Dans le cadre du lancement de sa nouvelle émission “The Geolens Show”, l’experte en communitions et directrice de film Georgette Hélène Sow a fait la couverture du projet AI4DECLIC-SN portant sur l’utilisation de l’Intelligence artificielle dans la surveillance des maladies zoonotiques au Sénégal.

Question : Monsieur le ministre, nous remarquons que ces dernières années, le terme One Health revient souvent dans les débats portant sur la santé. Dans quelle mesure la surveillance des événements environnementaux peut-elle contribuer à une meilleure gestion de la santé des populations ? Avez-vous des exemples concrets à partager ?
Pr Daouda Ngom : Le concept One Health repose sur une approche multisectorielle qui intègre trois composantes essentielles : la santé humaine, la santé animale et la santé environnementale. Cette dernière englobe la gestion des écosystèmes et leur équilibre, car les interactions entre les humains, les animaux et leur environnement sont à la base de nombreuses maladies zoonotiques.
Selon l’Organisation de la Santé Animale, environ 60 % des 1 400 pathogènes humains connus sont d’origine animale. Le ministère de l’Environnement et de la Transition écologique est chargé de la gestion de plus de 200 aires protégées, où vivent de nombreuses espèces animales sauvages. La surveillance de ces zones est donc cruciale pour limiter les contacts entre la faune sauvage, le bétail et les humains, afin de réduire les risques de transmission des maladies zoonotiques.
Concrètement, nous mettons en place des stratégies d’aménagement et de gestion de la biodiversité. Par exemple, nous travaillons à réduire la divagation des animaux domestiques dans les parcs nationaux et à éviter les contacts entre les populations locales et la faune sauvage. En outre, nos efforts en matière de surveillance et de gestion des écosystèmes permettent de prévenir l’émergence de nouvelles maladies.
Question : Dans son Agenda national de transformation Sénégal 2050, le pays entend défendre sa souveraineté environnementale face aux enjeux écologiques et climatiques. Quelle pourrait être la contribution de la surveillance des maladies zoonotiques à la gestion durable des écosystèmes et de la biodiversité ?
Pr Daouda Ngom : Le Sénégal aspire à une souveraineté environnementale d’ici 2050. Toutefois, les défis écologiques et climatiques requièrent des actions concertées à l’échelle mondiale. Une gestion durable de nos écosystèmes est indispensable pour limiter l’apparition des maladies zoonotiques.
L’exemple de la COVID-19 a illustré comment une interaction non contrôlée entre la faune sauvage et l’homme peut entraîner la propagation de maladies. La surveillance des zoonoses passe donc par une gestion rigoureuse des interfaces entre les animaux sauvages, les animaux domestiques et les humains. Cela implique également des efforts de sensibilisation sur les dangers du braconnage et de la consommation de viande sauvage.
Au sein du ministère, nous avons mis en place un système de suivi des populations animales, notamment par des dénombrements réguliers des oiseaux dans des zones sensibles comme le Parc National du Djoudj et le Delta du Saloum. Ces efforts permettent de surveiller éventuelles épidémies et d’agir rapidement en cas d’alerte.
Question : Vous avez suivi le processus de co-création de la plateforme AI4DECLIC SN. Quelle est votre appréciation de cet outil et quelle est sa valeur ajoutée pour votre secteur ?
Pr Daouda Ngom : Le projet AI4DECLIC SN est très innovant, car il associe l’intelligence artificielle et la modélisation à la surveillance des maladies. La co-construction de cette plateforme a été essentielle pour impliquer toutes les parties prenantes : chercheurs, gestionnaires, services techniques de l’État et communautés locales.
L’outil propose plusieurs solutions, telles que Gestu, Tagat et Jotali, qui facilitent l’information, la sensibilisation et surtout l’alerte. Par exemple, Jotali permet de signaler rapidement des incidents, comme la découverte d’animaux morts, ce qui est essentiel pour la réactivité de nos services. Pour la gestion des aires protégées, où la faune est mobile et exposée à des menaces sanitaires, une plateforme d’alerte et de surveillance est un atout précieux.
Question : Avez-vous un message final à transmettre à nos lecteurs et spectateurs ?
Pr Daouda Ngom : Mon message est simple : nous devons cesser de mépriser la nature. L’homme est une espèce parmi des millions d’autres, et notre avenir est lié à la protection de notre biodiversité. Une meilleure gestion de nos écosystèmes, de l’agriculture et des interactions avec la faune sauvage est cruciale pour prévenir l’émergence de nouvelles maladies zoonotiques.
J’espère que les résultats du projet AI4DECLIC SN contribueront à améliorer la surveillance et la préservation de nos écosystèmes, pour un avenir plus sûr et plus durable.
« AUTEUR DE L’ENTRETIEN : Georgette Hélène Sow – Directrice et productrice De film et Experte en Communication »
