A Dakar et sa banlieue, l’Etat a décidé de déguerpir les tabliers et les ambulants qui sont au niveau des marchés et dans d’autres secteurs de vente. Ce qui jette l’incertitude dans l’avenir de ces jeunes. Cheikh Gawane Wade, président du Rassemblement national des acteurs du secteur informel (Rasi), dénonce le déguerpissement des marchands ambulants et invite l’Etat à trouver des sites de recasement.
De Colobane à Rufisque, en passant par Keur Massar, Bargny, Diamniadio, la colère des ambulants gronde. Cheikh Gawane Wade, président du Rassemblement national des acteurs du secteur informel (Rasi), s’offusque contre le déguerpissement des marchands ambulants de Colobane. «C’est une violation» des droits de ces commerçants, tonne-t-il. «Vous savez, la situation est très délicate au niveau du Sénégal où les vendeurs du secteur informel en général sont persécutés dans leurs droits. Pourtant, il y a des droits, des recommandations, comme le travail décent qui a été ratifié par le Sénégal. Et les autorités sénégalaises, après avoir ratifié ces chartes, n’ont pas respecté ce qu’elles disent. Parce que le vendeur est un travailleur et le travail décent considère tout travailleur qui exerce un travail comme un fonctionnaire, un travailleur qui jouit de tous ses droits. Le Sénégal est en train de bafouer les droits des acteurs du secteur informel, notamment les ambulants. C’est ce qu’aujourd’hui nous sommes venus dénoncer au niveau du salon et vraiment parler de ces problèmes pour trouver des solutions», affirme le président du Rasi. Même s’il salue la visite rendue aux ambulants par le Premier ministre à Colobane, Cheikh Gawane Wade n’est pas totalement rassuré. «Le Premier ministre est descendu à Colobane et il a vraiment redonné l’espoir aux gens, mais ça ne suffit pas, parce que les déguerpissements continuent jusqu’à présent. Et on veut que les déguerpissements s’arrêtent et qu’on se mette autour d’une table, avec l’Etat et les collectivités locales, la plateforme des acteurs de l’informel, pour trouver des solutions», avance-t-il.
Aujourd’hui, il y a un combat de longue haleine à gagner : le recasement de ces jeunes désœuvrés qui trouvent leur pain quotidien dans la rue, les abords des marchés. Cheikh Gawane Wade propose la valorisation des espaces, à l’image des entreprises qui achètent des terrains pour y implanter leurs structures. «Pourquoi on n’achète pas des terrains pour recaser les marchands ambulants ?», s’interroge M. Wade, qui indique que ces ambulants ont besoin d’être formés pour leur garantir une reconversion. La mise en place du Rassemblement national des acteurs du secteur informel, depuis un an, répond à une volonté de permettre à l’Etat d’avoir un interlocuteur. Dans la mesure où, selon son président, «il ne peut pas parler avec tout le monde». Invitant ainsi les autorités à associer dans le processus de décisions les acteurs du secteur de l’informel pour éviter les erreurs du passé. «Abdoulaye Wade avait donné des cantines, quelle est la suite ? Il y a eu beaucoup de fonds qui ont été dégagés et les promoteurs payés. Les cantines sont restées entre les mains des promoteurs bien qu’ils aient encaissé l’argent. Il faut revoir cette question. Il y avait 3500 cantines», prévient-il. «Nous ne faisons pas de la politique», tient-il à préciser. Le Rasi va remettre aux nouvelles autorités un mémorandum en vue d’une meilleure prise en charge des préoccupations des marchands ambulants. Il réclame «l’abrogation» de la loi 76 qui, selon lui, considère «le marchand ambulant comme un délinquant», alors que la contribution du secteur informel dans le Pib du Sénégal est de «82%». Considérant la non-résolution du cas des ambulants comme «une bombe à retardement» que le nouveau régime doit «désamorcer avant qu’il ne soit trop tard».
M. Wade a été accroché en marge de la deuxième édition du Salon régional de l’entreprenant de droit Ohada (Saredo), qui se tient à Dakar du 8 au 12 juillet 2024 sur le thème : «Promotion du statut de l’entreprenant de droit Ohada, levier puissant pour la valorisation des acteurs du secteur informel». Le Saredo réunit plusieurs Etats membres de l’Ohada et le corps diplomatique.