La période 2020/2021 sera sans nul doute associée aux années les plus sombres que l’humanité ait connues, un bouleversement mondial dû à la crise multiforme de la Covid 19, qui n’a pas encore fini de faire des vagues. Comme si cela n’était pas suffisant, une série de catastrophes naturelles s’ajoutent à liste déjà bien noire; dans nos pays pauvres, la poursuite du rêve européen avec son cortège de victimes, les crimes, les féminicides, les pratiques idolâtres et fétichistes en tout genre, ont fait très souvent les titres de la presse quotidienne…
Le mois de Mouharam qui marque le début de l’année musulmane doit être un moment de rétrospective et d’analyse sur les événements qui se sont déroulés au cours de l’année et le cas échéant en tirer les enseignements bénéfiques à notre évolution et nos projections futures. En effet, ce mois, un des quatre qu’Allah a décrété sacrés, par la nature et le poids des événements tragiques qui s’y sont déroulés, le martyr de l’imam Hussein, petit fils du prophète Mouhamad PSL et de ses compagnons au 10 ème jour, doit être un point de référence, une sorte de baromètre à travers lequel une évaluation de nos existences, doit être effectuée de manière cyclique.
Le soulèvement de l’imam Hussein pour préserver les fondements de l’islam face à un pouvoir oppressif et déviant, constitue l’échelle de valeur par laquelle tous les événements de la vie du musulman qu’ils soient petits ou grands doivent être sous pesés. Toute la terre est Karbala, tous les jours sont achoura. En tant que musulman, quelle a été notre posture au cours de l’année écoulée? Quel bilan en faire? Avons-nous suffisamment œuvré pour être aligné avec notre identité musulmane face aux événements en cours, comme Hussein et ses compagnons ? Ou nous sommes nous laissés aller ? Telles peuvent être les questions à se poser.
La cohérence peut être définie comme l’établissement d’un sens entre plusieurs éléments ou faits reliés les uns les autres ; ainsi sa quête peut être individuelle ou collective, voire même globale.
Face aux crises et bouleversements, des solutions sont proposées, on a très souvent entendu au cours de ces derniers mois se développer les concepts de résilience, d’agilité, de coaching, de développement personnel …tout un lexique qui caractérise des pratiques d’auto-prise en charge du sujet pour sortir de ses difficultés, qu’elles soient matérielles ou psychologiques. Mais tout cela ne s’adresse en réalité qu’au petit « moi » de l’individu et à bien y regarder il s’agit de positionner son égo, son nafs, de lui donner plus de poids face à l’autre ou à l’adversité. Ce qui peut sembler de prime abord très positif dans un sens, peut dans un autre, être contradictoire avec les enseignements de l’islam authentique, qui privilégie l’autre, c’est à dire le prochain, tel qu’enseigné par le prophète PSL, et sa sainte famille. Dès lors, face à la peur, au manque, à la détresse qui choisissons nous d’être ? Quel alignement réaliser, mettre en avant notre égo, ou être en concordance avec notre âme ? C’est tout le défi de la quête de cohérence entre notre identité, nos valeurs, nos actes en tant que croyant face à un quotidien éprouvant.
Les événements de Karbala, le sacrifice de Hussein pour préserver la droiture en interdisant le blâmable et en enjoignant le bien ; cette ligne de conduite tracée de manière si tragique et douloureuse doit rester gravée dans les esprits, en tant de paix ou de guerre. La conduite égotique reste illusoire, seule la transcendance par le retour à une spiritualité vraie et authentique à travers les Ahl Bayt constitue un socle solide et durable qui peut permettre à l’individu de traverser le plus sereinement possible les difficultés existentielles.
C’est l’arche du salut qu’Allah, avec le coran, nous a légué après le départ du Prophète PSL pour l’autre monde, afin de nous permettre d’atteindre la félicité ici-bas et dans l’au delà ; qu’est-ce la félicité si ce n’est harmonie et apaisement intérieur.
Quand le chaos s’établit et se propage de manière vertigineuse on ne peut trouver refuge que dans l’ordre déterminé par le Divin, l’imamat des Ahl bayt, qui est un retour aux véritables sources de l’Islam. Symbole de patience, de vertu, de dignité, d’honneur et de foi, le soulèvement de l’imam Hussein à Karbala est un cas d’école qui doit être convoqué à chaque instant de trouble afin de nous aligner avec notre âme et atteindre ainsi la plus haute conscience.
Alors, autant il ya une construction sémantique autour du « moi » pour favoriser son renforcement, autant il est nécessaire de réinventer un vocabulaire du Grand Soi ou de l’âme, qui se nourrit du partage, de l’amour inconditionnel, de l’amour du bien et surtout d’espoir et de paix. Les mots sont porteurs de sens, de contenus, de pratiques, d’énergies, de vibrations et de forces créatrices ; entrainons-nous à redécouvrir et mettre en pratique à travers les enseignements des imams infaillibles d’Ahl bayt le langage de l’Islam et du Coran. Langage qui, en réalité n’est que le langage du cœur ; ainsi, s’harmoniseraient nos pensées, nos actes et les murmures de notre cœur.
Ironie du sort (ou pas), le corona virus s’attaque à notre chakra du cœur, centre énergétique correspondant à notre poitrine et donc à notre appareil respiratoire ; ceci devrait nous interpeller et élargir notre manière d’appréhender cette crise sanitaire et l’œuvre de ce virus qui semble bien tirer avantage de la vulnérabilité de nos cœurs spirituels.
Par la grâce du Nom Divin Al Mu’id, le restaurateur, puissions-nous retrouver notre fitrât, cette nature originelle non corrompue. Exerçons nous à purifier nos cœurs par la pratique du pardon mutuel et allégeons nos fardeaux. Que la paix soit sur tous les musulmans du Monde.
Allahouma salli ala Mouhamad wa ali Mouhamad
Tahra Aida Diagne