« Le Palais des Rois » est l’œuvre du Sultan Ibrahim ou roi Njoya, 17ème de la dynastie du royaume de Bamum, vers les années 1917-1918. Il abrite également le musée, le service administratif du palais et l’une des résidences de l’actuel roi Mforifoum Mbombo Mjoya Muhammed Nabil, âgé de 28 ans.
FOUMBAN (CAMEROUN) – Des trophées de chasse, des lances, des flèches, des arcs, des boucliers en peau de buffle, des fusils, des tableaux représentant les 20 sultans du royaume des Bamum ! Voilà une partie du trésor caché dans le Palais des Rois Bamum. Construit par le roi Njoya ou sultan Ibrahim vers les années 1917-1918, le palais est au cœur de la ville de Foumban. Une localité d’une superficie de 7.687 km2 soit 54 % de celle totale de la région de l’Ouest du Cameroun évaluée à 13.890 km2 et qui est située à 70 km de Bafoussam. Devant le Palais, sont exposées tout le long d’un mur imposant, les photos des rois de la dynastie Bamum de Nshare Yen son fondateur, à Ngouopou, Monjou, Mengap, Ngouh 1, Ngouh 2, Ngapna, Ngouloure, Kouotou, Mbouombouo, Gbetnkom, Mbienkouo, Ngouhouo, Ngoungoure Shetfon, Nsangou, Njoya Ibrahim le bâtisseur du palais, Njimoluh Njoya et le défunt roi Mbombo Njoya. Ce dernier remplacé par son fils Mforifoum Mbombo Mjoya Muhammed Nabil âgé juste de 28 ans, a régné de 1992 à 2020. À l’intérieur du Palais, se dresse un musée qui raconte toute l’histoire de ce peuple guerrier à travers des images, des œuvres d’arts, des masques et livres.
Selon Alydou Njikam, l’un des médiateurs culturels du Palais, le royaume Bamoun a été fondé par Nshare Yen au 14ème siècle, vers 1394. Ce dernier venait du Nord du Cameroun et était d’origine Etikar. Mais l’emblème du serpent à double tête, de l’araignée et de la cloche qui est presque dans tous les compartiments du Palais a été inventé par le 11ème roi Mbouombouo. «L’araignée, c’est le symbole du travail et de la sagesse. Le serpent à deux têtes signifie la victoire des deux fronts. Le 11ème roi avait été attaqué à l’est et l’ouest par des troupes ennemies et sa stratégie de guerre c’était de diviser son armée en deux pour pouvoir contre-attaquer simultanément sur les deux fronts. C’est ainsi qu’il avait pu remporter la guerre ; donc c’est le symbole de la vigilance aussi et de la puissance», explique Alydou Mjikam. La double cloche, elle, représente un instrument de rassemblement, de cohésion sociale. Elle avait aussi une fonction guerrière parce qu’elle était utilisée pour galvaniser les combattants à l’époque. «Pour sa fonction festive, seul le roi est amené à jouer de cet instrument de musique, le dernier jour de la grande fête que nous célébrons tous les deux ans et qui va toujours du vendredi au dimanche», fait savoir le vieux guide.
Le jugement des rois
Le jugement se passe, en effet, tous les deux ans dans la ville de Foumban, pendant une grande fête traditionnelle et culturelle du peuple Bamum. Elle dure trois jours, du vendredi au dimanche, mais le samedi est le jour du jugement du roi. «Ça c’est l’un des aspects les plus forts de cette journée et une fois que les lanceurs de justice sont plantés, le roi se lève de son trône. Il est face à un réquisitoire, les membres de la société et porte-parole du peuple le jugent sur comment il a géré le royaume pendant les deux années passées», explique le médiateur culturel du Palais. Il faut aussi noter que pendant deux ou trois mois avant la célébration de la fête, les membres de la société font des investigations à travers le royaume pour recueillir les avis des uns et autres sur la manière dont le roi gère son trône. «Le jour du jugement, on lui rapportera toutes les plaintes et s’il arrive qu’il soit coupable de quoi que ce soit, alors il est sanctionné. Il va payer des amendes avant qu’on ne le remette sur le trône. C’est ça la démocratie», s’exclame Alydou Mjikam.
Cependant, à cause de la Covid, la fête n’a pas eu lieu depuis 2018. «On devait la faire en 2020 mais on n’a pu à cause de la Covid. On attend actuellement la décision du nouveau roi». Le 20ème roi de la dynastie a été, en effet, intronisé le 10 octobre dernier.
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Le roi Mbouombouo, un guerrier hors du commun
FOUMBAN (CAMEROUN) – L’histoire dit qu’il mesurait 2,60 m de taille. Et son portrait visible au Palais est énorme. De même que…sa pipe. Alydou Mjikam, l’un des médiateurs culturels du Palais, raconte que lorsque le roi Mbouombouo, 11ème de rang, voulait fumer, ce sont ses valets qui portaient sa pipe. C’est lui qui a étendu les limites du royaume de Bamum grâce à des multiples conquêtes, portant le territoire de 500 à 7700 km2. «C’était un géant guerrier. Après avoir pris le pouvoir, il a dit à la population et au peuple ennemi, «je poserai les limites de mon royaume avec du sang et du fer noir. La guerre, c’est mon affaire, lorsqu’on trace les frontières d’un pays avec la bouche, cela se passe toujours», raconte le guide. C’est donc grâce aux qualités de guerrier du 11ème roi de la dynastie Bamum, le royaume a connu sa plus grande expansion.
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L’inauguration du nouveau musée des rois Bamum très attendue
FOUMBAN (CAMEROUN) – La construction du nouveau musée a débuté en 2014 et a duré trois ans. C’est un bâtiment imposant R+3 avec une salle de conférence qui peut prendre jusqu’à 300 personnes. Il est décoré de deux têtes de serpent et la porte d’entrée date de 1915. «Les Bamums attendent avec impatience l’inauguration de ce nouveau musée», annonce Nji Ousseni Mongbet Nsangou, assistant du directeur chargé des affaires générales.
La première salle est dédiée à l’art contemporain, la deuxième à la dynastie des rois de Bamum. «La troisième salle est réservée au défunt sultan. Il est décédé avant l’inauguration. Actuellement, on attend l’ordre du nouveau roi puisque la cérémonie était prévue pour décembre 2021», explique Nji Ousseni Mongbet Nsangou. Selon lui, le musée représente l’histoire du peuple de Bamum symbolisée par le serpent à deux têtes, l’araignée et la double cloche. «C’est notre identité culturelle. Quand on parle de nous, on fait allusion à la vigilance, la puissance et la patrie. Les gens passent tout le temps ici pour prendre des photos. Ici, on n’invente pas l’histoire, tout ce qu’on raconte a été fait par le roi Ibrahim», soutient-il avec force.