Le Sénégal amorce un tournant décisif dans le développement de l’Économie sociale et solidaire (ESS), longtemps marginalisée malgré son potentiel considérable pour la lutte contre la pauvreté et la dynamisation des territoires. Le Conseil interministériel sur l’ESS, réuni ce 23 mai 2025, a validé 17 mesures structurantes pour repositionner ce secteur comme pilier central du développement économique et social du pays.
Pendant trop longtemps, l’ESS a souffert d’un manque de reconnaissance, de confusion conceptuelle et d’un soutien institutionnel fragmenté. Portée par des milliers d’acteurs communautaires, souvent féminins, œuvrant dans l’artisanat, la transformation ou les services sociaux, elle n’a jamais bénéficié d’un véritable cadre structuré et incitatif. Ce vide est en passe d’être comblé.
Une gouvernance renforcée, une reconnaissance affirmée
Sous l’impulsion du président Bassirou Diomaye Diakhar Faye, l’ESS est désormais érigée en priorité stratégique. Le Ministre de la Microfinance et de l’Économie sociale et solidaire, Alioune Dione, a salué « une étape cruciale pour doter le secteur d’un cadre cohérent, opérationnel et orienté vers les résultats ».
Parmi les décisions phares, la mise en place d’un Conseil national de l’ESS, directement supervisé par la présidence, vise à coordonner la stratégie nationale, fédérer les acteurs et faciliter le dialogue intersectoriel. Un Comité interministériel et un Observatoire national viendront compléter ce dispositif, en assurant la collecte de données fiables, le suivi des politiques publiques et l’évaluation de leur impact.
Un cadre fiscal et douanier incitatif en préparation
Autre avancée majeure : le gouvernement s’engage à instaurer un régime fiscal et douanier spécifique et incitatif pour les acteurs de l’ESS. Cette mesure, attendue depuis longtemps, pourrait changer la donne pour des milliers de coopératives, mutuelles et associations à vocation économique, souvent pénalisées par un environnement peu favorable.
Le Premier ministre a d’ailleurs instruit les ministres des Finances, de la Microfinance et du Plan à travailler en synergie pour concrétiser ce dispositif, en lien avec la Loi d’orientation sur l’ESS.
Les marchés publics comme levier d’inclusion économique
Le quota minimum de 5 % de marchés publics réservés aux structures de l’ESS sera non seulement appliqué strictement, mais pourrait également être relevé, dans le but de créer un écosystème vertueux et inclusif. Une manière concrète de soutenir les producteurs locaux et de valoriser les produits issus de l’économie communautaire.
Des défis à relever, mais une ambition affirmée
Le ministre Alioune Dione a tenu à souligner que l’ESS, bien qu’étendue à plusieurs secteurs, reste encore mal comprise. « Il y a une confusion entre production solidaire, services publics et ESS », a-t-il reconnu. D’où la nécessité d’un effort de vulgarisation, de formation et de structuration territoriale, avec la création prévue de services régionaux et départementaux dédiés à l’ESS.
Une vision à long terme, inscrite dans la Vision Sénégal 2050
Cette refondation du secteur s’inscrit dans le cadre de la Vision Sénégal 2050, qui place la microfinance, l’économie solidaire et le développement communautaire au cœur de la transformation structurelle du pays.
Avec ces 17 mesures ambitieuses, le Sénégal ne se contente plus de reconnaître l’ESS. Il lui donne les moyens d’agir, d’innover et de transformer durablement les vies. C’est un nouveau chapitre qui s’ouvre pour ce secteur longtemps resté à la marge, et qui pourrait bien devenir un des moteurs les plus puissants du développement équitable et inclusif.