La capitale sénégalaise accueille depuis hier un symposium d’envergure sur l’agroforesterie, réunissant chercheurs, experts et acteurs du développement rural pour réfléchir à des solutions durables face aux défis climatiques et agricoles des pays sahéliens.
Organisé par le Centre de Suivi Écologique (CSE), en partenariat avec l’Institut Sénégalais de Recherches Agricoles (ISRA) et l’Union européenne, ce symposium marque l’aboutissement du projet Sustain Sahel. L’objectif est clair : faire de l’agroforesterie un levier majeur de la transition agro-écologique dans la région.
Une approche intégrée pour un avenir résilient
L’agroforesterie, définie comme l’intégration systématique d’arbres, de cultures et de bétail dans les systèmes de production, est aujourd’hui reconnue comme une solution clé face à la dégradation des terres et à l’insécurité alimentaire. Selon Jules Bayala, chercheur au Cirad, cette pratique vieille de cinquante ans contribue non seulement à améliorer la productivité agricole et pastorale, mais aussi à renforcer la résilience des communautés rurales sahéliennes.
Le projet Sustain Sahel met en lumière le potentiel d’intensification durable des systèmes de production. « Grâce aux travaux menés avec les chercheurs, nous avons découvert qu’il était possible de valoriser les résidus agricoles comme le mil ou le maïs, réduisant ainsi notre dépendance aux engrais chimiques », a souligné Diery Gueye, du Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (Cncr).
Un modèle de développement à repenser
Pour Cheikh Mbow, directeur général du CSE, l’agroforesterie doit être perçue comme un véritable moteur de développement social et économique. Il plaide pour un changement de paradigme, en s’inspirant de modèles asiatiques qui valorisent les petites exploitations et font des cultures vivrières un métier à part entière.
Le directeur du CSE insiste également sur l’importance environnementale de ces systèmes. L’introduction d’arbustes dans les cultures sahéliennes joue un rôle crucial dans la séquestration du carbone, contribuant ainsi à la lutte contre le changement climatique. Pourtant, leur statut hybride complique leur reconnaissance dans les politiques budgétaires nationales.
Un enjeu économique continental
Cheikh Mbow a par ailleurs alerté sur le déséquilibre commercial frappant l’Afrique dans le secteur agroforestier : le continent importe pour plus de 80 milliards de dollars de produits agroforestiers, contre seulement 50 milliards d’exportations. « Il est temps d’investir dans nos propres modèles, adaptés à nos réalités, pour renverser cette tendance », a-t-il affirmé.
Au Sénégal, les systèmes agroforestiers montrent une certaine stabilité, porteurs d’espoir pour une agriculture plus durable. Grâce à une meilleure gestion de la matière organique, ces pratiques offrent une rentabilité accrue et une réponse concrète aux objectifs de développement durable du Sahel.