Ce trouble du langage peut être la conséquence d’un AVC, d’un traumatisme crânien ou encore d’une maladie neurodégénérative
Mercredi 30 mars, les proches de Bruce Willis ont annoncé que l’acteur mettait fin à sa carrière en raison d’une aphasie. Cette nouvelle met en lumière ce trouble du langage peu connu qui touche pourtant plus de 300 000 Français. « L’aphasie désigne une atteinte totale ou partielle du langage consécutive à une lésion cérébrale », souligne le Dr Benoît Guillon, praticien hospitalier neurologie de l’unité neurovasculaire du CHU de Nantes. En fonction du degré de la maladie, la personne aphasique éprouve des difficultés à parler, comprendre, lire ou écrire. Ou tout à la fois.
Pour le patient, des gestes évidents du quotidien comme discuter avec son entourage, regarder la télévision, écouter la radio ou lire le journal deviennent difficiles, voire impossibles. Il existe plusieurs formes d’aphasie en fonction de la zone du cerveau touchée. « Dans le cas d’une aphasie de Broca, le patient ne peut quasiment plus parler ni écrire, mais comprend tout. D’autres patients souffrent d’une aphasie de Wernicke. Eux parviennent à parler, mais transforment les mots, ils jargonnent et deviennent alors difficiles à comprendre pour l’entourage », détaille le neurologue. L’atteinte globale, la forme plus sévère de l’aphasie, cause d’intenses difficultés pour parler, écrire et comprendre.
L’AVC, cause fréquente d’aphasie
Si la famille de Bruce Willis n’a pas détaillé la cause de son aphasie, elles peuvent être nombreuses. « Le langage est une fonction latéralisée, gérée par l’hémisphère gauche du cerveau. Chez certains patients, l’aphasie survient brutalement après un accident vasculaire cérébral », explique le Dr Guillon. Avant de compléter : « L’aphasie peut également résulter d’un traumatisme crânien. Dans d’autres situations, son apparition est plus progressive comme c’est notamment le cas avec une tumeur cérébrale. »
Une maladie neurodégénérative peut également provoquer une aphasie. « Dans certaines formes de démence, la maladie s’installe progressivement dans la zone du langage. On parle alors d’une aphasie primaire progressive », décrit le neurologue. « Attention, l’aphasie n’est en aucun cas un trouble psychologique ou un handicap mental. Les capacités intellectuelles de la personne aphasique sont préservées. Il n’est pas question de surdité ni de problèmes de voix. La personne aphasique conserve sa sensibilité et son intelligence », recadre le Dr Jean-Dominique Journet, président de la Fédération nationale des aphasiques de France. D’autres troubles peuvent accompagner l’aphasie comme une paralysie de la moitié du visage, une perte de la force musculaire, des troubles de la sensibilité, des troubles de la déglutition ou la difficulté à réaliser certains gestes.
Une prise en charge orthophonique
Actuellement, il n’existe pas de médicament pour soulager l’aphasie. La seule prise en charge contre ce trouble du langage repose sur une rééducation orthophonique. « Dès l’apparition de l’aphasie, il est nécessaire de réaliser un bilan complet orthophonique afin d’identifier précisément la forme et l’intensité du trouble. Dans le cas d’un AVC, une fois la phase aiguë passée, l’aphasie est souvent stabilisée, ce qui permet de voir des progrès », encourage le neurologue. La prise en charge orthophonique est adaptée à chaque patient. Elle repose sur différents aspects allant de l’articulation à la lecture en passant par la compréhension. L’objectif est de redonner au patient des capacités de communication afin d’échanger avec l’entourage.https://d-5527954844092912039.ampproject.net/2203172113000/frame.html
« L’aphasie est un handicap de communication, les patients se retrouvent souvent isolés. Ils ont besoin d’aide pour sortir de leur souffrance psychique. Pour cela, le seul interlocuteur pertinent est l’orthophoniste, mais nous en manquons cruellement en France », regrette le président de la Fédération nationale des aphasiques de France. Depuis 1985, la Fédération œuvre pour sensibiliser et former gratuitement les aidants en organisant de nombreux ateliers dans tout le pays. Une semaine de sensibilisation à l’aphasie est d’ailleurs prévue dans de nombreuses villes entre le 17 et le 22 octobre 2022.