Adoptée par le Parlement américain en avril dernier, une loi relative à la lutte contre les activités malveillantes de la Russie en Afrique permet à Washington de sanctionner les gouvernements et les fonctionnaires africains accusés de complicité.
La Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) a exprimé, dans un communiqué publié le jeudi 18 août, son « mécontentement » face aux « mesures punitives » ciblant les pays africains prévues par la loi relative à la lutte contre les activités malveillantes de la Russie en Afrique adoptée par le Parlement américain en avril dernier.
« Le Sommet a exprimé son mécontentement concernant le fait que le continent soit la cible de mesures unilatérales et punitives en vertu de la loi sur la lutte contre les activités malveillantes de la Russie en Afrique, récemment adoptée par la Chambre des représentants des Etats-Unis, et a réaffirmé sa position de principe de non-alignement à tout conflit extérieur au continent », a indiqué la SADC dans le communiqué publié à l’issue de son 42e Sommet ordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement, qui s’est tenu à Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo.
Le bloc régional regroupant seize pays a également précisé avoir mandaté son président pour « notifier au président et au Congrès des Etats-Unis la forte opposition de la SADC à cette loi » et a « exigé que cette question soit inscrite à l’ordre du jour des réunions de l’Union africaine (UA) ».
Plus grande organisation régionale en Afrique, la SADC regroupe actuellement 16 pays membres, en l’occurrence l’Afrique du Sud, l’Angola, le Botswana, la RDC, le Lesotho, Madagascar, le Malawi, l’île Maurice, le Mozambique, la Namibie, Eswatini, les Seychelles, la Tanzanie, les Comores, la Zambie et le Zimbabwe.
Sanctions contre les gouvernements et les fonctionnaires
La Chambre des représentants (la chambre basse du Parlement américain) avait adopté le 27 avril dernier, une loi portant sur la lutte contre les activités malveillantes de la Russie en Afrique (Countering Malign Russian Activities in Africa Act), à une écrasante majorité de 419 voix.
Outre la surveillance des activités malveillantes présumées du gouvernement russe et de ses mandataires comme les compagnies militaires privées, les oligarques proches du président Vladimir Poutine et les entrepreneurs financés par le gouvernement russe, cette loi permet aux Etats-Unis de sanctionner les gouvernements et fonctionnaires africains qui facilitent ou contribuent à de telles activités.
Le texte prévoit en effet de « tenir les gouvernements africains ainsi que leurs fonctionnaires et autres individus ou entités complices de la violation ou de la facilitation de l’évasion des sanctions américaines contre la Russie, et ses mandataires responsables de leurs actes, par le biais de sanctions ou d’autres restrictions ».
Selon certains observateurs, la nouvelle loi américaine vise en réalité à sanctionner les « amis » de Poutine en Afrique. « Il est évident que les Etats Unis ne sont pas satisfaits de la façon dont tant de pays africains ont voté à l’Assemblée générale des Nations unies et de leur position relativement non alignée […] Proportionnellement à d’autres régions, un plus grand nombre d’Etats africains n’ont pas soutenu la résolution de l’Assemblée générale du 3 mars, qui condamnait l’invasion de l’Ukraine par la Russie. 27 pays africains ont voté pour cette résolution. Un seul – l’Erythrée – a voté contre, tandis que 17 se sont abstenus, et les autres étaient absents », estime Peter Fabricius, consultant à l’Institut des études pour la sécurité (ISS Africa) basé en Afrique du Sud, au Kenya, en Ethiopie et au Sénégal.