Le capitaine Thomas Sankara est toujours adulé par la jeunesse africaine, 34 ans après sa disparition (il est assassiné le 15 octobre 1987). C’est peut-être dû, en partie, au fait que les préoccupations qui étaient les siennes, sont encore plus que jamais d’actualité.
Thomas Sankara était l’incarnation aboutie des profondes aspirations d’égalité, de libération et de justice des peuples africains. Il est de ces figures prophétiques capables de surmonter le temps, tant leur engagement et dévouement résistent. L’affaire est entendue, Capitaine Thomas est immortel.
En seulement quatre petites années à la tête de son pays, Sankara a su mieux inspirer plus que d’autres qui se sont éternisés au pouvoir. Le capitaine a vite compris que l’indépendance proclamée des pays africains ne coupait pas pour autant les liens qui les asservissent aux vieux empires coloniaux. D’où la nécessité d’une seconde révolution. À trente-trois ans, Sankara est déjà un personnage populaire. Son charisme attire les foules. Son discours de rupture interpelle des populations affamées de justice. La révolution est en marche. Le 4 août 1983, de jeunes militaires progressistes l’installent au pouvoir.
Campagne de lutte contre la corruption
Visionnaire, Sankara prend parti pour les plus faibles, encourage la promotion de l’économie locale, rejette les prêts de la Banque mondiale, met en avant l’autosuffisance alimentaire et la production textile. Le développement commençant par l’éducation, il positionne des programmes d’alphabétisation au cœur de l’action politique. Sankara promeut une véritable campagne de lutte contre la corruption dans la fonction publique.
Son programme : restituer sa dignité au peuple. Et pour bien marquer la rupture, il change le nom de la Haute-Volta, qui s’appellera désormais Burkina Faso («le pays des hommes intègres»). En s’appuyant sur le modèle cubain, il met sur pied des Comités de défense de la révolution (CDR), tout en exhortant l’unité des nations africaines.
Devant l’Assemblée nationale des Nations unies à New York, en octobre 1984, Sankara dénonce l’ordre mondial établi : «Il faut proclamer qu’il ne peut y avoir de salut pour nos peuples que si nous tournons radicalement le dos à tous les modèles que tous les charlatans ont essayé de nous vendre vingt années durant. Il ne saurait y avoir pour nous de salut en dehors de ce refus-là. Pas de développement en dehors de cette rupture.»
En juillet 1987, au Sommet des États africains, à Addis Abeba, en Éthiopie, le capitaine demande aux pays du Tiers Monde de refuser de payer leurs dettes à la Banque mondiale. Le 15 octobre 1987, il est assassiné. Blaise Compaoré, le principal suspect dans son assassinat, prit le pouvoir, sans être inquiété par la justice. Il dirigea le Burkina pendant vingt-sept ans.