Comme il fallait s’y attendre, la tension est à son comble, depuis l’arrestation du leader du Pastef, Ousmane Sonko. Il faudra souhaiter que la lucidité soit très rapidement retrouvée, par aussi bien ces milliers de jeunes qui déferlent dans les rues et brûlent, mais surtout par le pouvoir dont les erreurs récurrentes produisent aujourd’hui les fâcheuses conséquences qui menacent la stabilité de ce pays.
Le terreau étant bien fertile, l’embrasement n’en est que plus facile. A l’image de la mer dont on ne peut pas arrêter le mouvement par la seule action de ses bras, il est impossible de contenir ces jeunes qui disent n’avoir rien à perdre. Lorsqu’on en arrive à cette extrémité existentielle, à l’image des désespérés des océans qui jouent leur vie sur la balance de la chance, notre humanité peut facilement basculer vers des schémas de violence, d’extrême violence. Les images qui défilent sur la toile et donc voyagent partout dans le monde, ne sont pas belles. Elles renvoient au monde un visage hideux ; ce contre quoi on s’est battu toutes ces dernières années pour donner à la demoiselle Sénégal des semblants d’atours attrayants.
Ce qui est encore plus inquiétant, c’est l’absence de contre-feux. Sa Majesté s’est évertuée, ces dernières années, à casser tout ce qui pourrait se présenter devant elle pour lui contester la couronne. Et les fortes personnalités à même de jouer les médiateurs entre acteurs politiques sont méprisées. La conséquence est dramatique, puisque le voilà face au peuple qui, visiblement, a faim. Un an de Covid avec toutes les mesures drastiques, sans en mesurer la pertinence, ont appauvri des ménages entiers et installé une crise économique sans précédent. On n’a même plus besoin de sonder la crise qui est à fleur de ventre.
Certaines scènes de vandalisme constatées, surtout au niveau des centres commerciaux Auchan, sont plus la conséquence du désarroi des populations qui ont faim, que l’expression d’une quelconque haine contre la France.
L’heure est grave. Car, avec la situation qui prévaut en ce moment dans le pays, il est très difficile de savoir dans quelle direction va s’orienter le sens du feu. On compte déjà deux morts et des dizaines de blessés, aussi bien chez les manifestants que les forces de sécurité. Et personne ne sait aujourd’hui comment cette crise va se dénouer, avec d’autres manifestations attendues surtout à Dakar et au sud du pays.