombre d’elle-même.
Entre l’enclume du bouillonnement du front social alimenté par les revendications des organisations de travailleurs et le marteau d’une majorité parlementaire qui ne tient qu’à un député, Macky Sall est donc obligé de jouer la carte de la compromission avec des responsables de son parti, l’Alliance pour la République élus députés et qui aspirent lui succéder. Ceci pour éviter à tout prix un malentendu qui risque de réduire à néant ses efforts consentis dans le débauchage de Pape Diop, tête de liste de la coalition Bokk Gis Gis Liggey qui lui a permis d’avoir la majorité à l’Assemblée nationale.