Les pertes post-récoltes (PPR) sont l’une des principales faiblesses du secteur agricole en Afrique. Cette réalité demeure constante, alors que face à l’inflation alimentaire, les pays africains sont à la recherche de politiques pertinentes pour augmenter la disponibilité alimentaire et réduire leurs dépendances vis-à-vis de l’extérieur.
Ce défi ouvre cependant la voie à plusieurs possibilités d’investissement. Différents segments de la chaîne de valeur peuvent ainsi générer des opportunités économiques. Il s’agit notamment de l’amélioration du stockage à travers l’installation d’entrepôts répondant aux normes d’humidité et de température. Il y a aussi le conditionnement et la transformation agricole à travers la fourniture de machines pour une première phase de traitement des denrées hautement périssables.
Face à la question des pertes post-récolte, la Banque africaine de développement a mis en œuvre plusieurs interventions qui entrent dans le cadre de sa stratégie « Nourrir l’Afrique », une de ses cinq priorités stratégiques appelées « high5 ». Ces interventions ont concerné depuis 2016, des approbations de prêt aux pays pour, non seulement renforcer la production agricole mais aussi renforcer l’aval agricole à travers un soutien pour les infrastructures de stockage, la commercialisation et le conditionnement des denrées agricoles.
Dans le cadre de l’Africa Investment Forum, de nouvelles opportunités sont explorées pour le développement agricole. Il s’agit notamment de la 4ème révolution industrielle (4IR) et de ses possibles effets. Selon des experts de la Banque, « l’impact de la 4IR sur l’agriculture pourrait être profond et plus encore en Afrique où la population devrait doubler d’ici 2050 ».
Les cas d’utilisation de l’internet des objets et de l’intelligence artificielle au profit de la réduction des pertes post-récolte ne manquent pas en Afrique. Au Nigeria, Binkabi, une initiative de commerce agricole basée sur la blockchain, a développé en coopération avec Sterling Bank, une plateforme qui permet aux agriculteurs de déposer leurs récoltes dans un entrepôt, par opposition à la situation actuelle dans laquelle ils sont souvent contraints de les vendre immédiatement après la récolte. En échange de leurs récoltes déposées, les agriculteurs reçoivent un reçu d’actif « tokenisé » qui est stocké sur la Blockchain.
Autre exemple, au Maroc, Visio-Green Africa, une filiale de la société française Visio-Green, a lancé en 2018 le premier système IoT complet du Maroc. L’objectif est de disposer d’un système d’irrigation intelligent, de donner aux agriculteurs la possibilité de gérer leurs champs à distance de manière simple, et de collecter ou stocker différents types de données pour gérer les rendements de manière plus efficace.
La Banque africaine a également mis en œuvre la suite d’outils RASME (Remote appraisal, supervision, monitoring and evaluation) basée sur la plateforme KoBoToolbox, une solution à code source ouvert développée par des chercheurs affiliés à la Harvard Humanitarian Initiative. Elle permet une collecte et une analyse à distance des données, via des interfaces mobiles – tablettes, téléphones mobiles ou ordinateurs portables – sur des projets exécutés dans des zones éloignées ou d’accès difficile. RASME est actuellement mis en œuvre dans une trentaine de pays africains dont le Rwanda, le Burundi, la Tanzanie, l’Éthiopie, le Gabon, le Cameroun…