Le sommeil des populations riveraines des bassins de rétention dans la commune de Diourbel est hanté par des reptiles (pythons et autres serpents) qui menacent leur quiétude et leur vie, faute d’entretien.
Le bassin découvert de 7 500 m2 offre sa gueule béante au visiteur. Défloré, exploré, épié, il est la principale attraction à Ndar Gou Ndaw, un sous-quartier de Keur Baye Laye, dans la commune de Diourbel. A l’intérieur, coule un fleuve nauséeux qui déborde de son lit et qui charrie bouteilles vides, planches en bois, déchets humains et détritus.
Des poteaux et des fils barbelés sont érigés en barrages «pour éviter que les enfants ne viennent s’aventurer aux alentours». Assis à quelques mètres de l’orifice, Moussa Diop assure la garde. L’odeur toxique et infecte dégagée par le bassin ne semble point le déranger. Il veille au grain devant la porte de sa maison située à 3 m du bassin.
Lunettes de vue sur le nez, short découvrant des mollets musclés, ce papa de cinq enfants cohabite à côté du bassin de rétention depuis son érection dans leur quartier. Buste bien droit, les coudes apposés sur une chaise en plastique, Moussa Diop, fourré dans un pantalon jean bleu et d’un t-shirt assorti, embraie : «Nos vies sont en danger permanent et nous vivons dans une insécurité totale parce que le bassin n’a pas de clôture. Nul ne disconvient qu’il existe dans ce bassin, des reptiles, comme les pythons et d’autres serpents. Tout récemment, on avait appelé les sapeurs-pompiers pour nous débarrasser d’un python qui finissait d’avaler un canard et qu’on a réussi à tuer.» Ployée sur sa marmite, sa femme remuant machinalement un bouillon à base de légumes à la saveur alléchante, acquiesce. Moussa en rajoute une couche : «Ce bassin n’est d’aucune utilité pour les populations qui vivent aux alentours, si aucun moyen n’est mis pour exploiter son potentiel en pisciculture, maraîchage etc.»
Selon lui, ce réceptacle naturel d’eaux pluviales devrait avoir des caniveaux pour les évacuer vers d’autres bassins en cas de remplissage. «Nos murs s’usent graduellement à cause de l’eau qui déborde de son lit en période d’hivernage. Ils risquent de s’effondrer à tout moment parce que la fondation tient à peine», lance-t-il. Ses propos trouvent écho dans ceux de sa voisine immédiate, Dieynaba Sarr. Tenancière d’une boutique qu’elle ferme à chaque fois que le ciel ouvre ces vannes, elle éructe : «Nous menons une vie difficile à cause de ce bassin. Nous sommes tous en danger, surtout durant l’hivernage avec ces reptiles qui viennent de partout», alerte-t-elle.
Cette quadragénaire, revenue de la Côte d’Ivoire depuis 14 ans, a la phobie des reptiles et rien qu’en abordant le sujet, ses cheveux se dressent sur sa tête. «Je peux tout supporter sauf les reptiles. On peut se protéger contre les moustiques en dormant sous une moustiquaire. Mais contre les serpents, je ne sais vraiment pas comment les éviter.» C’est le danger qui guette au quotidien les populations riveraines du bassin de rétention de Ndar Gou Ndaw. «Durant l’hivernage passée, 3 serpents ont été tués et les sapeurs-pompiers nous ont débarrassés de deux pythons, un le jour et l’autre la nuit. Ce bassin doit être doté d’un mur d’au moins un mètre surplombé de grillages et des bancs publics aux alentours», opine Ndèye Camara.
Trois serpents tués durant l’hivernage
Dans le département de Diourbel, la commune du même nom totalise, à elle seule, cinq bassins de rétention pour une superficie globale de 29 450 m2 sans compter le plus grand réceptacle d’eaux pluviales qu’est «Kamb Souf».
Ces réceptacles d’eaux, favorables à la reproduction des moustiques, sont aussi le nid des pythons et autres reptiles qui hantent le sommeil des populations riveraines. Le Conseil municipal a adopté un plan directeur d’assainissement qui prévoit d’interconnecter tous ces bassins pour acheminer toutes les eaux vers «Kamb Souf» qui doit d’abord être aménagé. «Tous ces bassins étaient clôturés, mais les grillages ont été enlevés. Depuis que les bassins ont été installés en 2008, il y a le fagotage des arbres, mais il n’y a pas eu de dragage», souligne Assane Faye, chef de la Division technique de la commune de Diourbel.
A la Direction régionale du développement rural (Drdr), rattachée au ministère de l’Agriculture et de l’équipement rural, le directeur Pierre Diouf recommande : «Ce qu’il y a lieu de faire, c’est d’aménager ces bassins et de les valoriser en nettoyant les ordures et les arbres. Ainsi, le cadre sera propice à l’élevage de poisson.» Une suggestion qui rencontre l’assentiment de Sidy Diop. «Ce serait la meilleure chose à faire, car chaque jour, nous risquons nos vies. La cohabitation avec ce bassin est très difficile, surtout en saison des pluies, à cause des pythons et autres serpents qui glissent dans nos maisons. Nos vies sont menacées. Le mieux serait de le clôturer. Nous ne nous en porterons que mieux.» S’il le dit !