Le doublement du capital minimum requis, annoncé par le conseil des ministres de l’UMOA, concerne 65 banques qui devront lever 472,8 milliards de FCFA supplémentaires. Une situation qui créera des opportunités, mais qui survient dans un environnement aux risques croissants.
Le conseil des ministres de l’Union Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA) du 21 décembre 2023 a décidé de doubler le capital minimum requis pour les banques, le faisant passer de 10 à 20 milliards de FCFA. Cette mesure concerne 65 banques réparties dans les 8 pays de la zone, qui devront lever un total de 472,8 milliards de FCFA (850,8 millions $) de fonds propres supplémentaires auprès des investisseurs sous différentes formes possibles, y compris des ouvertures et augmentation de capital, des fusions ou des acquisitions et des recours aux réserves ou bénéfices conservés.
Le Sénégal arrive en tête avec 13 augmentations de capital à réaliser pour 98,3 milliards. Il est suivi du Togo (9 banques, 83,6 milliards) et de la Côte d’Ivoire (12 banques, 82 milliards), principal marché du crédit dans la région. Le défi est également de taille au Burkina Faso où 62,4 milliards devront être mobilisés par 10 banques.
Cet effort intervient au Burkina Faso alors que des acteurs majeurs du secteur dans ce pays, comme Vista Bank Group et Coris Bank International, sont engagés dans des opérations de rachat de filiales bancaires du continent, y compris celles de Société Générale, ainsi que dans une prise de participation majoritaire dans le groupe Orabank.
D’après la Commission Bancaire d’Afrique de l’Ouest, les fonds propres des banques de la zone ont généré un rendement moyen de 16,8% en 2022, en hausse par rapport aux 11,4% de 2020. Sur la base des nouveaux capitaux à lever, il faudrait générer environ 77 milliards de FCFA de bénéfices nets supplémentaires pour commencer à dégager des gains au bout de 6 ans minimum.
Compte tenu du contexte économique (inflation à 5%, resserrement monétaire), on peut tabler sur un fléchissement du rendement des fonds propres dans une fourchette de 14 à 15% pour les banques. Et des dividendes annualisés de 8 à 10% pour les investisseurs participant aux augmentations de capital, selon les données de la BRVM.
L’impact économique attendu est une amélioration du financement des PME/PMI, avec une probable croissance des encours de crédit de 8 à 12% pour ce segment. À condition bien sûr que les nouveaux capitaux soient alloués au tissu productif et non à d’autres actifs.
Plusieurs risques subsistent néanmoins : dégradation de la conjoncture, durcissement monétaire accéléré, ou intensification de la concurrence. S’y ajoute également des mouvements de contestation de la persistance des accords monétaires hérités de la colonisation française dans certains pays comme le Niger, le Burkina Faso ou le Mali.
Les modalités et le calendrier de mise en œuvre du doublement des fonds propres bancaires n’ont pas encore été précisés par la BCEAO. L’opération devrait être assez aisée pour les filiales de grands groupes, plus complexe pour les banques devant chercher des investisseurs.
À noter qu’avec 133 banques (dont 22 succursales) pour 128 millions d’habitants en 2022, le marché bancaire de la zone UEMOA reste très saturé en comparaison d’autres marchés africains. Le Kenya par exemple compte 42 banques pour 54 millions d’habitants, le Nigeria, 23 pour 206 millions.