Djiby Amady Sow alias Ben Laden est le Secrétaire Général du Syndicat des Éleveurs de la Nouvelle Génération (SENG, en acronyme). A moins d’une semaine de la fête de Tabaski, cet éleveur de passion et dans l’âme, tâte avec nous, le tempérament fièvreux du marché des petits ruminants et, notamment, du mouton. M. Sow qui plaide pour une meilleure implication des acteurs dudit secteur dans l’élaboration de la politique pastorale du pays,va pour un audit complet des fonds injectés pour booster l’élevage de 1960 à nos jours.
Entretien, réalisé par Ibrahima NGOM/DAMEL..
Comment se porte le marché du mouton à moins d’une semaine de la fête de Tabaski ?
Actuellement, il ya une forte affluence des vendeurs de moutons vers la capitale Dakar et dans certaines villes du pays. On a bon espoir que les sénégalais vont être satisfaits car il ya des moutons qui sont à la porte de toutes bourses. Cependant, les difficultés ne manquent pas.
Pouvez-vous nous énumérer quelques unes?
Les éleveurs sont confrontés à des problèmes tels que l’acheminement du bétail, l’alimentation et la sécurité. Même si l’Etat fait des efforts louables, il reste beaucoup à faire. Pour l’autosuffisance en moutons, cela doit se préparer en amont. On ne doit plus attendre à quelques semaines de la Tabaski pour se pencher sur ce sujet. On doit réinventer des mécanismes pour disposer d’un cheptel suffisant pouvant satisfaire la demande des populations sénégalaises. La Tabaski s’échelonne sur 2 à 3 jours seulement. On doit aller au-delà par ce qu’il ya d’autres événements et, surtout, religieux qui rythment notre vie.
Mais,que propose le SENG,votre entité syndicale pour corriger ces impairs?
Notre syndicat travaille sans relâche dans ce sens. Nous sommes pour l’autosuffisance, pas seulement en moutons mais, en vaches, boucs, oiseaux, bref, pour tout ce qui tourne autour de l’élevage. Nous ambitionnons de tout faire pour arrêter l’importation des moutons et consorts. Sur ce, nous exhortons l’Etat à œuvrer pour qu’on trouve ensemble des solutions idoines. Il doit communiquer davantage avec tous les acteurs de l’élevage pour lister les priorités et faire face aux obstacles. Je pense que et l’Etat et les éleveurs et les partenaires, tous doivent accorder leurs violons pour bâtir une politique pastorale digne de ce nom.
Et pour y arriver, quels sont les leviers sur lesquels vous devez alors vous appuyer?
A mon sens, il ya trois(3) piliers fondamentaux : la maîtrise de l’eau, l’alimentation du cheptel et le financement. Le gouvernement doit revitaliser les points d’eau déjà existants ; construire des forages solaires pour faciliter l’abreuvage des bêtes. Il faut aussi un financement à long terme de la production. L’assurance et la sécurité du cheptel demeurent aussi cruciales. Le vol du bétail appauvrit les éleveurs. Il faut alors des mesures draconiennes pour y mettre un terme. Et je pense que la criminalisation du vol du bétail est une bonne chose. Je souligne également l’implication des éleveurs dans l’élaboration et la mise en activité du code pastoral. On doit accueillir , avant tout, nos avis avant tout décret d’application. Par exemple, sur la loi agro-sylvo-pastorale, la dimension élevage doit y trouver toute sa teneur, voire toute sa vraie signification. Il faut une reformulation qui épouse concrètement la notion de » l’élevage ».
L’Etat du Sénégal a accompagné votre secteur avec des projets novateurs. Où se situe alors l’écueil ?
C’est vrai. Depuis 1960, le gouvernement de la République du Sénégal injecte des sommes astronomiques . Des milliardaires sont engloutis dans le secteur de l’élevage. Le seul hic, c’est que ces investissements ne reflètent pas toujours pas la réalité du terrain. Il ya un problème lié à la clé de répartition de ces fonds alloués. C’est pourquoi, nous demandons l’audit et l’évaluation du secteur de ces 15 dernières années (2009-2024] pour y voir plus clair. La volonté politique existe mais, des personnes de moralité douteuse anéantissent les efforts permettant de booster notre élevage.
Cela a les relents d’une gestion peu orthodoxe, douteuse.
Si.Dans beaucoup de projets et programmes au niveau de ce secteur, les acteurs sont souvent mis devant le fait accompli. Moi, personnellement, je suis pour l’arrêt des subventions. Elles ne servent à rien sinon, à enrichir des intermédiaires sans foi ni loi. Idem pour la levée des taxes pour l’entrée du cheptel. On doit en finir avec les » prête-noms ». Le SENG milite pour la création des Sociétés d’Elevage comme SODESP pour une meilleure prise en charge des préoccupations des acteurs du secteur. Si nous arrivons à apporter des joints à cela, l’autosuffisance en mouton sera une réalité palpable. Idem pour les autres catégories d’élevage. Nous sommes pour la sécurisation du foncier pastoral qui est une donnée essentielle pour les éleveurs.
Ibrahima NGOM Damel