Une tension sur le marché du ciment est constatée depuis quelques mois. Ainsi, le produit est devenu rare et cher. Une situation qui porte préjudice aux clients partagés entre les retards des travaux et les spéculations, puisque certains commerçants vendent la tonne entre 72 000 et 75 000 FCfa.
Le contexte international n’épargne aucun pays. Au Sénégal, l’une des répercussions, c’est la cherté des denrées alimentaires. Mais pas que ça, le marché de la construction est également affectée avec la hausse du prix du ciment. Mais plus que le renchérissement (somme toute modeste), c’est la rareté du produit qui inquiète Ousmane Faye.
En cette matinée du samedi, sa quincaillerie, logée à quelques encablures de la passerelle de Poste Thiaroye, expose plusieurs matériaux de construction. Le fer, des pots de peinture, des caisses de carreaux sont soigneusement rangés dans un coin. L’un des produits les plus demandés par les clients, le ciment, est absent de son commerce. Pourtant, il a fait des commandes. « J’espère recevoir 30 tonnes au plus tard mardi. La situation n’est pas nouvelle. Depuis six mois, on s’approvisionne difficilement. Les cimentiers ne produisent pas assez à cause de la cherté des intrants », renseigne-t-il, assis à côté des motopompes.
Cette situation est lourde de dommages pour quelqu’un qui a une clientèle fixe. « J’ai reçu des dizaines de commandes et reçu l’argent. Malheureusement je peine à leur fournir le produit », regrette-t-il. À quelques mètres de lui, Abdoul Sall tient sa quincaillerie. « La situation est inédite et complexe », se plaint-il d’entrée, lui qui évolue dans le secteur depuis plus de vingt ans. D’ailleurs, il ne lui reste que 4 tonnes qui sont déjà vendues. « Le produit est devenu rare et cher », dit-il. Il vend la tonne à 72 000 FCfa, transport inclus. À Guinaw rails, non loin du pont de Thiaroye, femmes et hommes s’activent autour du commerce de légumes. Pendant ce temps, au fond de sa quincaillerie, Ibrahima fait une facture pour un de ses clients. Ce lundi matin, il dispose d’un stock de plus de dix de tonnes dans son dépôt. « Le produit est stocké à l’intérieur », avertit-il. Mieux loti que les autres, il déplore malgré tout la cherté du produit. Il renseigne que la tonne est passée de 60 000 à presque 75 000 FCfa. Une situation « problématique » qu’il justifie par la hausse du prix du transport. « Nous sommes obligés de nous aligner sur le prix usine et de répercuter le coût du transport », souligne-t-il vêtu d’un boubou marron.
Clients dans le désarroi, chantiers retardés
À l’image de Pape Niang que nous avons trouvé en train de réfectionner sa maison au quartier Lansar, les clients subissent une double peine. Aujourd’hui, souligne-t-il, la rareté du ciment est à l’origine du retard constaté dans ses travaux. « Un jour, j’ai marché de Lansar à Fass Mbao car j’avais besoin en urgence de 2 tonnes de ciment. Malheureusement, je suis rentré bredouille », se rappelle-t-il. Ensuite, il lui a fallu attendre deux semaines avant de pouvoir s’approvisionner. Quelques mois après, un autre élément est venu s’ajouter à sa souffrance. C’est l’augmentation du prix. « Les commerçants spéculent. C’est anormal que le prix de la tonne de ciment passe de 65 000 à presque 75 000 FCfa en quelques mois. Notre pouvoir d’achat est réduit et les chantiers sont ralentis », souligne M. Niang.
Ameth Sall, lui, a vu son projet stagner. Il s’est engagé, il y a peu de temps, dans la fabrication et la vente de briques. L’envol de son entreprise semble plombé par la cherté du ciment. Et il attend patiemment une éventuelle baisse. « Impossible d’acheter la tonne de ciment à 72 000 ou 75 000 Fcfa et de vendre la brique à 250 ou 275 FCfa. Actuellement, les commerçants spéculent. Ainsi, nous sommes lésés, nos projets sont retardés », déplore Ameth.
Devant un chantier, Ndiaga Niang aide des jeunes à décharger du sable marin. Cette charge est destinée au crépissement d’une façade. Le maçon, riche de plus d’une dizaine d’années d’activité, a subi les impacts de la rareté du ciment car, parfois, il est obligé d’attendre longtemps avant de trouver le produit. « Nous sommes obligés d’attendre des jours. Ce qui ralentit nos travaux », s’inquiète Ndiaga, lui aussi pointant le renchérissement du produit.