(Agence Ecofin) – Pour faire face à cette facture salée, la BAD travaille actuellement sur un mécanisme africain de stabilité financière, un dispositif visant à refinancer la dette africaine à des conditions plus favorables et à réduire la dépendance aux créanciers privés. Mais le projet en gestation depuis plusieurs années peine à voir le jour.
Les économies africaines subissent une pression croissante alors que les coûts de service de leur dette atteignent des niveaux sans précédent. Kevin Urama (photo), vice-président et économiste en chef de la Banque africaine de développement (BAD), a révélé que les nations africaines paient jusqu’à cinq fois plus d’intérêts lorsqu’elles empruntent sur les marchés internationaux, par rapport aux institutions multilatérales comme la BAD ou la Banque mondiale.
Lors d’une session de l’Union africaine consacrée aux finances et à l’intégration économique à Abuja, M. Urama a montré que le basculement vers des financements privés, bien que porteur d’opportunités, se traduit par une explosion des coûts pour les pays africains. « La structure de la dette en Afrique a radicalement changé », insiste l’économiste. En 2023, 49% de la dette africaine était détenue par des créanciers privés, un chiffre qui devrait grimper à 54% d’ici 2024.
Les données de la BAD illustrent une trajectoire préoccupante : depuis 2010, la dette publique africaine a augmenté de 170%, et vingt pays sont aujourd’hui en situation de détresse ou à haut risque d’endettement, contre treize il y a dix ans. De 17 milliards $ en 2010, les nations africaines devraient allouer environ 74 milliards $ au service de leur dette, en 2024. Plus de 40 milliards $ de ce montant seront dus à des créanciers privés. Entre 2015 et 2022, les coûts du service de la dette ont bondi de 8,4% à 12,7% du PIB dans 49 pays africains. Le vice-président de la BAD a averti que l’utilisation de dettes coûteuses à court terme pour financer des projets de développement à long terme compromet la soutenabilité des finances publiques.
Pour répondre à ces défis, la BAD milite pour la création d’un mécanisme africain de stabilité financière, qui permettrait de refinancer durablement les dettes des pays africains à des conditions plus favorables. Ce projet, en gestation depuis trois ans, est censé contribuer à réduire la dépendance du continent aux marchés internationaux et à contenir les effets des crises économiques mondiales. « L’Afrique reste le seul continent sans mécanisme régional de stabilité financière, ce qui aggrave sa vulnérabilité face aux crises mondiales », a souligné Kevin Urama.
Fiacre E. Kakpo
Edité par Mahoudjro F. Vahid Codjia