À côté des startups, les entrepreneurs du monde rural ont pris part au Forum de la Pme organisé, du 13 au 15 juillet, par l’Adepme. Une occasion pour ces petites boîtes au rêve grand d’affirmer leurs ambitions. Elles veulent, en effet, être plus compétitives, se formaliser, pour certaines, et développer l’exportation. D’où leur appel pour des financements adaptés à leur profil.
Dans un brouhaha total, la communication est difficile sous un chapiteau. Jeunes et femmes, mobilisés, défilent pourtant entre les différents stands du salon d’exposition du Forum de la Pme. Banques, sociétés d’investissement, systèmes financiers décentralisés, compagnies d’assurance affichent leurs couleurs pour faire la promotion de leurs produits. Ils ne sont pas restés oisifs. L’enjeu en vaut la chandelle. Il s’agit de financement, nerf de la guerre et élément déterminant pour tout entrepreneur. Pour cette raison, les visiteurs ont été nombreux.
En boubou blanc, un sac à la main, Abdoulaye Ndiaye s’entretient avec les équipes d’une banque commerciale. La main gauche tient deux brochures. Penché et silencieux, il s’imprègne des différentes informations avant d’engager le dialogue sur fond de raillerie. « Il faut que les banques financent vite et moins cher », dit-il en souriant. Leurs rires s’entremêlent. Abdoulaye est dans la transformation de produits agricoles. L’oseille, le pain de singe et la mangue figurent parmi ses matières premières. Son projet, dit-il, grandit d’année en année, avec surtout l’augmentation des ventes et de la collaboration. Aujourd’hui, son désir est de se formaliser pour capter des ressources lui permettant d’acheter du matériel de transformation de dernière génération. « À un moment donné, il faut que l’entreprise grandisse. Je compte vraiment me formaliser pour pouvoir lever des fonds conséquents. Le financement est déterminant dans tout projet. Je crois qu’avec le Guichet unique, les chances deviennent égales », dit-il.
À l’en croire, un coup de pouce des banques commerciales et autres fonds lui permettra de franchir le pas. « J’ai beaucoup travaillé avec des Sfd (Systèmes financiers décentralisés, Ndlr). Mais, il faut des ressources longues qui peuvent permettre de prendre en charge l’emballage de qualité, d’être compétitif et de pouvoir exporter nos produits souvent bien appréciés par les touristes en vacances au Sénégal », souligne-t-il. Mme Faye, elle, est venue de Gandon (Saint-Louis) pour prendre part au Forum de la Pme. Elle le conçoit comme une occasion de nouer des partenariats qui peuvent booster son activité. Son cœur flanche pour la transformation des produits halieutiques. Elle sert du poisson séché, du poisson fumé, des crevettes, etc. Aujourd’hui, elle souhaite franchir un cap et disposer d’une importante entreprise qui emploie et transforme en quantité. La qualité également est un défi pour elle, dans un contexte de raréfaction des ressources halieutiques. L’ambition pour elle, c’est de capter aussi plus de ressources financières. « Les petits financements nous plombent. Pour une activité aussi importante, nous avons besoin de gros financements. C’est la raison pour laquelle je compte m’entourer de garantie nécessaire pour travailler avec les banques commerciales et les Sfd », s’exprime-t-elle. Cependant, son plaidoyer est la baisse des taux de crédit. « D’après les retours d’informations que j’ai eus, les taux appliqués sont excessifs. Il faut alléger les conditions et permettre aux entreprises d’être compétitives », ajoute-t-elle. L’ambition de Mme Faye est de faire grandir sa petite entreprise pour être, plus tard, sur le marché régional, puis continental et international à la fin. « Nos produits sont aimés, donc il faut qu’on fasse en sorte de développer l’exportation. C’est une nécessité aujourd’hui », a-t-elle dit.
Le rêve de Mme Faye est également celui d’Ousmane. Ce dernier est de Kaffrine. Il explore plusieurs secteurs, dont l’élevage et l’agriculture. Le financement constitue l’une de ses préoccupations. Selon lui, c’est une exigence pour tout entrepreneur. « Sans financement, il est compliqué de développer des projets à grande échelle. Donc, il faut plus d’accompagnement et veiller à ce que les taux d’intérêt soient bonifiés », souhaite Ousmane. Son ambition d’entrepreneur est de rayonner pour sa région et le pays.
10 réformes d’un montant de 111 milliards de FCfa pour booster les Pme
Le Forum de la Pme a été clôturé par les concertations sur le financement des Pme. À cette occasion, l’ambition d’atteindre 3000 milliards de FCfa d’encours de crédit en 2028 a été présentée. Elle repose sur 10 réformes d’un coût global de 111 milliards de FCfa.
