Face à l’explosion des supports numériques et à la prolifération de contenus non encadrés, les autorités sénégalaises amorcent un tournant majeur dans la gouvernance médiatique. Un projet de réforme, présenté récemment par Habibou Dia, directeur de la Communication, prévoit la mise en place d’une Haute Autorité de régulation de la communication et des médias. Ce nouvel organe remplacera le CNRA, jusqu’ici limité à l’audiovisuel, et aura une compétence étendue à l’ensemble des supports, y compris les plateformes en ligne et la publicité.
Ce chantier législatif s’inspire des pratiques de régulateurs francophones comme l’ARCOM en France ou ses homologues ivoiriens et marocains. Il entend structurer un paysage médiatique confronté à la précarité des professionnels, à l’absence de contrôle de nombreux supports, et à une désinformation croissante. Le décret en préparation vise ainsi à « garantir une information fiable, protéger les journalistes et promouvoir une presse éthique et transparente », selon Dia.
Le projet repose sur un collège d’experts aux profils variés (juridiques, techniques, société civile), signe d’une volonté d’ouverture. En parallèle, un audit mené sur les 617 médias recensés révèle que 358 sont en situation d’irrégularité : contenus non originaux, absence de structure légale, non-respect des obligations fiscales. Pire, seuls 30 % des bénéficiaires du Fonds d’appui au développement de la presse remplissent les critères requis.
Pour assainir le secteur, les aides publiques seront désormais soumises à des conditions strictes (cotisations sociales, existence juridique, respect des conventions). Un arrêté de cessation de diffusion visera les supports non conformes, sans pour autant mettre fin à l’activité des entreprises concernées.