Le 6 janvier dernier, des milliers de personnes ont pris d’assaut le Capitole américain. Parmi la foule, des symboles représentants différents mouvements assimilés à l’extrême droite américaine. Des groupes, fanatisés, radicalisés et souvent armés, qui sont montés en puissance ces dernières années, mais leur récente attaque n’est que la partie visible de l’iceberg.PUBLICITÉ
De notre correspondante à New York,(RFI).
Les images ont fait le tour de la planète. Une foule en colère qui entoure le Capitole, persuadée que l’élection a été volée, que Donald Trump est le vainqueur légitime. Casquette rouge et drapeaux américains à la main, la majorité des manifestants est là pour soutenir le président sortant.
Mais parmi la foule, des milliers de personnes prennent d’assaut le bâtiment. Ils représentent l’aile la plus radicale des partisans trumpistes. Ils cassent, volent, sèment le chaos et assurent même être là pour détenir certains législateurs pour les empêcher de déclarer officiellement la victoire de Joe Biden.
Certains étaient habillés en tenues paramilitaires, d’autres en costumes de guerriers. Ils avaient des battes de baseball, des menottes… Mais ce qui a surtout attiré l’attention ce sont les différents symboles brandis par ces militants : du drapeau ségrégationniste au T-shirt nazi. Preuve que l’extrême droite américaine est plus diverse que jamais.
Les Proud Boys
Dans les manifestations pro-Trump, ils sont souvent en première ligne. Leurs tenues noir et jaune les distinguent facilement dans la foule. Fondé en 2016, le groupe, exclusivement masculin, se présente avant tout comme un rempart contre le féminisme et l’immigration. Bien qu’ils se défendent d’être racistes, leurs membres utilisent souvent des signes et des discours de la suprématie blanche, notamment sur les réseaux sociaux. Ils n’hésitent pas non plus à appeler à la violence lors des manifestations Black Lives Matter. La veille de l’attaque du Capitole, le leader des Proud Boys, Enrique Tarrio a été interpellé pour avoir détruit une bannière Black Lives Matter appartenant à une église noire de Washington. Lors de la campagne présidentielle 2020, les Proud Boys se retrouvent à la Une lorsque Donald Trump est appelé à les condamner et qu’il les appelle à « reculer et à se tenir prêts ».
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Oath Keepers, Boogaloo, Nativistes… Derrière ces noms se cachent des milices qui affichent clairement leur message ségrégationniste, antisémite, anti-immigration. Ils n’hésitent pas à utiliser les symboles et les discours nazis. Composés de vétérans de l’armée, d’anciens policiers, ils sont très organisés et ont notamment joué un rôle primordial lors de l’attaque du Capitole. Ils étaient de tous les meetings de Donald Trump, s’improvisant en un service de sécurité-bis. Ils estiment qu’ils doivent protéger le pays contre « l’ennemi de l’intérieur » et croient en une guerre civile inévitable.
Les QAnon
C’est sans doute le mouvement qui a le plus gagné en puissance ces dernières années. Mouvance conspirationniste créée en 2017, elle s’appuie sur une théorie selon laquelle « l’État profond », un groupe de hauts responsables principalement démocrates impliqués dans des réseaux pédophiles, est à l’œuvre pour instaurer un nouvel ordre mondial. Cette croyance est largement enracinée chez les partisans de Donald Trump qui estiment que le président sortant était le seul à pouvoir déjouer ce plan « diabolique ».
Sur les réseaux sociaux, QAnon englobe désormais toutes sortes de conspirations de la pédophilie, au coronavirus en passant par la science-fiction.
Lors de l’assaut contre le capitole, L’un des leaders du mouvement QAnon s’était fait remarquer par sa tenue en peau de bête et ses cornes. Surnommé le « chamane Qanon », Jake Angeli a été arrêté.
Une extrême droite au grand jour
Si ces groupes sont composés de membres aux profils très divers, ils reposent sur des principes communs : fondamentalisme chrétien, suprémacisme blanc et méfiance plus ou moins grande envers le gouvernement. L’Alt-right américaine, comme on appelle cette nouvelle extrême droite aux États-Unis, est l’héritière du Ku Klux Klan qui avait perdu de son pouvoir. Elle commence sa réorganisation juste après l’élection de Barack Obama en 2008. L’arrivée d’un premier président noir est synonyme pour cette droite de l’arrivée du nouvel ordre tant redouté. L’Alt-right craint notamment le jour où la population blanche américaine « deviendra une minorité et que les valeurs blanches chrétiennes seront plus que jamais en danger ». Les Américains avaient notamment redécouvert cette frange de l’extrême en 2017 lors du rassemblement « Unite the Right », à Charlottesville. L’événement tourne à l’émeute et l’un des militants suprémacistes fonce avec sa voiture sur une contre-manifestante et la tue.
Donald Trump, à l’époque, refuse de dénoncer ces violences. Durant les quatre années qu’il aura passées au pouvoir, le président républicain s’appuie sur un discours qui résonne auprès des partisans de la mouvance de l’extrême droite. Il lui sert même parfois de relais comme lorsqu’il encourage les manifestants à « libérer » les États de leurs gouverneurs démocrates lors des manifestations contre le racisme et les violences policières qui ont suivi la mort de Georges Floyd.
Donald Trump n’a jamais caché son penchant et a même construit une partie de sa campagne 2016 sur des messages adressés aux électeurs proches de ces idéologies extrémistes, sur les conseils de Steve Bannon. C’est notamment grâce à cet idéologue de l’extrême droite que Donald Trump est vu comme un champion par ces groupes.
L’après-Donald Trump
Donald Trump a quitté la Maison Blanche le 20 janvier, mais tous ces mouvements qui sont nés ou qui ont gagné en puissance sous sa présidence vont continuer d’exister. L’attaque du Capitole est, pour eux, une victoire et un moyen de recruter de nouveaux membres. Une réalité qui inquiète plus que jamais les autorités qui ont replacé les groupes d’extrême droite en tête de la liste des menaces. Et dans son discours d’investiture, Joe Biden a lui aussi promis une tolérance zéro pour les « ennemis de l’intérieur ».