Le Forum de la Pme a été clôturé par des concertations nationales sur le financement des Pme. Les travaux ont été dirigés par le Ministre de la Microfinance et de l’Économie sociale et solidaire, Victorine Ndeye. Les travaux ont été entamés avec la présentation de l’ambition stratégique et les objectifs clés du Sénégal. Il s’agit de passer de 500 milliards de FCfa à 3000 milliards de FCfa de financements en 2028. Le Sénégal veut aussi voir l’encours de crédit passer de 9 % à un portefeuille de 25 %. Dans cinq ans, l’ambition du Sénégal est de passer de 500 000 à 1 200 000 Pme bénéficiaires de financements octroyés par les Systèmes financiers décentralisés (Sfd), la Der et les autres mécanismes de financement. Concernant les Pme disposant d’états financiers, le Sénégal veut passer de 3 % à 20 %. Dans la même veine, il compte voir le défaut de remboursement de crédit passer de 30 % à 10 %. À côté, le Sénégal compte aussi explorer pour les Pme des mécanismes innovants, tels que le financement en capital, l’affacturage, le crédit-bail et la finance islamique. Par ailleurs, l’accès au financement aux entreprises dirigées par les femmes et les jeunes est facilité. La stratégie mise en place s’appuie sur 10 projets de réformes. Il s’agit du renforcement du dispositif de la Bceao, de faciliter aux institutions de financement l’accès aux ressources pour le financement des Pme, de renforcer l’accompagnement des Pme, de renforcer les mécanismes de garanties pour les Pme, d’adapter la fiscalité des Pme pour promouvoir leur compétitivité et accélérer leur formalisation.
Les réformes concernent également l’accroissement substantiel du financement structuré et intégré des secteurs prioritaires et la mobilisation des financements au profit des Pme en amorçage. Le Sénégal compte, en outre, favoriser les produits financiers innovants et mettre aussi en place un système de gestion de données pour le financement des Pme. Le coût de ces réformes est estimé à 111 milliards de FCfa. Sur les 3000 milliards de FCfa espérés pour les Pme en 2028, 2000 milliards devront provenir des banques et des Sfd, 500 milliards de l’État, à travers les structures publiques, et 500 milliards des Partenaires techniques et financiers (Ptf- en ligne directe ou indirecte). Ces concertations devront permettre, selon le Ministre de la Microfinance, de l’Économie sociale et solidaire, de contribuer au développement économique du pays à travers les Pme. « Les travaux ont permis de discuter des conditions de financements massifs et sécurisés des Pme. Ils orienteront les actions à venir, car nous sommes tous conscients que les Pme jouent un rôle fondamental dans notre économie en tant que moteur de création d’emplois. Leur développement et leur compétitivité sont des enjeux majeurs pour le Sénégal », a dit Victorine Ndeye.
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PÉRENNITÉ DES ENTREPRISES
La recette de l’Onecca
Pour Mor Dieng, président de l’Ordre national des experts-comptables et comptables agréés (Onecca), l’expert-comptable constitue le médecin de l’entreprise. Il garantit, selon lui, la bonne santé financière et des états financiers fiables. D’après lui, l’un des problèmes des Pme est qu’elles ne sont pas souvent dans la prévention, mais dans la réaction. À l’en croire, les prochaines étapes pour développer la relation Banque-Pme devront être, entre autres, d’obtenir un cadre d’appétence spécifique pour chaque banque, de suivre les Pme dans les post-financement, de mettre un cadre de concertation régulière et de développer l’éducation financière.
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L’Uemoa prête à accompagner
L’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) est dans les dispositions pour garantir la compétitivité des Pme de l’Union, selon la Représentante-résidente Aïssa Kabo. À l’en croire, différents projets sont mis en œuvre. « L’Uemoa a souhaité que le secteur privé soit le moteur de la croissance avec des chantiers prioritaires, tels que l’accompagnement des startups avec l’initiative tremplin Uemoa qui récompense les meilleurs projets. Nous avons aussi initié le mois du consommer local qui met l’accent sur les Pme à forte composante locale. Nous mettons également à la disposition des Pme des cadres de l’Uemoa pour l’encadrement. Sans oublier l’adoption d’un code de l’artisanat permettant de les formaliser et d’en faire des acteurs connus et inscrits dans les projets de financement », a souligné Mme Kabo. À ses yeux, le marché de l’Uemoa est également le marché des Pme sénégalaises.