Le président de la Gambie Adama Barrow a lancé samedi soir son parti, en vue de soutenir sa candidature à la présidentielle prévue dans dix mois. En 2016, il avait soutenu qu’il n’allait faire que trois ans au pouvoir avant d’organiser une nouvelle élection.
Énergie, agriculture, diplomatie, bonne gouvernance… Le président gambien s’est longuement épanché, samedi au stade de Bakau, sur ces sujets pour tenter de justifier pourquoi, il vient de lancer son parti le National Peoples Party (Npp, Parti national des peuples) en vue de l’élection présidentielle de son pays prévue en décembre prochain. Pourtant en 2016, lorsqu’il était à la tête de la coalition de partis ayant mis fin aux 22 ans de règne de Yahya Jammeh, Adama Barrow avait fait croire au monde entier qu’il n’allait passer que trois ans à la tête de la Gambie avant de remettre son mandat en jeu. Il a fait marche arrière depuis, manquant ainsi à son engagement initial qui a provoqué en décembre 2019 et janvier 2020 des manifestations marquées par des affrontements et des dizaines d’arrestations.
Le Parti démocratique unifié de l’opposant historique Ousseinou Darboe a aussi mis fin à son compagnonnage avec le président gambien… «Le Npp est le résultat de l’engagement à soutenir le changement qui a été apporté en 2016 et du tollé public pour la liberté, la justice, la paix, le progrès et la dignité, ainsi que pour les droits et libertés fondamentaux», a expliqué Adama Barrow devant des milliers de Gambiens ayant pris d’assaut le stade de Bakau, malgré les mesures de restriction dues à la pandémie de la Covid-19. Depuis son investiture à la tête de la Gambie, Adama Barrow a goûté donc les délices du pouvoir. Il maitrise maintenant les astuces politiques qui permettent à la plupart des présidents, surtout ceux d’Afrique, de se maintenir le plus longtemps que possible au pouvoir.
En 2020, l’Assemblée nationale gambienne a donné le quitus à Barrow afin qu’il puisse briguer un troisième mandant en cas de réélection. Les députés du pouvoir majoritaires à l’Assemblée nationale, le projet de nouvelle Constitution qui empêchait Adama Barrow de briguer un troisième mandat en cas de réélection était donc passé comme lettre à la poste. Ce projet vise à remplacer la Constitution de 1997 qui avait permis à Yahya Jammeh, arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 1994, de consolider sa mainmise sur la Gambie. Il est vrai qu’en Afrique, beaucoup arrivent en libérateurs de leur peuple face à l’oppression de la minorité, mais, avec l’appétit du pouvoir, finissent, eux aussi par se transformer en tyran. Adama Barrow dont la candidature à la présidentielle de décembre est évidente, ne pourrait pas être exempt de tout reproche.